Global Solutions Summit 2025 à Berlin : Macky Sall plaide pour un multilatéralisme refondé et une coopération plus équitable



Lors du Global Solutions Summit 2025, tenu dans la capitale allemande à Berlin les 28 et 29 avril, l’ancien Président sénégalais Macky Sall est revenu sur le rôle de l’Afrique dans l’ordre international. Devant un auditoire composé de chercheurs, de décideurs politiques, de membres d’organisations internationales et de représentants de la société civile, il a appelé à une transformation profonde du système multilatéral afin d’y inclure pleinement le continent africain, souvent relégué aux marges de la gouvernance globale.
 
Dans son discours, Macky Sall a dressé un constat sans complaisance de l’état du monde. « Nous vivons un temps d’incertitudes, de conflits, de crises économiques, sociales et sécuritaires qui rendent le monde plus vulnérable et plus fragmenté », a-t-il déclaré. Pour lui, ces défis complexes et interconnectés exigent des réponses globales, coordonnées et solidaires. Or, selon lui, le multilatéralisme tel qu’il est pratiqué aujourd’hui « n’est pas toujours inclusif, équitable ni efficace ».
 
L’ancien chef de l’État sénégalais, qui a dirigé le pays de 2012 à 2024 et assuré la présidence de l’Union africaine en 2022, a estimé que la gouvernance mondiale actuelle reste dominée par une poignée d’acteurs qui peinent à reconnaître la voix et les intérêts du continent africain. « Nous ne pouvons pas bâtir un ordre international stable et durable en marginalisant un continent de 1,5 milliard d’habitants et de 54 États membres de l’ONU », a-t-il martelé.
 
Toutefois, Macky Sall a salué certaines évolutions récentes dans le sens d’une meilleure reconnaissance de l’Afrique sur la scène internationale. Il a notamment mentionné : « L’admission de l’Union africaine au G20 comme membre permanent, en septembre 2023, à l’initiative de l’Inde. La hausse de la quote-part de l’Afrique au sein du Fonds monétaire international (FMI), passée à 7,6 % contre 5,2 % auparavant. »
 
Cependant, il a rappelé que ces avancées demeurent essentiellement symboliques si elles ne s’accompagnent pas de changements structurels. « Il ne suffit pas de donner un siège à l’Afrique, encore faut-il que sa voix y soit entendue, respectée et prise en compte dans les décisions », a-t-il souligné.
 
Des règles économiques biaisées contre l’Afrique
 
Sur le plan économique, Macky Sall a dénoncé des mécanismes internationaux perçus comme injustes à l’égard des pays africains. Il a particulièrement ciblé les agences de notation financière, qu’il accuse d’appliquer des critères subjectifs et pénalisants. « Alors que les pays africains respectent globalement les critères de convergence budgétaire, ils continuent de payer leur argent plus cher sur les marchés internationaux. Cela est dû à une perception exagérée du risque africain, souvent fondée sur des stéréotypes plus que sur des données objectives », a-t-il affirmé.
 
Il a également évoqué l’inadéquation du système de financement du développement, appelant à une réforme profonde des institutions de Bretton Woods. « Nous devons repenser l’architecture financière internationale pour la rendre plus inclusive et plus équitable », a-t-il insisté.
 
Quatre priorités africaines pour une réforme globale
 
Dans la seconde partie de son allocution, l’ex-président a structuré son intervention autour de quatre enjeux qu’il estime cruciaux pour l’Afrique : la sécurité, l’économie, l’énergie et la gouvernance mondiale.Revenant sur la situation au Sahel, Macky Sall a dénoncé l’inefficacité des missions de maintien de la paix des Nations unies face à la menace terroriste. « Les mandats actuels des Casques bleus ne permettent pas de combattre efficacement le terrorisme. C’est un paradoxe dangereux dans une région qui fait face à des groupes armés bien organisés et lourdement armés », a-t-il dit. Il a proposé de doter ces missions d’un mandat offensif, tout en renforçant le soutien logistique, financier et en renseignement aux armées nationales africaines.
 

Macky Sall a plaidé aussi pour une réforme des règles de commerce international, dénonçant les barrières non tarifaires et les subventions agricoles des pays développés qui faussent la concurrence. Il a aussi défendu un accès équitable aux marchés pour les produits africains transformés : « L’Afrique ne doit pas rester cantonnée au rôle de fournisseur de matières premières. Nous devons industrialiser, transformer localement et exporter à valeur ajoutée. »

L’ancien président a dénoncé les décisions prises à la COP26 de Glasgow, notamment l’interdiction de financer les projets liés au gaz naturel dans les pays du Sud. « C’est une décision injuste. Comment demander à un continent qui ne contribue qu’à 4 % des émissions mondiales de renoncer à exploiter ses ressources ? » a-t-il questionné. Il a rappelé que 600 millions d’Africains n’ont toujours pas accès à l’électricité et que le gaz reste une ressource de transition essentielle, moins polluante que le charbon ou le fioul.

Enfin, Macky Sall a réitéré son appel à une réforme en profondeur du Conseil de sécurité des Nations unies. Il a jugé « inacceptable » qu’aucun pays africain ne dispose d’un siège permanent alors que le continent représente près de 30 % des membres de l’ONU. « Le Conseil de sécurité reflète un ordre issu de la Seconde Guerre mondiale. Il ne peut plus incarner la réalité du XXIe siècle », a-t-il estimé.
 
Pour conclure, l’ancien Président sénégalais a appelé à « un sursaut collectif pour un nouvel humanisme international ». Il a rappelé que le destin du monde est de plus en plus interdépendant, et qu’aucun continent ne peut faire face seul aux défis planétaires. « Le multilatéralisme ne doit pas être un club de puissants. Il doit être un instrument de solidarité et de co-construction des solutions globales », a-t-il affirmé.


Mardi 6 Mai 2025 13:04


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