CAN 2025: groupe discipliné, Mbeumo libéré, Pagou prépare le Cameroun pour la Côte d'Ivoire

Le Cameroun qui était à la recherche de repères avant le début de cette CAN en a trouvé quelques-uns lors de la victoire contre le Gabon. Encore trop peu pour s'avancer avec assurance face à la Côte d'Ivoire. Mais assez pour distinguer ce que David Pagou essaye de construire, entre discipline et liberté.



« Je suis un enfant de militaire, donc on va essayer de restaurer la discipline », avait lancé David Pagou, peu après sa nomination surprise à la tête de l'équipe du Cameroun début décembre. Dans l'ombre de Samuel Eto'o, l'homme qui est passé par les équipes militaires du Cameroun semblait alors avoir été nommé pour couper les têtes qui dépassent - ou qui ne plaisent pas à Eto'o - et partir à la CAN comme on part au combat. Sans forcément afficher de la continuité tactique ou un plan de jeu clair. Mais les Camerounais ont déjà remporté une CAN au courage en 2017, alors pourquoi pas deux fois ?
 
Certains sélectionneurs, lorsqu'ils sont nommés avec l'idée de rétablir l'ordre, se prennent au jeu de la chasse aux stars. Avec l'idée d'abolir d'éventuels passe-droits en sélection pour les grands noms. Le genre de situation qui aboutit souvent à des tensions, à l'image de ce qui avait pu exister, par exemple, entre Hossam Hassan et Mohamed Salah.
 
« La CAN est l'un des meilleurs tournois du monde. Mo Salah écoute les personnes qui choisissent quel est le bon tournoi pour lui. Une légende égyptienne est choisie en fonction du nombre de titres remportés pour le pays, pas pour son club. (...) Si un patron de club dit à Ronaldo de ne pas tout donner pour le Portugal, Cristiano quittera ce club. Lionel Messi ne mettra jamais les intérêts des autres avant l'Argentine », avait lancé Hassan, publiquement, à l'encontre de l'attaquant de Liverpool. Sous-entendant que ce dernier ne s'était pas assez investi pour le maillot des Pharaons sur la CAN 2023.
 
Une libertée encadrée
David Pagou, lui, affiche une méthode un peu plus nuancée. Des cadres ont été dégagés sans ménagement ni explications. Mais d'autres ont survécu. Ceux-là ne subissent pas, pour le moment, la chanson habituelle propre aux techniciens qui débarquent sur un banc avec l'obsession de l'ordre et de la discipline. Celui de briser les statuts. Un homme comme Bryan Mbeumo bénéficie évidemment d'un statut à part chez les Lions indomptables, en tant qu'attaquant vedette de Manchester United et joueur africain le plus cher de l'histoire. Et ce dernier aura beau répéter que l'objectif demeure de « travailler ensemble », « ne jamais rien lâcher », il demeurera un joueur à part.
 
Et Pagou, obsédé de l'ordre quand il s'agit de gérer la tanière, ne cache pas son penchant à laisser les garçons pétris de talents s'exprimer pleinement. « Vous n’allez pas me demander de circonscrire le travail de Mbeumo sur le terrain, sourit l'entraîneur. Je sais qu'il aime être libre, j'ai confiance en lui. On sait que quand Bryan est libre, il peut nous faire des merveilles. Il peut se déployer à gauche, à droite, dans l'axe, revenir, défendre... »
 
La liberté dans un cadre, un désordre organisé, appelez ça comme vous voulez, mais voilà l'équilibre que Pagou recherche. Pas facile à trouver quand on a eu si peu de temps. Et pour ce que ça vaut, ses hommes semblent adhérer au discours et à la méthode. Mbeumo qui lance un regard complice en conférence de presse à son sélectionneur en évoquant la vie du groupe, des joueurs qui arrivent sur le terrain d'entraînement en chantant et en dansant, le vestiaire reste un secret mais certains signes ne trompent pas.
 
Des détails qui ont leur importance
Quiconque a fréquenté un vestiaire de football sait que les footeux aiment choisir leur numéro de maillot. Ici encore, Pagou a laissé chacun faire à sa guise. De Mbeumo qui a choisi le 10, qui pèse lourd en sélection camrounaise, pour incarner son rôle de leader technique, à Carlos Baleba qui arbore le numéro 24 en hommage à sa mère récemment décédée. Des gestes anondins qu'un groupe sait apprécier. Surtout au sein d'un groupe très jeune, avec qui il faut faire connaissance très vite.
 
« Quand je parle de discipline, c'est dans la tanière, a résumé Pagou. Quand je disais que le football n'aime pas l'indiscipline, c'est juste qu'il faut être organisé. Il faut se fixer les règles qu'on doit respecter et que tout le monde regarde dans la même direction. Mais c'est différent de la discipline du jeu. » Il en faudra tout de même un peu contre la Côte d'Ivoire dimanche, pour la deuxième journée de cette phase de groupe. Car les Éléphants opposeront une résistance autrement plus solide qu'un Gabon qui était passé à côté de son match.

RFI

Dimanche 28 Décembre 2025 12:05


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