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Le terrorisme ou l’incarnation du mal

"Chaque civilisation établit un certain rapport, stable ou instable, entre foi et doute". Edgar Morin



La fin du monde, jadis annoncée, aurait-elle soufflé sur la planète terre ? En tout cas, la situation actuelle semble bien le prouver avec l’escalade de l’horreur, œuvre de groupes terroristes qui ont installé une atmosphère de peur planétaire. Oui, les peurs ont effectivement changé de direction : maintenant, le terrorisme est plus craint que les fantômes ou le diable. Phénomène très complexe, le terrorisme est difficile à discerner. Il a de multiples facettes. "Il s'agit, selon Albert Legaut, d'une violence préméditée et délibérée, dirigée contre des cibles symboliques et dont les objectifs recherchés sont à caractère politique". Devons-nous nous cramponner qu'à cette seule définition ? De quelque autre façon qu'il faille le présenter, le terrorisme, par son étendue et sa diversité (terrorisme autonomiste, terrorisme subversif, terrorisme d’Etat, terrorisme religieux ...), est aussi considéré comme un objet social et philosophique. D’où toute l’ampleur et les enjeux qui s’attachent à cette folie meurtrière, aujourd'hui, taillée à la mesure de mouvements extrêmement radicaux.

Le terrorisme à travers les âges

D’un texte à l’autre, on découvre que l´archéologie du terrorisme s'étale sur plusieurs siècles. Emprunterons-nous la locomotive de l’histoire pour se rendre chez Hébreux et se remémorer de Judith qui égorgea le général Holophème ; ensuite faisons escale chez les Grecs pour se souvenir de l'assassinat d'Hipparque, le tyran d'Athènes par Armodius et Arustogiston ; chez les Romains, Brutus n’avait-il pas assassiné César ! Au Moyen Orient, il est fait mention de la tuerie de plusieurs souverains par les Hachichins, sous la conduite du "Vieux de la Montagne". Au XIXe siècle, il y a eu l'assassinat de l’écrivain Kotzebue, agent tsariste prés le gouvernement autrichien par l'étudiant Karl Ludwig Sand. Après la Révolution de 1789, c’est à la France de connaitre, à son tour, une flambée de terreurs avec l'explosion d’une voiture à (chevaux) au passage du carrosse de Bonaparte alors premier Consul, faisant de nombreuses victimes. Un attentat similaire, perpétré par Orsoni, visera Napoléon III avec les mêmes dommages. A la fin de la campagne d'Egypte, le Général Kléber sera assassiné, le 14 juin 1800. D´autres attentats ont été commis dans le monde : contre l’Impératrice d’Autriche, le roi Humbert d’Italie, le président des États-Unis, McKinley, contre le roi Edouard VII à Bruxelles ; en 1887, des bombes éclatèrent à Chicago, puis a Barcelone, en 1894, dans un théâtre. Quelle vertigineuse ascension du terrorisme on pourrait tracer avec les "exploits" de Ravachol ou la bande à Jules Bonnot, l’I.R.A. provisoire, l’E.T.A. basque, le Mouvement arménien, la fraction "Armée rouge", le groupe "Baader-Meinhof", le GIA algérien, le groupe Ali Fouad Saleh etc. Quoiqu’ancien, ce terrorisme que l'on croyait refroidi, resurgit inéluctablement durant la décennie 1970-1980, sous un slogan révolutionnaire : "le pouvoir est au bout du fusil". Mais en 1978, les nuages des illusions terroristes vont se déchirer avec l’enlèvement et l’assassinat d'Aldo Moro, président Démocratie Chrétienne, après 55 jours de détention. Ce psychodrame national rendit célèbres les "Brigades rouges", une organisation armée en Italie. Et voilà que, le 11 septembre 2001, les attentats du World Trade Center vont bouleverser le spectre géostratégique mondial. Revendiqués par Al-Qaïda, ces attentats, perpètres avec une extrême sophistication conceptuelle, eurent un gigantesque écho médiatique. Aujourd'hui, avec cette nouvelle ère signée Organisation islamique (Daesh) qui, pour les uns, s’affirme comme une foi triomphante d’une liberté et, pour les autres, comme une délibération politique, c’est la doctrine du terrorisme qui s’est métamorphosée dans une remarquable continuité.

Terroristes : entre raison et folie

Que certains qualifient le terrorisme contemporain de mer houleuse, en pleine ébullition, impossible à calmer, puisque déversant quotidiennement le ressac de ses vagues aux quatre coins du globe, ils ont raison. Mais, faute de n’avoir certainement pas lu Edgar Morin qui, pourtant, avait prévu que "le dilemme cornélien auquel l’homme du prochain siècle serait confronté à une incohérence la plus totale ", ces âmes tranquilles et lucides ne pouvaient croire à un désastre planétaire en ce XXIe siècle. Nous y voilà. Au fait, que ressent l’homme dans cette jouissance de tuer, de s'attaquer à des villages et d'en massacrer ses occupants, de poser des bombes dans les cafés, gares et synagogues, de cibler des institutions à travers des attentats-suicides, dépassant parfois même l’imaginaire ? Pourquoi devient-on terroriste ? Le substrat sociologique et psychologique sur lequel reposerait ce "mal du siècle" peut se justifier par plusieurs facteurs : le désespoir et la frustration liés à une série de tempêtes dont les résonnances sont à caractères politiques, économiques et sociales, soutiennent généralement les organisations terroristes. A considérer que le terroriste se vit comme une victime, – revendique-t-il toujours un idéal, un but à atteindre – cette crise infernale de violence peut-elle éternellement opérer au nom d'une stratégie d'autodéfense, elle-même synonyme de destruction de l’humanité ? En progression constante, le terrorisme est une bêtise humaine, une sorte de jeu d’enfant. Rien n’indique donc que ces actes de violence volontaire vont s'arrêter : les terroristes sont devenus de plus en plus meurtriers. Les terroristes ne regardent pas la religion ni la nationalité. "Tuez-en un, dix, cent, - comme des cochons ! - et vous en effrayez cent, mille, toute une région, le monde". La face affreuse de ce comportement amoral est d'humilier l'adversaire même mort, de le frapper dans sa foi et dans sa dignité d’humain. Comme si c'était le retour vers le chaos originel avec de nouvelles impulsions : égorgements et décapitations d’otages en mode vidéo.

Terrorisme fanatique

Aujourd’hui, il est manifeste que nos pays sont devenus le théâtre de ces "fêtes sanguinaires". Nous sommes en un temps hagard, un temps broyeur qui est entrain de décimer nos populations. En effet, ce terrorisme suicidaire, jadis connu des Chiites et les Tigres Tamoul au XIXe, est remis au goût du jour en Afrique par des "kamikazes" ou "jihadis" recrutés, le plus souvent, dans les milieux malaisés, qu’ils soient jeunes et femmes. Une fine lecture du djihadisme moderne  montre à quel point les terroristes exercent toute leur puissance en Afrique, au nom d’un certain fanatisme religieux. Ce qui confère à Bokko Haram, au Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest, à Al-Qaida au Maghreb islamique, au groupe de Moktar Belmoktar, à Al-Mourabitoune  de nouveaux pouvoirs. Tout près de chez nous, au Nigéria, Mali, Niger, Cameroun et récemment au Burkina Faso, la réalité est froide comme dans une tombe. L’assassinat et l’intimidation physique de l’ennemi comme une forme de lutte politique ont radicalement faussé le jeu, parce pliés à la pensée d’un islamisme radical (?). Qui sait quand viendra le "printemps prochain" et comment en sera-t-il, où serions-nous à cet instant ? Sous la pression des évènements, c’est toute l’Humanité qui est interpelée en ce XXIe siècle, notre intelligence individuelle et collective aussi. Cela suppose une la rencontre de toutes les cultures et la prise en charge de toutes les interrogations. Autrement dit, la volonté d’insertion des plus faibles, des exclus et des frustrés. Ce n’est qu’à partir de ces nouvelles solidarités tant chantées et qui semblent, jusqu'ici, s’enfermer malheureusement dans le repli stérile de l’homme, que l’Humanité pourrait véritablement contrer les menaces grandissantes des terroristes.


Ouvrages consultés
Bindé, Jérôme.- Les Clés du XXIe siècle.- Paris, 2000
Daguzan, Jean-François.- Terrorisme : abrégé d'une violence qui dure.-  Paris, 2006
Encyclopaedia Universalis, Vol. 23, pp 490-496, 2008
Legault, Albert.- La fin du siècle militaire ?- Ottawa, 1995

Morin, Edgar.- Pour sortir du XXe siècle.- Paris, 1981
 
 


 
 


 
 


 
 


 
 


 
 


 
 


 
 




Par Gallo Thiam, BU-Ucad

Mardi 2 Février 2016 - 16:13


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