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Refonte partielle du fichier électoral, binationalité : l’expert Ndiaga Sylla tranche le débat

En marge d’un atelier de partage initié par le Gorée Institute sur le thème « Leadership et Prévention des conflits électoraux », l’expert en questions électorales, Ndiaga Sylla a apporté des précisions sur les questions d’ordre électoral qui alimentent les débats au Sénégal, notamment l’absence de consensus autour du vote du projet portant refonte partielle du fichier électoral et la question de la binationalité qui a fini par diviser la classe politique sénégalaise. Lors de cet atelier de trois jours qui a réuni une vingtaine de participants issus d’organismes de gestion des élections et d’organisations de la Société civile ouest africaine, M. Sylla a fait une présentation sur le Comité de veille et de suivi des recommandations issues de la mission d’audit du fichier électoral : mode alternatif, technique de prévention et de résolution des conflits.



Refonte partielle du fichier électoral, binationalité : l’expert Ndiaga Sylla tranche le débat
Manque de consensus autour du vote du projet portant refonte partielle du fichier électoral : « un faux débat »
« Il n’y a pas un manque de consensus autour du projet de loi relatif à la refonte totale. Du moins pour ce qui concerne le principe de la réforme. Je pense que l’ensemble des acteurs de la revue du code électoral se sont accordés sur la nécessité d’opérer une refonte. C’est peut-être maintenant au niveau des modalités qu’il y a quelques réserves, notamment l’étape de la confirmation et aussi sur la radiation. Mais, moi j’estime, en tant que praticien, qu’on ne peut pas faire une refonte du fichier sans pour autant procéder à la radiation d’office. Parce que l’objectif de cette refonte c’est d’avoir sur la base d’un noyau dur, à extirper du fichier ceux qui ne seront pas déterminés. Il est vrai maintenant que la particularité de cette refonte partielle c’est qu’elle se déroule alors qu’on n’a pas, à priori, défini un noyau dur. Parce qu’avant, les deux refontes partielles qui ont été opérées-la première en 1999, la seconde en 2000-c’était sur la base soit de votants, soit de personnes ayant retiré leurs cartes. Aujourd’hui, nous savons que la dernière élection générale remonte aux Législatives de 2012. Il y a 4 ans qui nous séparent. Est-ce que, aujourd’hui, nous pouvons prendre comme base le nombre de votants de cette élection, encore que le taux de participations à ces Législatives a été très faible. L’autre élément, c’est qu’il va falloir que l’électeur, quelle que soit d’ailleurs la forme retenue, se présente devant la commission. Mais il ne suffit pas seulement de se présenter à la commission. On se présente devant la commission pour formuler une demande soit d’inscription soit de radiation ou de modification. C’est pourquoi je considère comme un faux débat celui qui est entretenu autour de la confirmation. Parce que pour moi, la présence, comme le réclame l’opposition, vaut confirmation. Mais, faudrait-il aussi que quand on se présente, qu’on formule une demande pour être intégré ou pour qu’on procède à une modification »
Les principaux problèmes qui gangrènent l’organisation d’élections
« Ici (au Sénégal), le principal problème que nous avons est lié à la préparation matérielle des élections. C’est d’abord depuis la constitution du fichier qui constitue la base de tout système électoral. C’est pourquoi d’ailleurs ce genre de séminaire initié par Gorée Institute a tout son sens en ce sens qu’il permet une confrontation d’expériences pour qu’on puisse aller dans le sens d’user des modèles qui ont fait leurs preuves ailleurs sur la base d’une bonne pratique. Maintenant, il faut que les acteurs politiques, de manière générale, au-delà même de l’ensemble des acteurs, puissent comprendre qu’il y a des aspects électoraux sur lesquels les règles doivent être définies de manière consensuelle. Parce qu’à partir de ce moment, le jeu n’a pas encore démarré. Le jeu va démarrer le jour des élections, et à partir de ce moment, les citoyens sont libres de voter pour qui ils veulent.
D’ailleurs, ce n’est pas pour rien qu’on a garanti aujourd’hui qu’il y a un principe universel au secret de vote. Donc, on doit pouvoir nous entendre sur l’essentiel et le jour de la compétition, qu’on laisse les citoyens se décider.
La question de la binationalité : fruit du consensus du code électoral consensuel de 92
Je n’ai pas attendu cette présente revue pour l’évoquer. J’ai publié un texte, la dernière partie d’une contribution parce que j’ai vu le débat se poursuivre alors que la plupart des gens qui se sont prononcé sur la question soit n’ont pas compris, soit sont passés à côté. Parce que la vérité est que cette question de nationalité exclusive du candidat à l’élection présidentielle est le fruit du consensus du code électoral consensuel de 92. A l’époque, c’était l’article 23 de la Constitution. Aujourd’hui son pendant c’est l’article 28. D’ailleurs je confirme que ce consensus a été réitéré lors de la révision constitutionnelle de 2001. Parce qu’on a juste ajouté dans cette disposition de l’article 28 que le candidat à l’élection présidentielle doit savoir lire, écrire et parler couramment la langue officielle. L’autre rajout, c’est pour préciser le délai par rapport à l’âge. On a dit que le candidat à l’élection présidentielle doit avoir 35 ans et on a ajouté « au plus tard le jour du scrutin ». Mais tout ce qui venait avant et qui est relatif à la nationalité a été conservé. Donc le candidat à l’élection présidentielle doit jouir de ses droits civils et politiques et être exclusivement de nationalité sénégalaise. Aujourd’hui, je pense que tous les deux camps qui s’opposent sont unanimes sur le fait que le candidat à l’élection présidentielle doit être exclusivement de nationalité sénégalaise. Maintenant, la difficulté ou la divergence porte sur le moment où il devra, s’il est détenteur d’une autre nationalité, renoncer à cette nationalité.
Le législateur sénégalais n’interdit pas de facto à un binational d’être candidat
Déjà la disposition constitutionnelle reprise par l’article 114 exige que le candidat à l’élection présidentielle fasse une déclaration sur l’honneur par laquelle il déclare avoir de nationalité exclusivement sénégalaise. Maintenant, est-ce qu’il va falloir attendre le jour du dépôt des listes de candidature pour vérifier cela ? Est-ce qu’il ne faudrait pas par exemple envisager un délai ? Parce que pour moi, cela semble quand même absurde parce que nous ne sommes plus à cinq ans des élections. C’est quand même absurde de dire que qu’on veuille prévoir une clause de rétroactivité. Je trouve que c’est malsain dans un pays démocratique. Mais ce qu’il faut clarifier encore une fois c’est que jusque-là, le législateur sénégalais n’interdit pas de facto à un binational d’être candidat. Mais la condition qui est exigée est que quand il voudra postuler pour exercer la charge la plus haute de l’Etat, qu’il renonce à ses autres nationalités. Malheureusement, le débat a été mal posé. Aujourd’hui, ce projet, tel qu’il est posé-dire qu’il va falloir renoncer à cinq ans des élections-peut laisser croire que cela vise des individus. Or, je pense qu’on ne doit pas légiférer en pensant à des personnes. Je rappelle que la proposition a été émise pour la première fois en 2011 par l’actuel ministre de l’Education nationale Serigne Mbaye Thiam. Il pensait que comparativement à la question de la naturalisation-parce qu’en réalité un Sénégalais naturalisé on lui exige d’observer une certaine période pour pouvoir même être électeur-il était quand même cohérent de procéder de la même manière par une refonte. Et je suis tout à fait en phase avec lui parce qu’au fond, il revient au code électoral de préciser un certain nombre de dispositions constitutionnelles. Parce que dans le cadre du processus électoral, toutes les dates sont précisées. Même un magistrat ou un ancien gouverneur, s’il cède ses fonctions pour pouvoir être candidat, il faut qu’il le fasse six mois avant. Alors je pense que de ce point de vue aussi, c’est tout à fait normal qu’on puisse s’entendre sur une période quand même raisonnable. De toute manière, le débat ne peut pas être fermé et doit être dépassionné. Nous devons nous accorder sur une formule en ayant seulement en vue l’intérêt exclusif du peuple sénégalais. Parce que, encore une fois, la charge suprême a quand même un certain nombre d’exigences. Il s’agit de défendre la souveraineté et les intérêts de l’Etat du Sénégal.
 

Matar SENE

Vendredi 12 Août 2016 - 10:54


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