Couverture campagne électorale : dans les confessions intimes des reporters (reportage)

La campagne électorale réduite à 12 jours a été un défi pour les journalistes surtout en cette période de ramadan. Sans oublier la forte canicule, la pression des rédactions et les conditions d’hébergements qui ont littéralement mis les soldats de l’information à rude épreuve.



Il est 17 heures au quai de pêche Guet Ndar (quartier des pêcheurs) de Saint-Louis. À quelques heures avant la rupture du jeûne. La canicule de la journée cède la place à un climat beaucoup plus frais. À quelques mètres de la plage, sous le bruit des vagues, se regroupent de jeunes journalistes qui discutent du programme du jour du candidat Khalifa Sall.
 
Fatoumata Zahra Diallo, journaliste au quotidien Enquête « on s'adapte difficilement comme tout le monde avec la faim, la soif, la chaleur accablante. Les conditions de travail, j'avoue que ce n'est pas facile. Nous sommes au mois de ramadan, avec en plus la chaleur, ce n'est pas du tout pas facile. Les bruits, la sonorisation, les gens qui parlent, par-ci, par-là. Les conditions ne sont pas adéquates. Ça joue sur le rythme et la qualité du travail », confie-t-elle.
 
La vingtaine bien sonnée, Fatoumata Zahra Diallo, précise que c’est la première fois qu’elle couvre une campagne présidentielle. « Quand mon supérieur m'a demandé est ce que tu vas couvrir la campagne, je lui ai dit oui. Comme c'est une première, cela va me servir d'expérience. Je ne suis jamais sorti de chez moi pendant une semaine, mais cette couverture va me permettre de découvrir les autres régions et connaître les réalités qu'elles vivent », dit-elle.
 

Fourré dans un pantalon blue-jean, sac au dos, cette jeune fille avec ses ‘’dread locks’’ à travers son sourire large laisse apparaître ses lunettes de soleil. Aïssatou Goudiaby est une journaliste à l'Observateur. Travailleuse, déterminée, et coriace, ne dira pas le contraire. « J'en suis là à ma première couverture donc c'est ma première campagne électorale et je suis le candidat Khalifa Sall dans toutes ses caravanes à l'intérieur du pays. En tant que jeunes reporters, nous avons eu à acquérir une expérience qui a été importante. Personnellement, je n’ai jamais fait en si peu de temps le tour des régions que nous avons fait. Et j'ai appris à être résiliente. Ça m'a appris également à travailler dans des conditions clairement difficiles. On a quitté Dakar, on n'est venu dans les régions avec le ramadan, la chaleur et la pression au bureau. On a été obligé de travailler en mode fast track pour s'en sortir. Je pense que malgré le fait que ça été très difficile, on a gagné en expérience, en maturité, je pense que c'est une bonne chose », explique-t-elle.
 
Les minutes passent, pour ne pas céder au coup de la fatigue, certains recourent à la musique émise par leur téléphone portable, tandis que d’autres plus au diapason, laissent échapper de leur appareil une symphonie à caractère religieux, ramadan oblige.
 
‘’Entre les journalistes, c’est la solidaire’’ ajoute Aïcha comme l’appellent ses amis. « Les journalistes  du Sénégal sont solidaires. Ça se voit au moment de la rupture. Au final, la campagne a été exceptionnelle. L'hébergement n'a pas été comme on le pensait. On a été obligé de dormir à quatre voir 5 par chambre. Ça nous a permis d'être plus solidaires et de tisser des liens, de mieux nous connaître et d'avoir une certaine fraternité ».
 
 

Vêtue de noir comme les nomades du désert, âgé de 24 ans, Aïssatou Tall, journaliste du quotidien Source-A ne cache pas ses mots. « Oui, j'en suis à ma première expérience. Elle a été exceptionnelle. Les conditions étaient difficiles. Au début, j'appréhendais par rapport au vu d'ensemble. Mais ça, c'est bien passé. C'est difficile, il faut le dire avec la pression au bureau, les conditions de travail, mais on a géré », explique-t-elle.
 
 

La quarantaine bien sonnée, le chapeau bien vissé sur la tête, des lunettes de soleil bien portées, Ousmane Dicko est journaliste à Seneweb. Ce n’est pas sa première campagne. « Je ne suis pas à ma première couverture de campagne. Je commence à devenir un doyen. J'ai couvert une partie de la campagne en 2012 et le jour du scrutin. En 2019, aussi, j'étais avec la coalition Idy 2019. Et cette année aussi en 2024, je couvre la coalition Khalifa président 2024. Donc j'ai couvert les deux dernières campagnes pleinement ».
 
Le regard vif, M. Dicko revient sur les contextes. « Je pense que les contextes ne sont pas les mêmes. Les gens étaient mieux préparés. Il y avait moins de candidats. Dans les caravanes des candidats, il y avait plus de journalistes. Mais cette année, les contextes ont changé. Il y a eu d'abord un report. Ensuite ça a coïncidé avec un ramadan. Dans certaines régions, c'est une période de forte chaleur. Les prises en charge aussi ne sont pas les meilleurs parce que les gens ne sont pas suffisamment préparés pour pouvoir aller en campagne, gérer l'hébergement. Heureusement, la campagne, cette année, ne va pas au-delà de 15 jours ».
 



Vendredi 22 Mars 2024 14:34


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