Emploi des jeunes: de Senghor à Macky, décryptage d’un échec de tous les programmes et politiques actionnés

Malgré les différents programmes mis en place par Senghor, Macky Sall, Abdou Diouf et Abdoulaye Wade, pour l’emploi des jeunes, la question du chômage reste toujours non-résolue. Les politiques d'emplois et d'insertion des jeunes n'ont pas pour autant endiguer le chômage qui persiste toujours au Sénégal. Le manque d'emploi fait certainement partie des raisons qui ont poussé certains jeunes à sortir au début du mois de mars pour montrer leur frustration. Diagnostic sur 48 ans de politique d'emploi des jeunes.



En 1973, le président Léopold Sédar Senghor avait défini un programme à long terme pour la politique d'emploi. Ce programme s’articulait autour de trois points essentiels. Les politiques d'emploi de 1973 à 1981, les programmes contre le sous-emploi, et les programmes pour les jeunes.
 
Le PUCE et la DIRE de Diouf
En 1981, le président Abdou Diouf avait lancé les Programmes d'urgence de création d'emploi (Puce). Le Puce permettait aux jeunes diplômés de l'enseignement supérieur de s'insérer dans le secteur productif. C'est ainsi que les programmes dits des "maitrisards" ont été lancés pour permettre aux jeunes titulaires d'une maîtrise en économie ou en droit d'être des entrepreneurs sur le secteur du transport, celui de la pêche et de la boulangerie. Il y avait aussi un programme dénommé "les kiosques à pain" et les "magasins à témoin".
 
 De plus, le Programme d'urgence de création d'emploi (Puce) n'a pas suffi, en 1988, le Président Diouf avait créé un Fonds national de l’emploi et une Délégation à l’Insertion et à la Réinsertion (DIRE), pour insérer les diplômés de l’enseignement supérieur et les travailleurs émigrés sénégalais de retour dans le pays.
 
Échec des Programmes d'urgence de création d'emploi
 
Les projets et les programmes de promotion de l'emploi ont commencé à être systématisés à partir de 1973. Selon le sociologue El Hadj Séga Guèye, dans son livre, La précarité du travail au Sénégal : L'expérience des employés de la Sococim et des ICS, L'Harmattan Paris, ces programmes étaient conçus pour atténuer le chômage. "Dans un contexte où la société sénégalaise était entrée dans une phase très critique marquée par des difficultés majeures en matière de création d'emplois, particulièrement chez les jeunes diplômés. Il fallait ainsi initier des programmes de création d'emplois pour éviter le chômage des jeunes".
 
Le Programme d'urgence de création d'emploi (Puce) et la Délégation à l’Insertion et à la Réinsertion (DIRE) n'ont pas eu l'effet escompté. Le sociologue Ségua Guèye note que ce fut un échec pour le régime socialiste : "Ces deux opérations se sont soldées par un échec du fait d'abord que cette politique gouvernementale qui visait à donner une importance au diplôme les avait finalement dévalorisés".
 
Le Président Abdoulaye Wade et la création des agences pour lutter contre le chômage
 
Arrivé au pouvoir en 2000, le Président Abdoulaye Wade avait concrétisé ces promesses de campagne en mettant en œuvre une politique soutenue pour régler la question du chômage des jeunes. Il a mis sur pied des agences et programmes pour l'emploi des jeunes.

L'Agence nationale pour l'emploi des jeunes (Anej), d'autres structures comme l'Office pour l'emploi des jeunes de la banlieue (Ofejban), le Fonds national d'insertion des jeunes (Fnij) et le Fonds national de promotion des jeunes ( Fnpj).
 
Ces différents programmes n'ont pas pu atténuer le chômage des jeunes. Selon les études de l'Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD), Rapport intitulé situation économique et sociale au Sénégal en 2011, l'étude portant sur le secteur de l'emploi au Sénégal en 2011, indiquait que le taux de chômage était estimé au niveau national à 11,2% alors qu'il était de l'ordre de 10,0% en 2005.

Le taux d'activité en 2011 était de 48,8% alors qu'il était de 50,7% en 2005. Cette situation laisse inférer que le secteur de l'emploi au Sénégal a connu de réelles difficultés durant le régime de Wade, malgré la volonté affichée par les autorités publiques de créer des agences pour l’emploi des jeunes.
 
Macky Sall, ses promesses, ses programmes, son million d'emplois et la frustration des jeunes
 
Le Président Macky Sall estime avoir créé 493.000 emplois entre 2012 et 2019 et les différents programmes qu'il a initié tels que la Délégation  général à l'entreprenariat rapide des Femmes et des Jeunes (DER/FJ), l'Agence national d'Insertion et de Développement agricole (ANIDA), Programme national des Domaines agricoles communautaires (PRODAC), l'Agence nationale pour la Promotion de l'Emploi des jeunes (ANPEJ), l'Office national de Formation professionnelle (ONFP), l'Organisation féminines et de l'entreprenariat féminin, le Fonds de Financement de la Formation professionnelle et technique (3 FPT), Cellule d'Appui de la Promotion de l'Emploi des Jeunes, le Programme Sénégalais pour l'entreprenariat des Jeunes (PSEJ).
 
Macky Sall avait promis la création d'un million d'emplois lors de la campagne électorale de la présidentielle de 2019 durant son quinquennat. Cependant, le chômage reste toujours endémique au Sénégal. Et fait partie de la pile de frustrations refoulées au début du mois de mars par les jeunes, qui avaient pris pour prétexte l’arrestation du leader de l’opposition Ousmane Sonko. 

 
 

Programme "Xëyu Ndaw gni"
 
Malgré toutes les agences et programmes déroulés par l’actuel régime, l’équation reste toujours non résolue.
Lors de son discours du 8 mars, le Président a annoncé en guise de réponse à la jeunesse, un programme d'urgence pour l'insertion socio-économique et l'emploi des jeunes de 450 milliards de FCFA sur la période 2021-2023. Lors du Conseil présidentiel sur l'emploi des jeunes du 22 avril 2021, le Chef de l'Etat a lancé un Programme intitulé "Xëyu Ndaw gni (emploi des jeunes)". Un programme qu'il veut pragmatique et tourné vers l'action.
 
Selon le Ministre de l'Economie, du Plan et de la Coopération, Amadou Hott, le programme "Xëyu Ndaw gni" va permettre de créer plus de 443.000 emplois et auto-emplois. Selon lui, entre 2010 et 2020, le Gouvernement a injecté plus de 450 milliards de FCFA dans les programmes de jeunesse. Mieux, des structures d'appui comme l'Anpej, le Prodac, la Der ont été mises en place pour accompagner les jeunes. Rien que la Der a impacté 105.000 bénéficiaires. "C'est important mais ce n'est pas suffisant", reconnaît M. Hott.
 
« Il faut faire un ciblage des personnes qui entreprennent », selon l’Economiste Abdou Kane
Lors de l'émission "Saytu" du vendredi 30 avril 2021 sur la RTS1 : Emploi et Insertion des Jeunes : Comment résoudre l'équation ? Pr Abou Kane, économiste, vice-Doyen de la Faseg estime que le financement des projets est bon mais ne suffit pas. Selon lui, "l'Agence nationale de la statistique et de la démographie doit renforcer les services régionaux en faisant des enquêtes spécifiques pour sortir les opportunités et les potentialités qui sont dans les régions. Il y a des études superficielles qui ont prouvé cela", a indiqué le Pr Abou Kane.
 
Il ajoute : "il faut des programmes spécifiques pour le secteur informel. Faire des ciblages sur les personnes qui ont commencé à entreprendre. Une personne qui entreprend est plus facile à aider que celle qui n'a pas encore commencé. Il faut les identifier, et mettre les moyens qu'il faut pour les accompagner", a-t-il fait savoir.

D'après l’économiste, si "l'Etat prend en compte les services régionaux à travers l'Agence nationale de la statistique et de la démographie et créer des centres de formation professionnelle et technique. Je pense que le chômage va atténuer".
 
« L’Heure est aux réalisations et non aux promesses », tonne le président du Conseil départemental de la jeunesse de Rufisque.
Le Conseil départemental de la jeunesse de Rufisque à travers son président salue le conseil Présidentiel organisé par le Président de la République pour lutter contre le chômage des jeunes. Selon Alassane Ba, Président du conseil départemental de la jeunesse de Rufisque. "Cela a été vraiment une grande rencontre entre le Président de la République et la jeunesse du Sénégal. La jeunesse a eu à donner des contributions positives pour essayer d'améliorer le niveau d'employabilité des jeunes. Le Président de la République a fait preuve d'une grande écoute, et de disponibilité. Nous pensons que ces programmes permettront le renforcement de l'entrepreneuriat et surtout de lutter contre le chômage", a dit M. Ba.

Concernant les emplois, le Conseil départemental de la jeunesse de Rufisque "attend de pied ferme la réalisation de ces promesses et nous disons aux structures dédiées à l'emploi de faire vite". Le conseil départemental de la jeunesse de Rufisque indique toutefois que "l'heure est aux réalisations et non aux promesses". Écoutez !

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Moussa Ndongo

Dimanche 2 Mai 2021 11:04


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