Procès Habré: dans les sombres coulisses de la «Documentation»

Les accusations succèdent aux accusations au procès d'Hissène Habré, à Dakar au Sénégal. Lundi, la cour a commencé à entendre Mahamat Hassan Abakar, le président de la commission d’enquête sur les crimes commis par le régime de l’ancien président tchadien. Une commission créée après la fuite de ce dernier. Et il a entamé la description d’un système répressif extrêmement dur qui gravitait autour de la Direction de la documentation et de la sécurité (DDS).



L'ancien président tchadien, Hissène Habré, au premier jour de son procès, le 20 juillet dernier. AFP PHOTO / SEYLLOU

Faute de bâtiments disponibles en 1990, la commission que dirigeait Mahamat Hassan Abakar s’est installée dans les locaux de la fameuse DDS. Un immeuble abandonné par les dirigeants de ceux que Mahamat Hassan Abakar appelle « la police politique ». Son équipe a ainsi pu mettre la main sur de nombreux papiers laissés sur place, des listes de personnes arrêtées, d’autres d’opposants exécutés. Le témoin a lu des extraits de ces documents officiels : « Je soussigné, régisseur de la Brigade d’intervention rapide, déclare que les 33 prisonniers sont décédés dans nos locaux dans la journée du 10 au 11 avril 1986 ».

Pour Mahamat Hassan Abakar, la responsabilité du prévenu dans la répression est claire : « La DDS a été conçue et planifiée par Hissène Habré pour soumettre et terroriser les populations. C’était sa chose à lui ». Le procureur fait confimer par le témoin qu'Hissène Habré supervisait quotidiennement cette structure et nommait lui-même les directeurs, mais aussi les chefs de services et jusqu'aux traducteurs de la DDS : « Habré n’a confiance en personne, même en ses plus proches collaborateurs. Ces services, c’est sa chose », insiste le témoin.

Habré impassible

 

Le président de la commission d’enquête cite ensuite l’un des anciens directeurs de cette structure, Saleh Younous qui a été entendu par la commission d’enquête : « Monsieur Younous a confirmé qu’il y avait des exécutions chaque nuit  et qu’elles étaient ordonnées par le président Habré ». D'après Mahamat Hassan Abakar, des fiches étaient en permanence adressées à l'ancien chef d'Etat, comme des comptes-rendus d'interrogatoire.

Au final, la commission estime que 40 000 personnes sont mortes entre 82 et 90. « C’est l’estimation la plus basse. Ce chiffre ne prend pas en compte les exactions commises en région », confie le témoin, qui assure que le système judiciaire n'avait aucun droit sur la DDS. Après les questions du procureur, Mahamat Hassan Abakar devra ensuite répondre aux questionnements des avocats commis d’office qui défendent Hissène Habré. Ce dernier, fidèle à sa stratégie, est resté impassible, caché derrière ses lunettes et son turban, face à ces déclarations à charge.


Rfi

Mercredi 16 Septembre 2015 00:38


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