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Trente ans du génocide des Tutsis: le Rwanda commémore un passé dont «il faut tirer les leçons»

Au Rwanda, le président Paul Kagame a allumé la flamme du souvenir, au mémorial de Guisozi, au matin de ce dimanche 7 avril, pour lancer les commémorations du 30e anniversaire du génocide des Tutsis, avant la cérémonie officielle. Le génocide a fait au moins 800 000 morts.



La cérémonie s’est déroulée en présence de milliers de personnes dont de nombreuses personnalités internationales et a duré un peu plus de deux heures dans le stade de BK Arena.
 
Cinq mille invités dont plus d’une trentaine de chefs d’État, de gouvernement, d’anciens présidents ou encore de représentants d’organisations internationales étaient tous réunis autour de cette scène noire avec, en son centre, un grand arbre de lumière.
 
Une demi-douzaine de discours ont été prononcés, ponctués par des performances artistiques ainsi que des prises de parole tournées autour de la mémoire, mais aussi autour du silence et de la responsabilité de la communauté internationale, car il aura fallu « attendre le 8 juin 1994, deux mois après le début des massacres, pour que les Nations unies parlent enfin d’actes de génocide », a déclaré le ministre rwandais de l’Unité nationale et de l’engagement civique, Jean-Damascene Bizimana.
 
« Tristesse et reconnaissance »
« Personne, pas même l’Union africaine ne pourrait se disculper de son inaction », a commenté le président de la Commission de l’UA Moussa Faki Mahamat, un passé dont « il faut tirer les leçons », selon le président Paul Kagame, dernier discours de la cérémonie appelant les leaders africains à rejeter les politiques tribales et de nettoyage ethnique et saluant la nouvelle génération rwandaise, « gardiens de notre future et de la fondation de notre unité », affirme-t-il.
 
« Aujourd'hui, nos cœurs sont remplis, à mesure égale, par la tristesse et la reconnaissance. Nous nous souvenons de nos morts mais nous sommes aussi heureux de voir ce que le Rwanda a pu devenir. Aux survivants qui sont ici, nous avons une dette envers vous. Nous vous avons demandé l’impossible : de porter le poids de la réconciliation sur vos épaules et de continuer de le faire pour notre nation.
 
« Notre voyage a été long et difficile. Le Rwanda a été profondément humilié, par l'amplitude de nos pertes, et les leçons que nous avons apprises sont gravées dans le sang. Mais les progrès formidables réalisés par notre pays sont évidents et ils sont le résultat des choix que nous avons fait pour ressusciter notre nation avec, comme fondation essentielle, la notion d'unité. Désormais, nous avons une responsabilité les uns vis-à-vis des autres. Aujourd'hui, nous ressentons aussi une reconnaissance particulière pour nos amis venus du monde entier et qui sont présents ici avec nous. Certains pays représentés, aujourd'hui, ont envoyé leurs fils et leurs filles lors de missions de maintien de la paix au Rwanda. C'est la communauté internationale qui nous a tous trahi, que ce soit par mépris ou lâcheté », a déclaré le président rwandais, Paul Kagame.
 
Pour moi, ces 30 ans de commémorations du génocide, c’est aussi donner la place aux jeunes pour qu’ils puissent aussi en parler, non pas comme Tutsi ou Hutu, mais en parler dans un pays où les Rwandais sont Rwandais. C’est important pour que les jeunes s’intègrent dans cette façon d’agir pour développer notre pays.
 
Après avoir affirmé cette « trahison », Paul Kagame a notamment a salué certains partenaires africains présents à Kigali. Pour leur solidarité et leurs efforts pour alerter sur le génocide en cours au Rwanda en 1994 et pour leur aide dans la reconstruction du pays. Mais il a mis en garde contre le tribalisme.
 
Avons-nous vraiment tiré leçon de tout cela ? Nous voyons beaucoup d'acteurs africains qui sont directement impliqués dans la montée en puissance de politiques basées sur le tribalisme. Et le nettoyage ethnique est toujours préparé et pratiqué. Est-ce que c'est l'Afrique dans laquelle nous voulons vivre ? Est-ce le monde que nous voulons ? À travers l'Histoire, les survivants d'atrocités sont toujours censés se taire ou bien être oblitérés, voire blâmés pour leurs malheurs. Les Rwandais ne peuvent pas se permettre d'être indifférents aux causes profondes du génocide. Et nous serons toujours extrêmement vigilants, même si nous sommes les seuls.
 
Cette première journée s'est terminée par une veillée, au BK Arena, rassemblant, en grande majorité, des jeunes nés après le génocide. Des centaines d'entre eux, portant les tee-shirts blancs du Kwibuka, étaient présents pour cette veillée du souvenir.
 
Un moment important pour le pays, selon François d’Assise Mugisha, 19 ans : « Je me sens concerné par tout ce qui se passe dans mon pays. J’ai des parents, ils ont vécu ces moments. Ils me font m’asseoir, pour me dire, mon fils, nous avons traversé telle et telle choses, ils me racontent des histoires sur tout. Je veux partager ce moment avec tout le monde. C’est quelque chose que le pays partage, tous les Rwandais. »
 
Un seul discours, celui du président d’Ibuka, Philibert Gakwenzire, pour souligner le devoir de mémoire de ce passé douloureux. Des mots suivis par des vidéos de témoignages de rescapés. Des témoignages durs à entendre pour Gloria Mbabazi, 19 ans : « Je me sens émue. Je sens qu’ils faut qu’ils aient de la place pour que quelqu’un les écoute. Ils doivent être aidés, entendus quand ils en ont besoin. »
 
Dernière musique de la veillée d’hommage, avec une image : celle des gradins illuminés par les bougies tenues par tous les jeunes de l’assemblée.

RFI

Lundi 8 Avril 2024 - 09:45


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