Homélie
Monsieur le Ministre de l’Intérieur, conduisant la Délégation
officielle, représentant Monsieur le Président de la République,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs les Députés,
Monseigneur le Nonce Apostolique,
Chers Confrères dans l’épiscopat,
Honorables Autorités administratives, politiques et militaires,
Honorables Autorités religieuses et coutumières,
Chers Confrères dans le sacerdoce,
Chers Religieux, Religieuses,
Chers jeunes,
Chers frères et sœurs dans la foi,
1- Pentecôte 1888 – Pentecôte 2013 : le Pèlerinage Marial de Poponguine
fête aujourd’hui ses 125 ans. En cette circonstance, qui rappelle le cheminement, dans
la foi, de tant de générations d’enfants, de jeunes et d’adultes du Sénégal et d’ailleurs,
sous la protection de la très Sainte Vierge Marie, Notre Dame de la Délivrande,
nous pouvons reconnaître l’accomplissement du vœu exprimé par Monseigneur
PICARDA, alors Vicaire Apostolique de la Sénégambie, au lancement de la première
édition du Pèlerinage Marial de Poponguine : « L’objet de ce pèlerinage, qui ouvrira,
nous l’espérons, la série des manifestations de la foi et de la piété envers notre Dame de
la Délivrande, est d’introniser solennellement la Vierge dans le nouveau domaine que
nous lui avons choisi, et dont elle voudra bien, nous en avons l’assurance, accepter le
patronage. Nous nous proposons d’obtenir, par le moyen de cet acte public et solennel
de foi et de piété, le développement de l’Esprit et la pratique de la vie chrétienne au
Sénégal… »
Depuis lors, en effet, Poponguine est devenu cette terre de ressourcement spirituel,
à l’école de Marie, Modèle de foi et Porteuse de l’espérance de l’Eglise. Depuis
lors, ce Sanctuaire Marial est devenu le lieu, où notre Eglise Famille de Sénégambie, en
communion avec toutes les Eglises sœurs de la sous-région, vient accueillir et rendre
toujours vivante la prophétie de Marie, dans son Magnificat : « Désormais, toutes
les générations me diront Bienheureuse. » (Lc 1, 48b)
Voilà pourquoi nous sommes encore là, 125 ans après, de plus en plus nombreux,
de plus en plus fervents et joyeux, pour louer et implorer Marie, notre Sainte Mère.
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125 ans du Pèlerinage de Poponguine « Bienheureuse celle qui a cru ! »
Continuez donc, chers jeunes, chers pèlerins de tout âge, de faire de ce Pèlerinage
de Poponguine le tremplin de votre dévotion mariale, de votre affection filiale envers
cette Mère toujours tendre et bienveillante envers ses fils, que nous sommes. Enseignés
par l’Esprit de la Pentecôte, soyons heureux de chanter aujourd’hui, avec Elisabeth,
les louanges de celle, dont la foi nous a valu la naissance du Fils de Dieu fait homme :
« Bienheureuse celle qui a cru en l’accomplissement de ce qui lui a été dit
de la part du Seigneur ! » (Lc 1, 45)
Comment comprendre de telles paroles ? Je voudrais vous proposer, pour notre
méditation commune, quelques merveilles de la vie de Marie, comme pistes qui nous
aident à effectuer une sorte de pèlerinage, en sa compagnie : merveille de la foi en la
Parole de Dieu, merveille de la foi en l’amour de Dieu, merveille de la foi et de l’amour
qui se vérifient dans l’amour des hommes.
2- Merveille de la foi en la Parole de Dieu ! Elle se produit dans la situation
délicate, où le croyant se sent choisi et appelé gratuitement par Dieu ; la situation où il
doit vaincre toute indifférence, ou bien tout refus, pour donner une réponse personnelle
à Dieu.
C’est bien ce que Marie a vécu lors de l’épisode de l’Annonciation, que nous
connaissons bien : « A cette parole, elle [Marie] fut toute troublée, et elle se demandait
ce que signifiait cette salutation… Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais pas
d’homme ? (…) Je suis la servante du Seigneur, qu’il m’advienne selon ta parole ! » (Lc
1, 29.34.38)
Le Oui de Marie ! Le merveilleux Oui de Marie à la Parole de Dieu ! Le Oui à la
fécondité incommensurable, puisqu’il nous a valu le salut de l’humanité !
Mais n’oublions jamais, et mesurons souvent combien ce Oui a été un « chèque
en blanc signé à Dieu », comme dirait Madeleine DELBREL. En prononçant ce Oui,
dans une disponibilité et une générosité, que nous ne nous lasserons jamais d’admirer
et de louer, la jeune Vierge Sainte de Nazareth ne pouvait mesurer, ce jour-là, toutes
les situations heureuses ou douloureuses, tous les événements heureux ou malheureux,
qu’il entrainera dans sa vie, et qu’elle devra assumer, en renouvelant ce Oui.
Pensons, par exemple, au drame intérieur qu’elle a vécu dans le silence, quand il a
fallu informer et expliquer son état de grossesse, au moins à ses parents, à Joseph, dont
la réaction douloureuse nous fait aussi deviner la profonde perturbation de sa fiancée
(cf. Mt 1, 19-20). Pensons au drame de la fuite en Egypte (cf. Mt 2, 13s) avec un bébé de
quelques mois, et à l’expérience si peu confortable de la vie de refugiée hors de sa patrie,
nécessité et expérience qui sont venues assombrir la joie de mettre au monde le Fils de
Dieu fait homme. Pensons encore à la douleur et humiliation de Marie et de Joseph,
quand ils ont constaté la disparition de Jésus, l’ont cherché pendant trois jours, et l’ont
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125 ans du Pèlerinage de Poponguine « Bienheureuse celle qui a cru ! »
entendu leur donner la réponse que nous connaissons (cf. Lc 2, 41s). Et que dire de la
présence de la Mère des Douleurs au pied de la Croix (cf. Jn 19, 25-27), après la réponse
si encourageante et réconfortante, qu’il avait donnée à sa demande de faire un geste
pour les mariés de Cana.
Oui chers jeunes, oui chers frères et sœurs, comme Elisabeth, redisons à Marie,
avec une admiration et une affection toute ferventes : « Bienheureuse celle qui a
cru en l’accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur ! »
(Lc 1, 45) Mais n’oublions jamais que, si la foi en la Parole de Dieu, et l’application de
cette Parole de Dieu dans sa vie, lui ont valu de profondes et innombrables joies, elles ne
lui ont pas épargné les brûlures des épreuves de la vie. Marchant en pèlerinage sur les
pas de Marie Notre Mère, disons toujours oui à la Parole de Dieu, lui signant en toute
confiance « un chèque en blanc » pour la conduite de notre vie.
Merveille de la foi en la Parole de Dieu ! Il faut passer par la porte de
la foi, pour entrer dans la joie de Dieu. Marie est déclarée « Bienheureuse », parce
qu’elle a cru. Elle a cru que les paroles, qui lui furent dites de la part du Seigneur,
s’accompliraient. Elle a cru que Dieu « se souvient de son amour, de sa promesse à
Abraham et à sa race à jamais. » (Lc 1, 55) Elle a cru que Dieu pouvait, « pour nous les
hommes et pour notre salut », prendre chair en elle, par l’Esprit Saint. Elle a cru que
Dieu a le souci de l’homme, au point de se faire homme. Elle a cru que la compassion du
Père va permettre la Passion du Juste, pour effacer la condamnation des coupables, les
réconcilier avec Lui, et rendre possible leur participation à sa vie divine.
3- Merveille de la foi en l’amour de Dieu ! Croire en Dieu, c’est en réalité
croire en son amour fou pour l’homme. C’est par amour que Dieu crée l’univers et
l’homme. C’est par amour qu’il se choisit un peuple pour être « son Peuple », avant de
conclure plus tard, et définitivement, avec tous les hommes, en Jésus-Christ mort et
ressuscité, une alliance indestructible. C’est par amour qu’il nous promet la vie, pour
l’éternité. C’est pourquoi Saint Jean dit : « Nous avons connu l’amour que Dieu a pour
nous et nous y avons cru. » (1 Jn 4, 16)
Dans l’Evangile, le chemin de Marie est intimement lié au chemin de Jésus,
comme celui d’une mère à celui de son fils. En tant que Mère, elle parcourait les
chemins de la foi, cherchant à découvrir, entre interrogations et surprises, le vrai visage
de Jésus son Fils, et Fils de Dieu fait homme. « Quant à Marie, elle conservait avec soin
toutes ces choses, les méditant en son cœur. » (Lc 2, 19)
Oui, frères et sœurs, c’est là, dans le cœur de Marie, que s’allume et s’amplifie
progressivement la flamme de la foi. C’est là qu’elle a su progressivement puiser les
ressources nécessaires, pour décrypter tous les signes, qui se manifestaient à elle durant
toute la vie de Jésus ; pour accueillir sereinement, dans le silence et la méditation,
toutes les paroles de Jésus, et sur Jésus.
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125 ans du Pèlerinage de Poponguine « Bienheureuse celle qui a cru ! »
En cette Année de la Foi, ne manquons pas de pénétrer souvent dans le grand
Sanctuaire, qu’est le Saint Cœur de Marie, où la Parole de Dieu trouve un terrain propice
et un écho fidèle. Que ce Cœur soit pour nous, le Guide qui nous aide à croire en l’amour
de Dieu, Père, Fils et Saint Esprit, qui nous aide à aimer Jésus son Fils, avec le Père et
l’Esprit Saint.
4- Merveille de la foi et de l’amour qui se vérifient dans l’amour des
hommes ! En effet, comment croire en un Dieu qui se met en route vers l’homme, et
ne pas se mettre aussi en chemin pour l’homme ? Marie, femme de foi est aussi femme
de charité. Elle s’est mise en route rapidement vers sa cousine Elisabeth. Trois mois
durant, elle demeura avec elle, l’invitant à l’action de grâce pour les merveilles de Dieu,
lui rendant, par amour, tous les services qu’elle pouvait.
Dans le bel épisode des noces de Cana, Marie nous montre encore comment son
amour de Dieu se traduit dans l’attention aux besoins des autres, dans la prévenance qui
rend service, sans demande préalable. C’est ainsi qu’elle amène son Fils à accomplir le
merveilleux geste envers les jeunes mariés, geste qui provoquera la foi en son Fils.
La Solennité de la Pentecôte, que nous venons de célébrer, nous rappelle que,
comme Marie, nous avons reçu le Saint Esprit, qui ne demande qu’à jaillir de nos cœurs,
grâce à « l’élan de notre générosité. » (Rm 12, 11) Laissons le Saint Esprit nous éduquer
à l’attention aux besoins et aux souffrances des autres, au partage, à l’hospitalité, à la
compassion pour ceux et celles qui sont dans l’affliction et la solitude. Ainsi seulement,
nous pourrons nous dire une communauté de foi, une assemblée de croyants.
Merveille de la foi et de l’amour qui se vérifient dans l’amour des
hommes ! En effet, la foi se vérifie plus dans les œuvres d’amour que dans les belles
déclarations. Les plus beaux pèlerinages conduisent vers ceux qui sont dans le besoin
et dans les larmes. En servant ceux-ci, nous devenons de plus en plus les disciples de
Jésus Christ (cf. Jn 13, 5) ; nous devenons plus authentiquement les enfants de Celle
qui se nomme « la Servante du Seigneur » (Lc 1, 38) ; nous devenons réellement « les
serviteurs du Seigneur » (Rm 12, 11). C’est cette manière de croire, qui vient à bout de
toutes les défiances contre la religion. Si beaucoup pensent encore que les religions sont
facteurs d’intolérance et de violence, c’est parce que trop souvent, nos liturgies, nos
temps de prière, ne se prolongent pas en services des autres ; nos confessions de foi ne
se traduisent pas en actes d’amour.
Marie, Notre Dame de la Délivrande, nous donne sa main, pour nous rassurer,
et nous accompagner, dans ce grand pèlerinage de la foi. Nos mains accrochées à la
sienne, confions-lui aujourd’hui notre Sénégal, les pays de la sous-région, surtout
ceux affectés par la guerre et les conflits de toute sorte. Confions-lui nos familles, nos
communautés chrétiennes, nos communautés humaines.
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125 ans du Pèlerinage de Poponguine « Bienheureuse celle qui a cru ! »
En ce 125e
anniversaire de notre Pèlerinage, nous rendons grâce au
Seigneur, qui en a inspiré le projet à Monseigneur PICARDA, et qui, depuis lors,
a déversé de nombreuses grâces sur les générations de pèlerins, sur l’Eglise et la
Sénégambie, d’année en années. Que d’ici le prochain jubilé, les générations proclament
bienheureuse, encore et encore, Celle qui a cru en la Parole de Dieu, et s’efforcent de
marcher à sa suite, sur les chemins de la foi. Amen !
† Théodore Adrien Cardinal SARR
Archevêque de Dakar.
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