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En Afrique, bilan mortel le plus lourd pour la presse depuis 2000

2009 s’est déjà soldée comme l’année la plus meurtrière pour les professionnels des médias à travers le monde depuis 1992, selon un rapport annuel du Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ) sur les journalistes tués en raison de leur travail. L’Afrique sub-saharienne a enregistré son plus lourd bilan de cette décennie, et les assassins des victimes jouissent d’une impunité totale, selon le même rapport publié cette semaine marquant les tristes anniversaires des meurtres non résolus de Norbert Zongo au Burkina Faso en 1998 et de Deyda Hydara en Gambie en 2004.



En Afrique, bilan mortel le plus lourd pour la presse depuis 2000
En Afrique sub-saharienne, 12 journalistes ont été assassinés en relation directe avec leur travail cette année, juste une perte de vie en moins que le lourd bilan enregistré en 1999, à cause de la guerre civile en Sierra Leone. Cette fois, le conflit en cours en Somalie a coûté la vie à la plupart des victimes, mais d'autres journalistes ont été assassinés alors qu'ils enquêtaient sur la corruption au Nigéria et au Kenya ou en couvrant la crise politique à Madagascar. Le CPJ enquête sur les cas de deux autres journalistes de la République du Congo et la République démocratique du Congo afin de déterminer si leurs morts étaient liés au journalisme.

En Somalie, neuf journalistes locaux ont été assassinés ou tués dans des situations de combat. En 2009, de violents extrémistes islamistes ont mené une campagne de terreur contre la presse en Somalie, en menaçant et en assassinant des journalistes et en se saisissant de stations de radio. « Nos neuf confrères tombés en Somalie sont une perte immense pour la petite bande de journalistes qui risquent leur vie chaque jour, juste en marchant dans la rue », a déclaré le Directeur adjoint du CPJ, Robert Mahoney, qui aide à coordonner le plaidoyer du CPJ dans la région. «Leurs reportages courageux les exposent non seulement aux échanges de tirs et à des violences aveugles mais aussi à des assassinats ciblés par des insurgés qui veulent contrôler les informations à tout prix. »

A l’échelle mondiale, au moins 68 journalistes ont été tués en raison de leur travail, ce qui est le plus lourd bilan jamais documenté par le CPJ. Ce nombre record est en grande partie attribuable au massacre de plus de 30 professionnels des médias lors d’un règlement de comptes électoral dans la province philippine de Maguindanao. Jamais le CPJ n’a recensé de pires violences contre les médias. Le bilan mortel de 2009 dépasse celui de 2007 quand 67 journalistes avaient été tués, en grande partie en raison des violences en Irak.

Comme les années passées, le meurtre a été la principale cause des décès liés au travail des journalistes en 2009. Au moins 50 journalistes ont été ciblés et tués en représailles à leur travail, ce qui représente environ les trois quarts des décès en 2009. Onze journalistes ont été tués dans des tirs croisés dans des situations de combat, tandis que sept autres sont morts alors qu'ils couvraient des missions périlleuses telles que des descentes de police ou des manifestations de rue.

La plupart des nations les plus meurtrières pour la presse en 2009 ont des records de longue date en matière de violence contre les journalistes et des taux élevés d'impunité pour ces attaques.

« 2009 a été une année d’anéantissement sans précédent pour les médias du monde entier, mais la violence confirme également des tendances à long terme », a déclaré le directeur exécutif du CPJ, Joël Simon. «La plupart des victimes étaient des reporters locaux couvrant des informations dans leurs propres communautés. Les auteurs sont partis du principe, vu les précédents, qu'ils ne seraient jamais punis. Que les meurtres aient eu lieu au Kenya ou aux Philippines, en Russie ou au Mexique, changer cette perception est la clé pour réduire ce bilan », a-t-il ajouté.

L'énormité du massacre aux Philippines est sans précédente. Vingt-neuf journalistes et deux de leurs collaborateurs figuraient parmi les 57 personnes brutalement assassinées en novembre dernier dans une embuscade motivée par des rivalités politiques entre clans. L’événement antérieur le plus meurtrier pour la presse s’est produit en Irak en octobre 2006, lorsque 11 employés de la télévision Al-Shaabiya ont été tués dans une attaque contre les studios de la chaîne à Bagdad, selon des recherches du CPJ.

Les meurtres extrêmes commis à Maguindanao reflètent le profond climat d’impunité aux Philippines, où le laxisme dans l’application des lois et l’absence de volonté politique ont mené à un nombre élevé de meurtres de journalistes et à de faibles taux de condamnation pendant deux décennies. Pendant deux années consécutives, le CPJ a identifié les Philippines comme l'un des pires pays du monde en matière de violence contre la presse.

Quatre journalistes ont été tués au Pakistan au cours de l'année, parmi eux, figure Musa Khankhel, un journaliste de la télévision locale connue pour son indépendance. Enlevé par des hommes armés alors qu'il couvrait une marche pacifique près de la ville de Matta dans une zone contrôlée par les talibans, M. Khankel a été torturé puis criblé de balles.

Trois journalistes ont été assassinés en Russie, qui enregistre un taux élevé de mortalité parmi les professionnels des médias depuis plus de deux décennies. Dans le recensement annuel des victimes en 2009 figure Abdulmalik Akhmedilov, le directeur de publication d’un journal au Daguestan qui a vivement critiqué les responsables du gouvernement russe pour avoir réprimé les dissensions religieuses et politiques. Il a été retrouvé criblé de balles dans sa voiture. En septembre dernier, le CPJ a publié un rapport intitulé Anatomie de l’injustice, qui a analysé le nombre élevé de meurtres non résolus de journalistes en Russie, et a conduit le gouvernement à promettre de réexaminer plusieurs cas.

Deux journalistes ont été tués au Mexique et au Sri Lanka. Dans l'État de Durango, au Mexique, des assaillants ont enlevé le reporter judiciaire Eliseo Barrón Hernández à son domicile, devant sa femme et ses deux jeunes filles. Son cadavre a été retrouvé le lendemain dans un fossé d'irrigation avec une blessure par balle à la tête. M. Barrón venait de publier un article sur la corruption policière.

Des représailles politiques ont également été le motif suspecté dans le meurtre de Lasantha Wickramatunga, un directeur de publication sri-lankais qui a critiqué la politique du gouvernement en ce qui concerne la guerre avec le groupe rebelle des Tigres tamouls. Huit hommes casqués à bord de quatre motos ont entrainé de force le véhicule de M. Wickramatunga au bord d’une rue très fréquentée en dehors de Colombo et l'ont bastonné avec des barres de fer et des bouts de bois.

Voici d'autres tendances et détails qui ressortent de l'analyse du CPJ:

Ø Le total de 2009 est de plus de 60 pour cent supérieur au total de 42 décès enregistré en 2008.

Ø Toutes les victimes de 2009, sauf deux, étaient des journalistes locaux. Bien que les reporters locaux aient longtemps été plus vulnérables à la violence meurtrière que leurs confrères étrangers, l’écart n'a jamais été aussi grand que cette année.

Ø Les journalistes de la presse écrite représentent 56 pour cent du total, ce qui indique que la presse écrite continue de jouer un rôle de première ligne dans la couverture médiatique des situations dangereuses. Bien que les recherches du CPJ aient constaté une baisse notable du nombre de journalistes de la presse écrite en prison, elles n’indiquent aucune baisse similaire sur le nombre de décès parmi les reporters de la presse écrite, les directeurs de publication et les photographes.

Ø En plus des meurtres à Maguindanao, le CPJ a enregistré en 2009 trois autres décès liés à l’exercice du journalisme aux Philippines. En tout, 32 journalistes et deux collaborateurs de presse ont été tués dans ce pays cette année.

Ø Deux journalistes sont morts du fait de négligence ou de mauvais traitement pendant leur incarcération sur des accusations liés à leur profession. Novruzali Mamedov, est mort dans une prison d'Azerbaïdjan après s'être vu refuser des soins médicaux adéquats, tandis que le bloggeur iranien Omidreza Mirsayafi est mort à la Prison d'Evin, dans des circonstances qui n'ont jamais été très bien expliquées.

Ø Au moins deux journalistes ont été portés disparus cette année, l’un au Mexique et l'autre au Yémen.

Ø Neuf journalistes indépendants sont parmi les victimes de 2009. Cette proportion des journalistes indépendants est conforme à celle des années précédentes.

Ø D'autres endroits où des professionnels des médias ont été tués sont: l’Afghanistan, la Colombie, Le Salvador, l’Indonésie, le Kenya, Madagascar, le Népal, le Nigeria, le Territoire palestinien occupé, et le Venezuela.

Le CPJ a commencé à documenter méticuleusement les cas de décès de journalistes en 1992. Le personnel du CPJ applique des critères stricts pour chaque inscription sur sa liste. Ses chercheurs enquêtent de manière indépendante sur les circonstances de chaque décès. Le CPJ juge qu’ un décès est lié a l’exercice du journalisme lorsque son personnel est raisonnablement certain que la victime a été tuée en représailles directes à son travail, dans des tirs croisés ou dans une mission périlleuse pendant la recherche ou la retransmission d’informations.

Si les circonstances d’un meurtre ne sont pas clairs, et qu’il est toutefois possible qu’un journaliste ait été tué en raison de son travail, le CPJ classe ce cas comme étant «non confirmé» et poursuit son enquête. La liste du CPJ n'inclut pas les journalistes décédés des suites de maladie ou tués dans des accidents, comme les accidents de voiture ou d'avion, à moins que ceux-ci aient été délibérément provoqués. D'autres organisations de défense de la liberté de la presse, qui utilisent des critères différents, citent un nombre de décès plus élevé que celui du CPJ.

La base de données du CPJ sur les journalistes tués en raison de leur travail en 2009 comprend des fiches sur chaque victime et une analyse statistique. CPJ offre également une base de données sur tous les journalistes tués depuis 1992. Une liste finale des journalistes tués en 2009 sera publiée début janvier 2010.

Le COMITÉ POUR LA PROTECTION DES JOURNALISTES (CPJ), est une organisation indépendante, à but non lucratif basée à New York et devouée à défendre la liberté de la presse dans le monde depuis 1981. Veuillez consulter notre site web au www.cpj.org

Pressafrik

Vendredi 18 Décembre 2009 - 18:09


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