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RDC: bilans contrastés après la journée de mobilisation de l'opposition

Après la grande journée de mobilisation de l'opposition, l'heure est aux bilans. Pour la Dynamique de l’opposition, qui organisait cette manifestation, une véritable marée humaine de 200 000 personnes a défilé. Du côté de la police, on parle d'à peine 2 000 manifestants. En tout cas, la ville a tourné au ralenti une bonne partie de la journée, circulation timide et magasins fermés. La preuve d'un soutien tacite, selon l'opposition. La peur des troubles occasionnés, rétorque la majorité. La marche de Kinshasa était l'une des rares autorisées, même si le régime d'autorisation préalable n'existe plus en RDC. Les autorités avaient révisé le tracé jusqu'à la dernière minute, l'éloignant un peu plus du centre-ville et de tout lieu symbolique.



RDC: bilans contrastés après la journée de mobilisation de l'opposition
Pour l'opposition congolaise, la journée de mobilisation du jeudi 26 mai contre la décision de la Cour constitutionnelle, rendue le 11 mai dernier, d'autoriser le président Joseph Kabila à rester au pouvoir en cas de glissement du calendrier électoral et pour la tenue du scrutin dans les délais constitutionnels est une réussite. Selon les organisateurs, près de 200 000 manifestants ont marché à Kinshasa.

Pour Martin Fayulu, président de l'Ecide, le message adressé au chef de l'Etat congolais est très clair. « Nous félicitons ce peuple congolais qui a compris que la peur n’est plus de ce monde, que M. Kabila, comme tout Congolais, doit respecter la Constitution, que la Cour constitutionnelle ne peut pas venir semer la confusion, que nos concitoyens qui sont à Beni sont des Congolais à part entière, que ce ne sont pas des mouches et qu'on ne peut pas les tuer comme on l’entend. M. Kabila, c’est fini, il doit partir et le peuple l’a démontré ! Vous avez vu, et ce n’est qu’un début, a-t-il insisté. Et nous disons à la commission électorale de convoquer l’élection présidentielle au plus tard le 19 septembre, sinon nous allons commencer l’opération "Kabila dégage" ! »

Cent fois moins de manifestants selon la police

Du côté des autorités, on tire un tout autre bilan de cette mobilisation. La police évoque à peine 2 000 manifestants. Pour Emmanuel Ramazani Shadari, président du groupe parlementaire du parti présidentiel PPRD à l'Assemblée nationale, cette journée est un échec pour l'opposition. « C’est un échec cuisant. La ville de Kinshasa est peuplée de 12 à 14 millions d’habitants. La marche de l’opposition, tous les partis confondus, ils n’ont pas fait 2 000 personnes. C’était un non-événement », affirme-t-il.
A noter que l'UDPS a participé massivement à la marche de l'opposition à Kinshasa, a indiqué son service de communication. Seule la jeunesse de l'UDPS avait officiellement appelé à manifester au côté des jeunesses de l'UNC et du MLC. Mais dans cette mise au point, le parti d'Etienne Tshisekedi précise que cette mobilisation était conforme à la volonté de son président.

Incidents, à qui la faute ?

Mais les deux parties ne s’opposent pas que sur les chiffres. La manifestation de Kinshasa s’est terminée par des échauffourées, des gaz lacrymogènes et des jets de pierre. Qui est à l’origine de ces incidents ?
Pour le porte-parole de la police, ce sont les manifestants qui n’ont pas respecté le tracé imposé par le gouverneur de la ville. « Les colonnes se sont scindées : une petite a respecté l’itinéraire, une grande colonne s’est entêtée, explique le colonel Mwanamputu, porte-parole de la police. Malgré ça, nous avions négocié qu’ils s’arrêtent face à la maison Schengen. Malheureusement, quand ils sont arrivés là-bas, ils ont forcé le dispositif de la police pour atteindre coûte que coûte l’hôtel du gouvernement. Nous avons dit : pas question. Alors ils ont commencé à jeter des pierres et donc lorsque nous avons vu que nous étions caillassés, on s’est dit que nous n’étions plus en face de manifestants pacifiques, mais face à des émeutiers, donc on les a dispersés à coup de gaz lacrymogènes. »

Tirs à balles réelles ?

De son côté, Me Albert-Fabrice Puela, le modérateur de la Dynamique de l’opposition, qualifie ces accusations de « très mauvaise foi ». Il affirme de plus que la police a tiré à balles réelles, ce qu'elle dément, évoquant de simples tirs de dissuasion à balles à blanc. L'opposition, elle, dénonce le fait que trois de ses leaders ont été blessés, dont deux femmes, la secrétaire générale du MLC et l'ancienne modératrice de la Dynamique de l'opposition.

Une nouvelle marche doit avoir lieu ce vendredi 27 mai à Kinshasa. Il s'agit cette fois d'une marche pour protester contre le manque d'électricité. Le droit à l'électricité en RDC est garanti par l’article 48 de la Constitution, rappellent les organisateurs, parmi lesquels figure Clement Kanku, député de l'opposition. Une marche qui n'a pas reçu d'objection des autorités provinciales.

Au moins un mort à Goma

Si à Kinshasa le rassemblement de l'opposition était autorisé, plusieurs marches ont été durement réprimées dans le reste du pays, où les mobilisations étaient interdites. La journée a donc été marquée par des accrochages parfois violents dans plusieurs villes de province.
José Maria Aranaz, chef du Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l'homme, faisait état ce jeudi 26 mai au soir de la mort d'un manifestant et d'un membre de la police à Goma, dans l'est du pays. Une information démentie par les autorités. C’est en tout cas à Goma que la répression a été la plus dure. Les forces de l'ordre ont utilisé des gaz lacrymogènes puis ont tiré à balles réelles sur la foule, selon Human Rights Watch, qui dénonce un usage excessif de la force. Selon l’ONG, un civil a été tué, six autres blessés, dont des enfants et une femme de 80 ans.

« Les forces de sécurité ont utilisé non seulement des gaz lacrymogènes, mais aussi des balles réelles, assure Ida Sawyer, chercheuse senior à Human Rights Watch sur la RDC. Jusque-là, nous avons confirmé qu’il y avait au moins un civil tué par balles à Goma et six autres civils blessés, y compris une fille de six ans, un garçon de douze ans et une femme de 80 ans. Ici, à Goma, il y a eu une dizaine de personnes arrêtées et nous appelons les autorités congolaises à assurer que les responsables soient traduits en justice. »

Des violences sont également à déplorer à Butembo, dans la province du Nord-Kivu. Un jeune étudiant y a été tué, heurté par un camion alors que la police dispersait la foule.
Aucun incident par contre à Uvira, Bukavu et Bunia où les marches se sont déroulées dans le calme, tandis qu'à Lubumbashi, la police a quadrillé la ville toute la journée pour empêcher les rassemblements. Selon un membre de la société civile locale, deux journalistes ont été arrêtés alors qu'ils filmaient les forces de l'ordre.
 

rfi.fr

Vendredi 27 Mai 2016 - 07:58


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