VIDEO Gabon: l'étrange stratégie de Mba Obame

Le principal adversaire du président gabonais Ali Bongo est sous la menace d'un procès pour «haute trahison». Le pouvoir reproche à André Mba Obame, ancien baron du régime au Gabon, de s'être autoproclamé président.



André Mba Obame à Libreville le 4 mai 2011. WILS YANICK MANIENGUI/AFP
A quand le prochain épisode du feuilleton dont André Mba Obame, dit «AMO», est le héros? Le principal opposant au président gabonais Ali Bongo, dont il fut pendant 25 ans un ami très proche, fait à lui seul l’actualité du Gabon depuis bientôt deux ans. Dernier événement en date: la levée par l’Assemblée nationale, le 5 mai 2011, de son immunité parlementaire, qui donne la possibilité aux autorités de lancer une procédure judiciaire contre lui. Mba Obame, 54 ans, pourrait bien être poursuivi pour haute trahison.

Son fait d’arme du 25 janvier dernier n’a pas plu: inspiré par la crise ivoirienne et la révolution tunisienne, il s’était autoproclamé président du Gabon, avant de se réfugier aussitôt avec son «gouvernement» dans les locaux du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), à Libreville. Son parti, l’Union nationale (UN), avait été dissout deux jours plus tard pour «non-respect des principes démocratiques, atteinte à la forme républicaine de l'Etat, atteinte à la souveraineté nationale, et trouble à l'ordre public».

Alors qu’il avait jusque-là évité d’évoquer publiquement son ex-ami, Ali Bongo avait sèchement commenté son coup d’éclat:

«Je préfère être un amateur de la politique qu'un professionnel du ridicule.»

L’ONU avait dû jouer la médiatrice pour obtenir qu’AMO quitte librement ses locaux au bout d’un mois.


Ancien cacique du régime Bongo

Mba Obame n’a pas toujours été opposant —loin de là. C’est en militant activement, lorsqu’il était étudiant à Paris, au sein du Mouvement de redressement national (Morena, à l'époque un mouvement d'opposition) de son oncle Paul Mba Abessole alors en exil, qu’il a été remarqué par Omar Bongo. De retour au Gabon en 1984, muni d’un doctorat en sciences politiques, il est happé par le régime: à 27 ans, il intègre le cabinet du président, auprès duquel il se rend peu à peu indispensable.

«Pendant 25 ans, j’étais à côté (de Bongo), de jour comme de nuit», dira-t-il plus tard.

C’est lui qui a œuvré au ralliement au pouvoir de Mba Abessole, alors premier opposant à Bongo. En échange de sa fidélité, AMO a été ministre de 1997 à 2009.

Tout le monde, cependant, ne garde pas un bon souvenir de son passage dans les arcanes du pouvoir. Ses détracteurs lui reprochent notamment d’avoir été un ministre de l’Intérieur particulièrement dur. Fin 2008, il avait fait arrêter plusieurs figures de la société civile, sous un drôle de prétexte: il les accusait de détenir une lettre ouverte, écrite par un Gabonais vivant en France et réclamant la transparence financière à Bongo. Inculpés pour «détention d’un document en vue de sa diffusion pour déstabiliser l’Etat», les accusés avaient été mis en liberté provisoire au bout d’une dizaine de jours de garde à vue et de prison (PDF), sur ordre de Bongo. D’autres de ses contempteurs ont surnommé Mba Obame le «prince des ténèbres», estimant qu’il a été «de tous les coups tordus du régime».

Selon un conseiller à la présidence, «il faisait allumer un feu» en incitant les syndicats à faire grève, «et après, il allait voir le président et disait: "Je connais les meneurs, je peux l'éteindre"». Bongo lui donnait alors beaucoup d’argent pour régler le prétendu problème. Dans les coulisses du pouvoir, il se dit aussi que Mba Obame est allé jusqu’à tenter de vendre l’île de Mbanié à la Guinée équatoriale. Cette île est l'objet d’un contentieux territorial entre le Gabon et ce pays frontalier.

Le duo qu’il a longtemps formé avec Ali Bongo, dont il a été le témoin à son mariage en 2000, a aussi été critiqué. Certains assurent qu’il a été le «mauvais génie» d’Ali. Tous deux ont en tout cas mené un mouvement réformateur au sein du parti présidentiel, le Parti démocratique gabonais (PDG), qui a poussé vers la sortie et mécontenté plusieurs de ses barons. Sous la pression de ce tandem de «rénovateurs», le cacique Zacharie Myboto avait par exemple démissionné du gouvernement en 2001.

La rupture avec son ami Ali

C’est la maladie puis la mort d’Omar Bongo, en juin 2009, qui ont séparé ces «frères siamois» et marqué le début de la saga AMO. Comme Ali, Mba Obame s’est lancé dans la course à la présidence, mais en «candidat indépendant». Peu d’observateurs lui donnaient alors une chance de faire jeu égal avec Bongo, celui-ci ayant le soutien de la puissante machine électorale du PDG. Lire la suite sur slateafrique

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Jeudi 26 Mai 2011 15:38


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