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Alternance 10 ans politique: Constitution malmenée, instabilité gouvernementale

Le Sénégal a toujours été cité en exemple dans le cercle très restreint des pays démocratiques en Afrique. L’alternance du 22 mars 2000 est venue confirmer sa maturité démocratique. Ce qui a donné beaucoup d’espoirs aux Sénégalais. Mais dix ans après cette consécration l’attente n’est pas à la hauteur des espoirs placés sur un homme, le Président de la République, Me Abdoulaye Wade. Et s’il y a un plan sur lequel, Wade s’est illustré, c’est bien la modification de la Charte fondamentale qui a été retouchée une quinzaine de fois. Membre, du Forum civile et Professeur de droit constitutionnel, Abdoulaye Dièye donne son appréciation sur les dix ans de règne du Président de la République du Sénégal.



Alternance 10 ans politique: Constitution malmenée, instabilité gouvernementale
D’emblée le Professeur Dièye est convaincu que ceux qui ont pavoisé, ceux qui ont jubilé, quand il y a eu l’alternance en 2000, ont certainement eu mal quand ils ont lu un extrait d’un papier d’un journaliste burkinabé qui disait : « il est vrai qu’il a réalisé de grandes choses et que son bureau est plein de projets mais le seul projet qui l’a amené là où il est ne se porte pas bien et c’est la démocratie ».

Certes c’est un jugement terrible qui est porté sur la démocratie sénégalaise mais le Constitutionnaliste estime que l’on doit, quand même se rendre compte que les ruptures qui étaient attendues, les éléments de l’approfondissement de la démocratie, n’ont pas été au rendez vous.

Pour illustrer ses propos, le membre du Forum civile, qui a travaillé sur la Constitution parle de « cet infléchissement du présidentialisme qui était attendu et qui n’est pas au rendez vous. Selon lui « comme auparavant tous les pouvoirs sont concentrés entre les mains du Président de la République».
En plus, dans ce cadre «le Parlement ne joue pas véritablement son rôle, celui de contrôler l’action du Gouvernement et de mettre en œuvre les instruments (motion d’enquête, motion de censure, question de confiance) qui sont à sa disposition» selon Abdoulaye Dièye.
Le plus malheureux pour lui : « c’est qu’on continue cette soumission de la Constitution aux aléas des conjonctures politiques ou électorales ».

L’enseignant de droit constitutionnel pensait qu’il n’y aurait plus de manipulation de la Constitution parce que : « l’un des arguments qui a été brandi pour justifier le changement de la Constitution c’était justement que celle de 1963 était particulièrement dénaturée».
La vocation normale de la révision d’une constitution c’est l’approfondissement de la république, tranche M. Dièye. Alors que pour ces dix (10) ans de gestion : « Il y a eu plusieurs modifications de la constitution et l’on se rend compte que sur la quinzaine de modifications l’essentiel ce sont des modifications qui avaient simplement pour but de consolider le pouvoir du Président de la République ».

Démocratie malmenée…
Le Professeur Abdoulaye Dièye estime qu’on ne pas dire qu’il n’y a pas de démocratie au Sénégal. Toutefois la situation n’est pas aussi rose que le peuple sénégalais qui l'avait porté au pouvoir, le souhaitait. « Nous avons peut-être rêvé d’un Etat démocratique, d’un approfondissement du projet démocratique mais il faut le dire, ce n’est pas le cas aujourd’hui » a avoué M. Dièye. « Personnellement, naïf que j’étais, je pensais qu’avec cette alternance, qui était l’élément manquant dans cette démocratie (on a toujours eu la démocratie au Sénégal mais c’était une démocratie sans alternance, pour être qualifié de pays démocratique il faut passer par une alternance), nous n’aurions plus besoin de commission de supervision des élections parce que comme dans les grandes démocraties, le ministre de l’Intérieur, parce qu’il y a une culture démocratique, organiserait des élections sans problème. Leçon à retenir : « on se rend compte qu’on a fait un pas en arrière dans ce domaine parce que ce sont les querelles qu’on notait avant 2000 qui reviennent. Ce qui justifie ce point de vue du journaliste burkinabé Dieudonné Zougrana qui disait que le seul projet qui l’a amené là où il est ne se porte bien et c’est la démocratie ».

Instabilité chronique
En dix ans, Me Wade a utilisé six Premiers ministres : il s’agit de Moustapha Niasse, Mame Madior Boye, Idrissa Seck, Macky Sall, Aguibou Soumaré et Souleymane Ndéné Ndiaye. Soit un an et demi pour chacun.
Même si c’est la Constitution en son article 49 qui lui en donne la prérogative, le Professeur Dièye estime : « qu’il y a eu un phénomène d’instabilité chronique sur le plan gouvernemental. Ce qui n’est pas bon pour le suivi des projets, même par rapport à certains ministères ».
C’est le cas des ministères de la culture et de la Santé. Pour M. Dièye : « cette instabilité est telle qu’on se demande quel est finalement le but recherché car il y a des effets pervers de cette instabilité ministérielle de ministres et de chef de gouvernement ».

Charles Thialice SENGHOR

Vendredi 19 Mars 2010 - 02:01


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