Trafic de cocaïne : l'Afrique de l'Ouest, nouvelle plaque tournante des cartels internationaux



L'Afrique de l'Ouest est devenue une zone stratégique pour le trafic international de cocaïne, selon un rapport du Global Initiative Against Transnational Organized Crime (GI-TOC). Des organisations criminelles sophistiquées, originaires des Balkans occidentaux et déjà bien implantées sur les marchés européens et latino-américains, ont fait de la région une plateforme centrale pour leur trafic à grande échelle depuis 2019.

Ces réseaux acheminent par voie maritime des cargaisons de plusieurs tonnes de cocaïne depuis le Brésil et d'autres pays producteurs d'Amérique latine vers les États côtiers d'Afrique de l'Ouest. Opérant dans l'ombre jusqu'à présent, ces groupes comptent parmi les plus dangereux et structurés au monde.

Forts de leur ancrage en Amérique latine, ces organisations utilisent la région ouest-africaine comme zone de stockage et de redistribution vers l'Europe et au-delà. Fatjona Mejdini, directrice de l'Observatoire des économies illicites en Europe du Sud-Est du GI-TOC, explique : « Ces groupes ont progressé en Afrique de l'Ouest grâce à la demande croissante de cocaïne en Europe, au renforcement des contrôles sur les itinéraires directs et au renforcement des partenariats avec les cartels latino-américains, notamment le Primeiro Comando da Capital (PCC) brésilien. »

Le rapport détaille les méthodes employées : trafic par conteneurs maritimes, navires plus petits, transbordements en mer et recours à la conteneurisation régionale pour brouiller les pistes. L'implication de courtiers locaux, chargés de la logistique et des contacts avec les acteurs régionaux, est un élément central de ce système.

« Le recours à des courtiers est une caractéristique essentielle de ces réseaux. Ils offrent flexibilité, accès local et servent de points de convergence entre différents groupes », précise Sasa Djordevic, co-auteur du rapport et analyste principal au GI-TOC.

Parmi les groupes les plus actifs figurent le clan monténégrin Kavač et son rival, le clan Škaljari. Des réseaux albanophones, présents en Espagne et au Brésil, opèrent également au Sénégal et en Gambie, parfois en collaboration avec la 'Ndrangheta italienne ou le PCC. Leurs structures flexibles, composées de petites cellules de confiance, leur permettent de tirer parti des vulnérabilités locales et de corrompre des acteurs des forces de l'ordre, des ports et des services de sécurité.

Lucia Bird, directrice de l'Observatoire des économies illicites en Afrique de l'Ouest du GI-TOC, alerte : « Les opérations des réseaux criminels des Balkans occidentaux ont contribué à faire de l'Afrique de l'Ouest un nœud crucial de transbordement de cocaïne à destination de l'UE – et la région continue de gagner en importance. »

À terme, le GI-TOC anticipe une autonomie accrue de ces groupes, qui investissent directement dans des infrastructures et mécanismes de protection. Leurs activités pourraient s'accompagner d'une corruption aggravée, de violences et d'une fragmentation en cellules plus indépendantes. La région pourrait également devenir une base arrière pour fugitifs et un centre élargi de blanchiment d'argent.


Vendredi 5 Septembre 2025 19:36


Dans la même rubrique :