Mali : Diango Sissoko nommé Premier ministre

Le président malien par intérim Dioncounda Traoré a nommé, ce mardi 11 décembre au soir, Diango Sissoko au poste de Premier ministre, selon un décret lu par la télévision publique malienne ORTM. Diango Sissoko remplace Cheick Modibo Diarra. Cette annonce de Dioncounda Traoré survient après la démission forcée du Premier ministre, arrêté sur ordre du capitaine Sanogo, le chef des ex-putschistes.



Peu avant la nomination de Diango Sissoko, le président Dioncounda Traoré (photo) avait accepté la démission de Cheick Modibo Diarra. AFP PHOTO / HABIB KOUYATE
Peu avant la publication de ce décret, le président malien Dioncounda Traoré avait annoncé qu’il avait accepté la démission du Premier ministre Cheick Modibo Diarra et avait indiqué que le nouveau gouvernement serait connu « d’ici à la fin de la semaine ».

Le capitaine Amadou Haya Sanogo - chef des ex-putschistes maliens - a justifié, pour sa part, la démission forcée du Premier ministre Cheik Modibo Diarra, en le qualifiant, dans un entretien à la télévision publique malienne, de « point de blocage » qui n’avait « aucun égard pour le peuple ».

Capitaine Amadou Haya Sanogo, Chef des ex-putschistes maliens, "Il faut reconnaître que, de nos jours, rien ne marchait".

Le capitaine Sanogo a également assuré que l’ex-Premier ministre « va très bien ; est chez lui depuis hier soir » et qu’ il n’est « ni arrêté ni en résidence surveillée ». Le chef des ex-putschistes a par ailleurs démenti être « opposé » à l’envoi d’une force internationale dans le nord du Mali.

Ce nouveau coup de force des ex-putschistes survient alors que le gouvernement malien et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ont demandé au Conseil de sécurité de l’Onu d’autoriser rapidement le déploiement d’une force internationale d’environ 3 300 hommes afin de reconquérir le nord du Mali. La région est occupée, depuis huit mois, par des groupes armés islamistes, après un coup d’Etat militaire du 22 mars, à Bamako, qui a renversé le président Amadou Toumani Touré.

La France, « préoccupée par la situation à Bamako », a condamné « les circonstances » de la démission du Premier ministre et appelé le président Dioncounda Traoré à désigner « très rapidement » un nouveau gouvernement « qui soit représentatif et qui ait le plus large soutien de la population malienne », a déclaré le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Philippe Lalliot.

Et même si les ex-putschistes venaient à être hostiles à une intervention militaire étrangère au nord du Mali, celle-ci n’est pas du tout remise en cause, selon le porte-parole du Quai d'Orsay.

L’Union européenne a également condamné les « agissements » des militaires. Même condamnation de la part de la Cédéao qui a réclamé la mise en place d’un gouvernement « représentatif » et « inclusif ». De son côté, l’ONU a condamné l’arrestation du Premier ministre Diarra et a renouvelé ses menaces de « sanctions ciblées » contre les ex-putschistes.

Diango Sissoko « un homme d’expérience »


Diango Sissoko, âgé de 62 ans, était médiateur de la République depuis mai 2011. Docteur d’Etat en droit, il a notamment été secrétaire général à la présidence de la République, sous le régime de Moussa Traoré, renversé en 1991 après plus de 22 ans de pouvoir. Il a aussi occupé les mêmes fonctions de 2008 à 2011 sous la présidence d’Amadou Toumani Touré, déposé par des putschistes, en mars dernier.

Les dirigeants de la Copam - la coalition qui a soutenu le putsch du 22 mars - prennent acte de la démission de l’ancien Premier ministre et saluent l’arrivée de Diango Sissoko. Joint par RFI, Hamadoun Guindo, porte-parole de la Copam considère le nouveau Premier ministre comme étant un homme d’expérience et un bon connaisseur des dossiers maliens.

Du côté du FDR - front anti-putsch - les attentes sont maintenant tournées vers la formation du nouveau gouvernement.

Joint par RFI, Mamadou Ladji Cissé, porte-parole du Front du refus, espère que le futur gouvernement soit « un gouvernement inclusif et d’union nationale » qui pourrait ainsi faciliter l’agenda de la transition, à savoir « l’élaboration de la feuille de route, la concertation nationale et la mobilisation nationale pour la reconquête des régions occupées ».

Peu de regrets au Mali après le départ forcé de Cheick Modibo Diarra

Le Premier ministre nommé mi avril s'était retrouvé isolé au sein de la classe politique. Ses ambitions présidentielles lui ont aussi valu quelques solides inimitiés.

Cheick Modibo Diarra a dilapé en six mois son capital confiance. Voilà le constat sans appel que dressent aujourd'hui les acteurs politiques maliens. Les dirigeants de la Copam, -la coalition qui a soutenu le putsch du 22 mars-, ne mâchent pas leurs mots et estiment que le départ forcé du Premier ministre est un moindre mal.

Dans l'autre camp, le front anti putsch réclame au plus vite un nouveau Premier ministre consensuel, histoire de tourner la page et de fermer la parenthèse Diarra. Même tonalité au sein de la communauté internationale. Certes Paris a critiqué les circonstances de son départ mais appelle à la formation d'un gouvernement représentatif et consensuel. L'Union européenne ne dit pas autre chose.

Personne ne semble regretter un homme que beaucoup jugeait peu compétent à son poste. Modibo Diarra changeait trop souvent d'avis, entend aujourd'hui à Bamako, il manquait de savoir faire, assure un chef religieux. Un leader du Front du refus l'accuse même d'être à l'origine de tous les blocages qui ont empêché le Mali d'avancer ces derniers mois.

Mais surtout, les acteurs politiques pointent son ambition présidentielle. Car si la Cédéao avait demandé aux acteurs de la transition de s'exclure des futures élections, manifestement Cheick Modibo Diarra ne se sentait pas concerné. Il ne cachait plus son ambition, grince l'entourage du président Diocounda Traoré. C'est sans doute ce qui lui a valu la méfiance généralisée, conclu un diplomate de l'Union africaine.
Source: RFI

Charles Thialice SENGHOR

Mercredi 12 Décembre 2012 10:30


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