La transition s'installe en Egypte, la contestation s'attise au Proche-Orient





Le vent de contestation qui a eu raison d'Hosni Moubarak en Egypte soufflait plus que jamais au Proche-Orient, hier. Les manifestations les plus importantes ont eu lieu au Yémen, notamment dans la capitale, Sanaa, où des milliers d'étudiants et d'avocats ont appelé au départ du président, Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis trente-deux ans. Après avoir été empêchés par l'armée de s'emparer de la place Tahrir (« libération »), homonyme de celle du Caire, ils ont été attaqués à coups de bâton par des centaines de partisans du parti au pouvoir, le CPG.

En Iran, des milliers de personnes ont tenté hier de se rassembler en différents points de Téhéran, mais d'importantes forces de police les en empêchaient, selon des témoins. Des incidents ont éclaté. Une personne aurait été tuée par des tirs, plusieurs autres blessés. Ce rassemblement constituait la première manifestation significative de l'opposition depuis un an. A Bahreïn, malgré l'interdiction de leur rassemblement lancé sur Internet, des dizaines de personnes ont tenté de manifester, mais elles ont été dispersées par la police à coups de gaz lacrymogènes.

Parallèlement, la transition continuait sans trop d'accrocs hier au Caire, au lendemain de l'annonce de la dissolution du Parlement et de la suspension de la Constitution, de facto non respectée lors de l'éviction, vendredi, du président Hosni Moubarak. Une délégation de cybermilitants à l'origine du lancement de la révolte a été reçue par le Conseil militaire suprême. Il s'agissait de « comprendre leur point de vue et présenter le nôtre », a résumé Wael Ghonim, administrateur de Google en Egypte devenu une icône de la contestation après sa détention pendant douze jours. « L'armée a affirmé qu'elle n'aspirait pas à gouverner l'Egypte et que l'avenir du pays résidait dans un pouvoir civil », a-t-il précisé. Les militaires compteraient proposer d'ici à dix jours des amendements à la Constitution, qui verrouillait le jeu politique au profit du parti d'Hosni Moubarak et dont la suspension a été saluée par les opposants.

L'armée a appelé à un arrêt des manifestations et des grèves. Une cinquantaine seulement d'irréductibles étaient encore cantonnés hier place Tahrir pour réclamer la levée immédiate de l'état d'urgence. Mais des milliers d'employés sont en grève pour réclamer hausses de salaire et meilleures conditions de travail, notamment dans une cimenterie, des banques et des entreprises de textile. Parallèlement, l'armée a promis de poursuivre en justice toute personne accusée de corruption, « quel que soit leur poste actuel ou passé ». La chasse aux actifs des caciques déchus du régime Moubarak était d'ailleurs ouverte hier. Le ministère égyptien des Affaires étrangères a demandé aux pays européens de geler les avoirs d'Ahmed Nazif, qui dirigeait le gouvernement jusqu'à fin janvier, d'Ahmed Ezz, un magnat de l'acier et des anciens ministres de l'Intérieur, de l'information, du Tourisme et de l'Industrie. En revanche, la junte militaire n'a pas encore annoncé de demande de saisie ou d'enquête sur Hosni Moubarak ou sur ses deux fils.

Les Echos

Mardi 15 Février 2011 10:21


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