Dette du Sénégal : L’alerte rouge de la Bank of America face au refus d’Ousmane Sonko

L’étau se resserre dangereusement autour de la dette du Sénégal. Contredisant frontalement la ligne officielle du gouvernement, Bank of America (BofA) estime désormais qu'une restructuration est le scénario le plus plausible à l’horizon 2026. Cette alerte, lancée jeudi, a instantanément fait plonger les titres souverains à des niveaux inquiétants, mettant en lumière la fragilité d’un pays qui tente de naviguer sans le filet de sécurité du FMI.



La perspective d’une restructuration de la dette extérieure du Sénégal s’impose désormais avec une acuité grandissante, en dépit des déclarations fermes du Premier ministre. Le 8 novembre dernier, Ousmane Sonko, lors de son téra-meeting, a avancé qu’aucune restructuration de la dette ne sera acceptée. Ce jour-là, il a réfuté cette mesure préconisée par le Fonds monétaire international (FMI), la considérant comme une « humiliation ». « Nous préférons préserver notre dignité », a-t-il insisté.
 
Pourtant, la dernière note de Bank of America Global Research (BofA), publiée hier, jeudi, est sans appel. Selon la banque américaine, citée par Reuters, une restructuration de la dette extérieure devient « de plus en plus probable » à partir de l’année prochaine. Elle considère que le Sénégal ne pourra tenir que quelques temps sans avoir de prêt du FMI et que cela pourrait devenir intenable au deuxième semestre 2026. « Pour couvrir ses besoins de financement en 2026, le pays devrait lever 40% de plus qu’en 2025, ce qui ne nous semble pas crédible », a argumenté la banque.
 
En effet, notre pays n’a cessé d’être sur la pente depuis l’annonce d’une « dette cachée » par le Premier ministre le 26 septembre 2024, à l’occasion d’une conférence de presse. La note souveraine du pays a été baissée à plusieurs reprises par des agences de notation. D’ailleurs, les euro-obligations sénégalaises ont encore chuté en mi-journée de ce jeudi, accusant des pertes atteignant 2,25 cents sur certains titres. L’obligation en dollars venant à échéance en 2031 est maintenant cotée à 62,67 cents.
 
Par ailleurs, Bank of America Global Research a indiqué avoir envoyé un e-mail au ministre des Finances pour l'informer de la situation. Mais, Cheikh Diba les aurait fait languir ; il n’a pas instantanément répondu. « Nous considérons qu’un moratoire sur la dette extérieure et des négociations de restructuration deviennent de plus en plus probables à l’approche du second semestre 2026. Compte tenu de la résilience du marché local, un moratoire sur la dette extérieure suivi de négociations de restructuration apparaît comme le scénario le plus plausible vers la fin de 2026. », a écrit la banque.
 
L’autre alerte formulée par la BofA est l’usage plus ou moins abusif des « total return swaps ». À l’en croire, le Gouvernement en aurait contracté cette année entre 750 millions et 1 milliard de dollars, soit environ 420 à 560 milliards de francs CFA. Ces opérations sont adossées à un collatéral constitué par de la dette intérieure, à hauteur de 1,3 à 1,5 fois du montant emprunté. Ce qui signifie qu’un volume important d’actifs nationaux sert de garantie.
 
Ces instruments sont susceptibles de contenir des clauses de déclenchement - « trigger clauses »-, qui rendent le remboursement obligatoire en cas de certains chocs. À titre d’exemple : une dégradation de la note souveraine.
 
Si ces clauses venaient à être activées, prévient la BofA, cela exercerait une pression sévère sur les finances publiques et pourrait accélérer un scénario de restructuration de la dette.

Penda THIAM

Vendredi 5 Décembre 2025 04:34


Dans la même rubrique :