Le drame togolais présent dans tous les esprits

C’est parti ! Le premier coup de sifflet de la Coupe d’Afrique des Nations a été donné ce dimanche 10 janvier et la journée s’est achevée sur un festival de buts (4-4) lors du match qui a opposé le Mali à l’Angola, le pays hôte. Mais le drame qui a endeuillé la délégation du Togo, dont l’équipe nationale a finalement quitté Cabinda, est encore présent dans bien des esprits.



Avec le retrait de l’équipe nationale du Togo, c’est désormais une Coupe d’Afrique des Nations à 15. La délégation togolaise à la 27ème CAN a perdu deux hommes, l’entraîneur adjoint Amélité Abalo et le chargé de la communication du groupe, Stan Okloo. Les trois autres équipes du groupe B à Cabinda ont exprimé leur tristesse et leur solidarité aux Togolais.

Les «Eperviers» ont donc quitté Cabinda ce dimanche. Ils ont décollé pour Lomé à la mi-temps du match d’ouverture de la CAN 2010 opposant l’Angola au Mali à Luanda. Ils se sont pliés à la décision du pouvoir de retirer l'équipe nationale de la compétition. Dans la matinée, le capitaine de l’équipe, Emmanuel Adebayor avait réaffirmé la volonté des joueurs de rester à Cabinda et de participer à cette phase finale de la CAN. Ils en ont longuement parlé dans la nuit de samedi à dimanche. Mais pour défendre les couleurs de leur pays, encore faut-il avoir le soutien des autorités togolaises. Or, celles-ci ont décidé de retirer l’équipe nationale de la compétition continentale. Les coéquipiers d’Adebayor n’ont d’autre choix que de se plier à leur décision.

Mais il a fallu parlementer avant que le Togo ne se retire de la CAN. L’avion présidentiel togolais qui avait fait samedi le circuit Lomé – Pointe-Noire – Cabinda – Lomé, a ramené les joueurs au pays dimanche.

Le retour des «Eperviers» à Lomé

Il est 23h07, le DC-8 présidentiel se pose à l'aéroport de Lomé. Sur le tarmac, le Premier ministre et quelques membres du gouvernement. Les familles attendent...

Venus pour participer à la fête du football africain, les «Eperviers» ne pourront donc pas fouler la pelouse du nouveau stade de Cabinda construit pour la CAN. Ils devaient croiser le fer avec le Ghana ce lundi. Les «Blacks stars» pourront tranquillement assister à la rencontre qui oppose la Côte d’Ivoire au Burkina Faso.La mésaventure des Togolais a sapé un peu le moral des autres équipes. C’est ce qu’a dit l’entraîneur des Eléphants, juste avant de diriger l’entraînement à la veille de leur entrée en compétition face au Burkina Faso. «Je suis triste pour l’Afrique et je suis triste pour le football, parce que le grand perdant de cette situation c’est le football», dit Vahid Halilhodzic. «Je suis triste pour l’équipe togolaise qui quitte le championnat de la CAN. Notre décision de rester et de continuer de jouer, c’est la meilleure manière de répondre à tous les terrorismes. Mon équipe a été profondément touchée et bousculée avec cet évènement. Est-ce que cet évènement aura une influence sur notre jeu et sur notre performance ? Je ne sais pas ».

A la tête de l’une des équipes favorites, le sélectionneur ivoirien depuis vingt mois a déclaré se méfier de l’adversaire du jour, le Burkina Faso. Et ce n’est pas de la fausse modestie. Le match d’ouverture de la 27ème CAN en est la preuve : alors que le pays hôte de la CAN, l’Angola, menait 4 à 0 pendant 1 heure 20 minutes, le Mali a marqué les 4 buts de l’égalisation pendant les 10 dernières minutes.

Le pari médiatique de Luanda a échoué

Trois jours avant l’ouverture de la Coupe d’Afrique des Nations de football, ce dimanche 10 janvier en Angola, la compétition continentale la plus prestigieuse a eu une vitrine médiatique planétaire. Mais c'est une tragédie qui a fait la Une et non du sport et l’équipe nationale togolaise en a été la victime. En se rendant, par la route, de Pointe-Noire au sud du Congo-Brazzaville à Cabinda, le bus des «Eperviers» a essuyé des coups de feu, revendiqués par la rébellion de Front de libération de l’enclave de Cabinda (FLEC). Ce mouvement réclame l’indépendance de la province cabindaise. Il est actif depuis le départ des Portugais de l’Angola en 1975. Le FLEC réclamait une indépendance séparée du reste du pays.

Pour le mettre hors d’état de nuire, les autorités angolaises ont fait de Cabinda l’endroit où il y a la plus grande concentration militaire au monde. Sur une population estimée à 300.000, il y a 30.000 hommes en uniforme, c’est-à-dire un militaire pour dix habitants. Mais il faut sortir de la capitale, qui porte le même nom que la province, pour se rendre compte de cette présence militaire. Les uniformes sont moins nombreux d’ordinaire en ville. On en voit beaucoup plus actuellement, notamment à cause de l’attaque qui a frappé l’équipe togolaise.

Le gouvernement angolais avait parié sur la réussite de la CAN. Malgré les réticences exprimées par certains membres de la Confédération africaine de football, les autorités angolaises avaient imposé leur choix de Cabinda parmi les quatre villes qui accueillent la 27ème CAN. Avant même le début de la compétition, leur pari médiatique s’est transformé en désillusion. Luanda voulait se donner une image d’un pays totalement pacifié. Après tout, lors de la Coupe d’Afrique de handball il y a deux ans, des matchs se sont bien déroulés à Cabinda sans que la rébellion du FLEC ne vienne perturber la fête sportive, malgré ses menaces.

Ce que le pouvoir angolais a oublié en voulant transformer l’essai de 2008, c’est que le handball ne suscite pas le même engouement dans le monde. Et l’action d’éclat du FLEC, qui a frappé peut-être au hasard une équipe qualifiée pour la compétition, a braqué les projecteurs des grands médias sur Cabinda. Mais l’attaque du FLEC, qui a endeuillé l’équipe togolaise, ne signifie pas nécessairement une reprise de la guerre entre une armée super-équipée et les indépendantistes Cabindais.



RFI

Lundi 11 Janvier 2010 11:35


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