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Arrestation d’élèves et d’enseignants : « qu’ils prennent leurs responsabilités, je ne vais pas les soutenir » (Ahmed Fall, professeur)

Les élèves de plusieurs localités du Sénégal ont manifesté leur colère cette semaine suite à l’arrestation de leurs camarades lors des manifestations jeudi dernier, jour du procès en diffamation opposant le leader du Pastef Ousmane Sonko. Ils ont boycotté les cours pour exiger leur libération. A Dakar, une centaine d’élèves ont sillonné hier jeudi, les rues de la capitale sénégalaise passant dans certains établissements scolaires pour faire sortir leurs camarades. Dans une interview accordée à PressAfrik, Ahmed Saloum Fall, professeur du Lycée John Fitzgeral Kennedy a dénoncé le comportement de ces apprenants. Selon lui, les arrestations « ne sont pas un motif prévalant pour aller en grève ». Car, a-t-il estimé, « si un élève participe à une manifestation politique et qui est interdite, qu’il l’assume. C’est la même chose pour un collègue enseignant ».



Plusieurs élèves ont envahi les rues de Dakar pour réclamer la libération de leurs camarades arrêtés lors des évènements du 16 mars dernier, en marge du procès en diffamation qui oppose Ousmane Sonko à Mame Mbaye Niang. Ils ont procédé au délogement des élèves de certains établissement du public et privé.

Professeur Ahmed Saloum Fall joint au téléphone par PressAfrik, a d’emblée regretté la situation. Car, a-t-il fait savoir, ces perturbations surviennent « au moment où allaient les choses, on était dans une atmosphère vraiment apaisée de suivre les enseignements apprentissage. Du coup, nous ne pouvons que la regretter surtout à pareil moment de l’année. On est juste à la fin du mois de mars ».
 
Avant d’enchaîner : « Cette situation, nous l’avons vécu au niveau du Lycée John Fitzgerald Kennedy. C’est vers les coups de 10 h que des élèves venus du lycée Blaise Diagne ont fait sortir leurs camarades. C’est pratiquement la même situation dans tous les autres établissements, Seydou Nourou Tall, les collèges au niveau de Grand Dakar, entre autres ». 
Le motif de la grève des élèves c’est un « faux brillant »

Pour exiger la libération de leur camarade en détention, les élèves du Lycée Blaise Diagne ont observé un arrêt des cours avant de déloger les autres qui sont dans les différents établissements scolaires. « C’est un faux brillant parce que ce n’est pas un motif prévalant pour aller en grève », a déclaré Pr Fall. 

Il a expliqué : « Comme on est à l’approche des vacances, parce que le vendredi prochain les élèves vont prendre leurs vacance de Pâques. Maintenant toute occasion est bonne pour pouvoir trouver un motif afin d'anticiper leurs vacances, c’est la rengaine, c’est la chanson qu'ils nous ont habituée ». 

Cependant, a-t-il soutenu, « ils sont dans leur droit de réclamer, si c’est avéré, à ce que leurs camarades qui sont dans les lieux de détention soient avec eux, parce que la place d'un élève n’est pas en prison ».  
 Qu’est-ce qu’un élève ferait dans une manifestions politique pour être arrêter? 

Le Pr au Lycée Kennedy se pose toutefois la question de savoir « Qu’est-ce qu’un élève ferait dans une manifestions politique pour être arrêter ? Car, selon lui, « Quand la situation est catastrophique, souvent les autorités des écoles jugent de libérer les élèves. Maintenant, quand on le libère, l’élève s’il est dans sa logique, il devrait paisiblement rentrer chez lui. Donc, s’il rentre chez lui, il ne devrait pas être arrêté. Qu’est-ce qu’un élève fait dans une manifestation politique pour être arrêter ? »

A l’en croire, les élèves doivent avoir la « posture du disciple » avec tout ce qu’il y a comme situation. « Comme ça s’embrase chaque jour davantage, à chaque fois que nous avons senti que les cours ne peuvent pas se réaliser comme il le faut, on leur demande de rester chez eux et de ne pas venir », a-t-il avancé. 
 

Arrestation d’élèves et d’enseignants : « qu’ils prennent leurs responsabilités, je ne vais pas les soutenir » (Ahmed Fall, professeur)
« Même une seconde perdue peut avoir des impacts »

Notre interlocuteur a aussi déploré les conséquences que ces grèves pourront avoir sur le quantum horaire. Selon lui, sachant tout ce qu’il y a comme nombre d’heures à réaliser durant une année scolaire," même perdre une seconde peut avoir des impacts". « Et c’est regrettable », a-t-il fulminé. 

Pr Fall a invité les élèves et enseignants arrêtés lors de ces manifestations à prendre leur responsabilité et à "assumer". « Si un élève est libéré et qu’il ne rentre pas chez lui et qu’il participe à une manifestation politique et qu’il est arrêté là aussi, il n’a qu’à assumer. C’est la même chose que pour un collègue enseignant », a-t-il soutenu.

« Si un enseignant prend positon dans la politique et va à une manifestation interdite et qu’on l’arrête, je ne vais pas le soutenir »

Par la même occasion, Pr Ahmed Saloum Fall s’est prononcé sur les mouvements d’humeur des enseignants qui, depuis lundi dernier, ont entamé une bataille de 72 heures contre les autorités étatiques pour « exiger » la libération de leurs camarades arrêtés dans le cadre des manifestations de jeudi dernier. 

« Il y avait des syndicats qui, dès le début de la semaine, observaient des mots d’ordre de grève qui avaient été suivis distinctement. Parce que les motifs avancés ont été diversement appréciés par les uns et les autres. Qu’est-ce qu’ils demandaient d’abord ? Ils disent qu’il y a des collègues de professeurs, d’enseignants qui ont été arrêtés. La question qui se pose, maintenant, selon notre interlocuteur c’est : est-ce qu’ils ont été arrêtés dans l’environnement de leur école ou bien dans quelque chose liée à leur pratique professionnelle ? Ou bien est-ce qu’ils ont été arrêtés dans un cadre politique ce qui est privé. Il fallait donc poser la question », a-t-il argué. Soulignant que : «Tout ce qui touche à un enseignant, ça me touche. Je suis solidaire à tout membre de ma corporation ».

Cependant, a-t-il avancé, « pour que mon soutien puisse lui être apporté, il faut que le collègue soit touché dans son domaine, dans sa profession. Là je ne me retiens pas pour le soutenir. Si maintenant un enseignant prend position dans la politique, comme moi qui vous parle je suis dans un parti politique (PDS, ndlr), et qu’il va à une manifestation où la loi l’interdit et qu’on l’arrête, je ne vais pas le soutenir ». 

Plusieurs élèves ont été arrêtés à Saint-Louis (nord), Thiès (70 kilomètres de Dakar),  Mbacké (centre) lors des manifestations du 16 mars dernier. Idem pour les enseignants. Bon nombre d'entre eux, membres de Pastef Les Patriotes, ont été interpellés. Si certains d'entre eux ont été envoyés en prison, d'autres par contre ont bénéficié d'un contrôle judiciaire .

Aminata Diouf

Vendredi 24 Mars 2023 - 13:36


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