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M23: Denis Sassou-Nguesso appelé à (re)mettre son costume de médiateur

Rencontre au sommet entre le président congolais Félix Tshisekedi et son homologue du Congo-Brazzaville Denis Sassou-Nguesso le dimanche 5 février à Oyo, fief de ce dernier situé à 400 kilomètres au nord de la capitale congolaise. Au programme de cet échange bilatéral : l’insécurité à l’est de la RDC, où le groupe rebelle du M23 multiplie les exactions, sur fond de soutien opérationnel du Rwanda voisin. L’occasion pour Denis Sassou-Nguesso de remplir de nouveau son rôle précieux de médiateur des crises africaines dans un contexte régional hautement crisogène. Un exercice dans lequel le président congolais a déjà excellé dans le passé.



M23: Denis Sassou-Nguesso appelé à (re)mettre son costume de médiateur
Tensions maximales et posture d’équilibriste pour Denis Sassou-Nguesso
Le torchon brûle depuis plusieurs mois entre la RDC et le Rwanda. Kinshasa accuse Kigali de soutenir — financièrement et militaire — le M23, un mouvement rebelle actif dans le Nord-Kivu, une région riche en matières premières sur lesquelles lorgne le Rwanda. Le M23, qui a lancé une offensive en mars dernier après plusieurs années de sommeil, serait d’ores et déjà responsable de la fuite de 30 000 Congolais en Ouganda et 36 000 déplacés internes. Un bilan humanitaire catastrophique, dénoncé par de nombreuses ONG, qui appellent à une solution d’urgence.

En août dernier, un rapport pour l’ONU, préparé par un panel de chercheurs indépendants, a mis le feu aux poudres. Le document, qui a largement fuité dans la presse, contenait des photos de militaires rwandais illégalement présents sur le territoire congolais et documentait l’usage d’armes rwandaises par les paramilitaires du M23. Des accusations graves, confirmées le 16 décembre par un nouveau rapport d’experts affirmant qu’un faisceau de « preuves substantielles » suggère l’intervention directe de l’armée rwandaise en faveur du M23. Plus de doute possible donc, malgré de nombreux mois de dénégations rwandaises.

Dans ce contexte, les organisations supranationales durcissent le ton envers Kigali. Le 31 décembre, l’Union européenne a officiellement appelé le Rwanda à « cesser de soutenir le M23 », tandis que plusieurs organisations non-gouvernementales exhortent l’Union africaine à reconnaître plus fermement l’implication rwandaise. À la mi-décembre, ce sont les États-Unis qui, par la voix du secrétaire d’État Anthony Blinken, ont exigé de Kigali un arrêt définitif du soutien militaire au M23, préalable nécessaire à l’application de l’accord de Luanda, signé en novembre dernier.  

Face à la persistance d’un dialogue de sourds infertile, l’implication du président de la République du Congo est souhaitée de longue date par les deux parties, alors que Denis Sassou-Nguesso entretient de bonnes relations avec Félix Tshisekedi et Paul Kagamé. Chose faite. Le 25 janvier, Denis Sassou-Nguesso a reçu Vincent Biruta, ministre des Affaires étrangères du Rwanda avant d’accueillir son homologue congolais le dimanche 5 février et de réaffirmer ses appels au dialogue et à l’apaisement entre les deux parties. La RDC est un terrain que le président du Congo-Brazzaville connaît particulièrement bien. Il s’était, en 2013, mobilisé en faveur d’un sommet entre Joseph Kabila et Paul Kagamé, associant aussi des membres de l’opposition congolaise et du M23.
Il doit aujourd’hui adopter une posture d’équilibriste pour ménager les deux camps, qui peinent à faire redescendre les tensions bilatérales depuis près d’un an. Un ballet diplomatique précieux pour la communauté internationale, qui profite de la proximité géographique et humaine entre les présidents congolais et rwandais et Denis Sassou-Nguesso.

Un rôle de médiateur dans lequel DSN a déjà été précieux
La médiation de l’homme fort de Brazzaville avait déjà, en 2020, permis d’apaiser les tensions entre Alpha Condé, l’ancien président guinéen et son homologue bissau-guinéen Umaro Sissoco Embalo, fermement opposé à la perspective d’un troisième mandat d’Alpha Condé, et de contribuer à normaliser les relations entre les deux pays.

En 2013, il s’était illustré sur le très épineux front centrafricain pour garantir les accords de paix de Libreville, supposés entériner la fin du conflit sanglant entre les musulmans de la Séléka et le parti au pouvoir. « J’ai dit à tous les protagonistes qu’à la moindre incartade je n’hésiterai pas à débarquer à Bangui » affirmait-il à l’époque. En 2016, il s’était, sur les suppliques de John Kerry, chef de file de la diplomatie américaine de l’époque, fermement engagé dans la crise politique RD-congolaise, en nouant des contacts précieux entre son pays et l’opposition de Kinshasa incarnée — entre autres — par Laurent Monsengwo, l’une des figures tutélaires de la très puissante église catholique de RDC, tout en maintenant une discussion active avec le président Kabila. Une implication qui permettra, après la crise politique de 2016, la tenue d’une élection présidentielle en 2018, sans Joseph Kabila et menant à l’élection de Félix Tshisekedi.

Denis Sassou-Nguesso s’implique aussi très fortement dans la crise libyenne, en tant que Président du Comité de haut niveau de l’Union africaine sur la Libye, un organisme promouvant la recherche d’une solution africaine à la crise politico-sécuritaire qui dure depuis la chute de Mouammar Kadhafi. Des interventions aussi variées que bien souvent décisives ayant valu au président congolais une réputation de fin diplomate sur le plan international, et de sage sur le continent. Décisive, l’intervention de DSN pourrait bien l’être une nouvelle fois, alors que « des milliers de personnes sont prises en étau » par l’avancée du M23, selon l’OHCA, l’organisme des Nations-Unies en charge du suivi de la situation dans la région, et que le risque d’escalade entre les deux États ne doit pas être sous-estimé.



Mardi 7 Février 2023 - 11:02


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