Procès Khalifa Sall - La décision du tribunal expliquée aux nuls... par le journaliste-blogueur Pape Ismaila Dieng

Pour mieux comprendre le délibéré du tribunal correctionnel de Dakar dans l'affaire dite de la caisse d'avance de la mairie de Dakar, nous vous plongeons dans le THREAD (ensemble de tweets sur un seul sujet) du journaliste-blogueur, spécialiste des questions judiciaire Pape Ismaila Dieng.



Précision: JE NE SUIS PAS JURISTE. Je suis journaliste amoureux de la chose politique et judiciaire (et culturel depuis peu). Je couvre depuis 2013 les grands procès qui se passent au #Senegal : Karim Wade, Tahibou Ndiaye, Hissein Habré, Barth Dias, @kas_sall et bientot Imam Ndao

Commençons d'abord par expliquer ce qu'est une caisse ou une régie d'avance. Le principe de l'administration publique est de payer après service. On crée des caisses d'avance dans certaines administrations pour gérer les dépenses urgentes et les "menues dépenses".

‏Ces caisses dans les mairies sont créées par arrêté municipal qui doit lister les dépenses que l'on peut effectuer avec ces fonds. Ex : si on crée une caisse pour acheter du papier, cette caisse ne peut acheter que du papier.

Les montants d'une caisse d'avance sont renouvelés mensuellement sur la base d'un mandat émis par le maire. Ce mandat est accompagné des pièces justificatives des dépenses effectuées le mois précédent.

‏Si la somme n'est pas entièrement dépensée, le restant doit être retourné au receveur-percepteur municipal. Ce dernier, qui est un inspecteur du Trésor nommé par le Ministère des Finances, ne peut décaisser l'argent de la caisse sans le mandat et les pièces justificatives.

Khalifa Sall & Co ont utilisé de fausses factures "d'achat de riz et de mil pour les indigents" pour justifier les dépenses effectuées avec la caisse d'avance. C'est le délit de FAUX ECRITURE DE COMMERCE.

C'est le fait d'établir de faux documents de commerce (facture, bordereau, chèque...) pour établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques. Ce fait a été reconnu par Khalifa Sall et ses 5 agents.

Les deux receveurs-percepteurs municipaux ont dit ne pas être au courant.

Ces fausses factures ont été utilisées pour établir des bordereaux de réception et des mandats, ce qui donne le délit d'USAGE DE FAUX EN ECRITURE DE COMMERCE. Ces pièces étant basées sur du faux connu de leurs auteurs, elles deviennent fausses elles aussi.

On a le délit de FAUX DANS DES DOCUMENTS ADMINISTRATIFS. Ces nouvelles fausses pièces vont servir à faire décaisser les fonds de la caisse d'avance. On a le délit d'USAGE DE FAUX DANS DES DOCUMENTS ADMINISTRATIFS.

Nous venons d'expliquer les délits de FAUX ET USAGES DE FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE et de FAUX ET USAGE DE FAUX DANS DES DOCUMENTS ADMINISTRATIFS.

Le fait que toutes ces fausses pièces aient été utilisées pour tromper le système et récupérer des deniers publics entraîne le délit d'ESCROQUERIE PORTANT SUR LES DENIERS PUBLICS. Voilà pour les trois délits retenus contre Khalifa Sall.

Nous allons maintenant voir les délits que le juge n'a pas retenus contre lui.

Pour le délit de DETOURNEMENT DE DENIERS PUBLICS, le juge a considéré que les mêmes actes constitutifs de ce délit dans l'ordonnance de renvoi ont déjà servi à assoeir le délit d'escroquerie. Il n'est pas possible que le même fait constitue deux délits à la fois.

Aucun autre élément dans les débats ou la procédure ne permet d’asseoir le délit de détournement. A ce titre, Khalifa Sall et ses agents ne sont pas coupables de DETOURNEMENT DE DENIERS PUBLICS.

‏L'absence de ce délit rend de facto nulle la demande du procureur de l'Agent Judiciaire de l'Etat du remboursement par Khalifa Sall du montant détourné.

Pour le délit de BLANCHIMENT DE CAPITAUX : selon le juge rien aussi n'a permis de prouver qu'il y a eu un blanchiment des fonds de la caisse d'avance. Le blanchiment d'argent est l'action de dissimuler dans une activité légale la provenance d'argent acquis de manière illégale.

Ici le procureur n'a pas pu prouver que Khalifa Sall & Co ont blanchi l'argent. Pour cela, il lui aurait fallu démontrer le mécanisme et les moyens utilisés pour cela.

Dernier point le délit d'ASSOCITATION DE MALFAITEURS. Le juge aestimé que rien a permis de justifier qu'il y avait une entente préalable pour commettre ces délits. Pour qu'on puisse parler d'association de malfaiteurs, il faut nécessairement que

les personnes incriminées se soient réunies préalablement à la commission des faits délictueux pour s'entendre sur le comment, les moyens, etc. Dans cette affaire, le procureur n'a pas pu prouver l'existence de cette entente.

Voila en gros les six chefs d'inculpation que le juge d'instruction avaient retenu contre Khalifa Sall. Les juristes, si j'ai dit des bêtises, merci de corriger.

Par Pape Ismaila Dieng

Pape Ismaila Dieng, journaliste-blogueur

AYOBA FAYE

Samedi 31 Mars 2018 13:04


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