​Soudan : Le Kordofan au bord du chaos humanitaire face à l'intensification des combats



Le conflit au Soudan connaît une nouvelle phase d'escalade, avec des combats imminents dans la région stratégique du Kordofan, menaçant de plonger des populations déjà vulnérables dans une crise humanitaire sans précédent. Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a lancé un avertissement solennel le 7 novembre 2025, signalant des « préparatifs évidents » en vue de nouvelles offensives militaires.
 
« Rien n’indique une désescalade ; au contraire, les développements sur le terrain montrent une intensification imminente des opérations militaires, avec des conséquences dévastatrices pour des civils déjà épuisés par la souffrance », a déclaré M. Türk.
 
Cette mise en garde intervient alors que la région est secouée par une semaine de bombardements intensifs sur des zones civiles, des marchés et des camps de déplacés. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) rapporte des affrontements persistants dans l’État du Kordofan occidental, entraînant de nouvelles victimes civiles. Des dizaines de familles ont été contraintes de fuir la localité d’Al-Udayya vers El-Obeid, dans le Nord-Kordofan, après des attaques près d’Al-Nuhud.
 
L’OCHA indique que la situation reste « extrêmement volatile », alors que l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) signale également de nouveaux déplacements. L’agence de l’ONU appelle à une aide d’urgence pour faire face à des besoins humanitaires croissants au Darfour et au Kordofan, rappelant que le plan de réponse humanitaire 2025 n’est financé qu’à 28 %.
 
Exode massif

L’extension des combats du Darfour vers le Kordofan, zone charnière entre Khartoum et l’ouest du pays, a provoqué un exode massif. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) signale l'arrivée de nombreux déplacés « épuisés et affamés » après des jours de marche. Environ 250 personnes sont actuellement hébergées dans quatre abris précaires, avec un accès limité aux services essentiels. Entre le 26 et le 31 octobre, près de 36 825 personnes ont fui cinq localités du Nord-Kordofan, théâtre de violents affrontements entre l’armée et les Forces de soutien rapide (FSR).
 
Les combats se sont étendus du Darfour vers le Kordofan, zone charnière entre Khartoum et l’ouest du pays. En parallèle, environ 1 200 personnes ont fui plusieurs villages des localités de Bara et Umm Rawaba vers d’autres districts du Nord-Kordofan et de l’État du Nil Blanc.
 
Massacres et crimes de guerre
 
Des témoins à Port-Soudan ont fait état de frappes aériennes « aveugles » de l’armée contre des civils, causant la mort de centaines de personnes. Une attaque aurait fait plus de 1 500 morts, majoritairement des enfants, selon des vidéos circulant en ligne.
 
Le 4 novembre 2025, l’Observatoire soudanais des droits humains a rapporté la chute d’un avion militaire sur une zone résidentielle à Babnusa, au Kordofan occidental, dénonçant l’usage de barils explosifs. L’armée, selon l’organisation, « continue d’ignorer ses obligations de protéger les civils ».
 
Ce n’est pas la première fois que les forces aériennes soudanaises utilisent des armes interdites. En février 2025, le groupe indépendant Emergency Lawyers avait accusé l’armée d’avoir largué des barils explosifs sur des zones habitées à Umm Badr, faisant plusieurs morts et blessés. L’organisation a appelé à des enquêtes internationales et à des sanctions contre les responsables de ces attaques qu’elle qualifie de « crimes de guerre flagrants ».
 
Accalmie à El-Fasher
 
À l’inverse, la ville d’El-Fasher, au Nord-Darfour, connaît un calme relatif après des mois de combats. Les autorités locales parlent d’un retour progressif à la normale, avec la réouverture des marchés et la reprise des services essentiels. Le gouvernement du Darfour affirme que le retour des déplacés se fera « de manière organisée et sécurisée » une fois les opérations de déminage achevées.
 
Aide humanitaire
 
Avec la prise de contrôle d’El-Fasher par la coalition civile Tassiss, les autorités locales ont appelé les organisations internationales à intensifier leur aide. Malgré les restrictions et les risques de frappes aériennes, Tassiss a garanti la sécurité des corridors humanitaires dans tout le Darfour.
 
Des convois du Programme alimentaire mondial (PAM) et de l’ONG World Vision ont déjà atteint El-Fasher depuis Nyala, apportant vivres et produits de première nécessité aux habitants et déplacés, après des mois d’isolement et de privations.


Samedi 8 Novembre 2025 18:38


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