Dr Boubacar Dankoko, spécialiste en santé publique a analysé pour PressAfrik, le résumé du Communiqué quotidien du Ministère de la Santé et de l’Action sociale. Selon lui, le document est loin d’être rassurant et peut même cacher une réalité plus grave. Il explique pourquoi
Le Communiqué N°53 du Ministère de la Santé et de l’Action sociale du Sénégal, fidèle à la tradition établie depuis le début de l’épidémie, a résumé la situation du pays comme suit : « A ce jour, 479 cas ont été déclarés positifs dont 257 guéris, 06 décédés, 01 évacué, et donc 215 sous traitement ».
Quelle compréhension doit en avoir le citoyen sénégalais, pour envisager sa relation avec la maladie ?
Pour Dr Dankoko, il faut d’abord et sûrement s’inquiéter d’un seul cas positif, compte tenu des situations catastrophiques que la maladie a créées dans les pays d’où elle nous vient. Le rôle des médias, notamment de la télévision, est bien joué. Avec 479 cas, sans paniquer, les interventions pertinentes doivent être conduites, avec le maximum de rigueur, pour sécuriser la population. Mais plus concrètement, quelle lecture peut-on avoir de ces 479 cas du Sénégal, tels que présentés par l’autorité ministérielle ?
Ensuite, ce qui fait la gravité d’une épidémie, c’est surtout la survenue des décès. Plus les décès sont fréquents et rapides, plus l’épidémie est préoccupante. Quand la rapidité de la contagion s’y ajoute, la catastrophe est vite arrivée ! Que dit le Communiqué N°53 à ce sujet ? Sur 479 malades, 06 sont décédés, soit un taux (de létalité) de 1,2% (ou encore 12 pour 1.000).
Autrement dit, si la maladie se déclarait chez 15.000.000 de personnes, on pourrait enregistrer 180.000 décès ! Or la non observation des mesures barrières recommandées par les services du Ministère de la Santé et de l’Action sociale, expose tous nos compatriotes à cette maladie, et menace donc de mort près de 200.000 citoyens. Qui est sûr d’y échapper, dans ces conditions ? Ce pari est inacceptable, pense-t-il.
Enfin, la guérison est notée chez 257 cas (sur les 479), soit un taux de guérison de 53%. Plus de la moitié des malades ! C’est rassurant ! Mais il s’agit de malades hospitalisés dans les centres de traitement tenus par les agents du Ministère de la Santé et de l’Action sociale. La situation des malades non encore diagnostiqués, qui sont dans les maisons ou sur leurs lieux de travail, sans accompagnement thérapeutique éclairé, propageant le virus, est préoccupante. Ce qui nous permet de revenir sur la « signification » des 479 cas positifs du Communiqué N°53.
clarté et pertinence
Boubacar Dankoko, estime que le communiqué N°53 du Ministère de la Santé et de l’Action sociale aurait gagné en clarté et pertinence, en rappelant le nombre total de personnes suspectes et testées. Car c’est à ce nombre qu’il faut rapporter les cas positifs (malades de COVID-19) pour mesurer l’ampleur de la maladie dans notre pays : 479 positifs sur 1.200 suspects, c’est bien différent de 479 positifs sur 3.000 suspects !
« Chaque Communiqué donne, en effet, les résultats sur un échantillon (du jour) avec les nouveaux cas (nouvellement testés positifs) et le cumul de tous les cas depuis l’entrée de la maladie dans notre pays. Ce cumul des effectifs a un intérêt comptable, puis qu’il permet de chiffrer les besoins des services d’accueil (nombre de salles, de lits, de boîtes de médicaments, de seringues, de machines, de personnels, etc.). Il a également un intérêt psychologique, car il peut permettre d’émouvoir les citoyens et les autorités politiques, sans verser dans la panique (en parlant de centaines ou de milliers de malades ou de morts, plutôt que de pourcentages !). Ces deux aspects sont importants dans la gestion d’une épidémie, davantage lors d’un dépistage de masse qui permet de traquer le germe jusqu’au dernier malade ou porteur et de proclamer l’extinction de l’épidémie », explique l’Enseignant chercheur à l’Ucad.
Dans le contexte actuel où le recueil est fait sur des échantillons de tailles souvent très différentes, non rapporté au nombre de testés ou de suspects, le cumul des effectifs ne renseigne pas sur l’ampleur et sur l’évolution réelle de la maladie dans la population générale. Au Sénégal, tous les cas suspects ne sont pas testés. Ils ne se rendent pas dans les structures de Santé pour y subir le test. Ils appellent plutôt la Cellule d’Alerte qui fait apprécier (par les autorités sanitaires de la zone) la nécessité du test. Le choix fait, une équipe médicale se rend au domicile du suspect pour effectuer le test.
La crainte d’une sous-estimation de la présence du virus dans la population
L’incertitude sur les types d’échantillonnage utilisés par les équipes (aléatoires ou non aléatoires) et sur le contrôle des biais de sélection, nous fait craindre une sous-estimation de la présence du virus dans la population. Nous passons sous silence les porteurs sains, d’office exclus des tests. Sûrement tous les suspects n’appellent pas les services de santé; ceux qui le font ne sont pas tous testés ! Combien seraient déclarés positifs, si on multipliait par 3, par 4 ou par 10 le nombre de sujets testés, ou si on généralisait le test ? Impossible d’y répondre avec pertinence. C’est, peut-être, cette incertitude qui retarde l’élargissement du dépistage, par la peur de se retrouver avec un nombre de malades fragiles dépassant de loin les capacités d’accueil des services de soins ? Qui sait ?
En conclusion, le résumé du Communiqué quotidien du Ministère de la Santé et de l’Action sociale est loin d’être rassurant. Il peut même cacher une réalité plus grave, dit-il. Il ignore la situation des porteurs sains et des suspects exclus des tests. Or ces deux catégories constituent la grande inconnue de l’équation « cas communautaires ». La formule pour résoudre cette équation passera par un dépistage à grande échelle qui permettra de réajuster les mesures barrières, notamment avec un confinement ciblé et une utilisation plus rationnelle du Service d’Hygiène.
Le Communiqué N°53 du Ministère de la Santé et de l’Action sociale du Sénégal, fidèle à la tradition établie depuis le début de l’épidémie, a résumé la situation du pays comme suit : « A ce jour, 479 cas ont été déclarés positifs dont 257 guéris, 06 décédés, 01 évacué, et donc 215 sous traitement ».
Quelle compréhension doit en avoir le citoyen sénégalais, pour envisager sa relation avec la maladie ?
Pour Dr Dankoko, il faut d’abord et sûrement s’inquiéter d’un seul cas positif, compte tenu des situations catastrophiques que la maladie a créées dans les pays d’où elle nous vient. Le rôle des médias, notamment de la télévision, est bien joué. Avec 479 cas, sans paniquer, les interventions pertinentes doivent être conduites, avec le maximum de rigueur, pour sécuriser la population. Mais plus concrètement, quelle lecture peut-on avoir de ces 479 cas du Sénégal, tels que présentés par l’autorité ministérielle ?
Ensuite, ce qui fait la gravité d’une épidémie, c’est surtout la survenue des décès. Plus les décès sont fréquents et rapides, plus l’épidémie est préoccupante. Quand la rapidité de la contagion s’y ajoute, la catastrophe est vite arrivée ! Que dit le Communiqué N°53 à ce sujet ? Sur 479 malades, 06 sont décédés, soit un taux (de létalité) de 1,2% (ou encore 12 pour 1.000).
Autrement dit, si la maladie se déclarait chez 15.000.000 de personnes, on pourrait enregistrer 180.000 décès ! Or la non observation des mesures barrières recommandées par les services du Ministère de la Santé et de l’Action sociale, expose tous nos compatriotes à cette maladie, et menace donc de mort près de 200.000 citoyens. Qui est sûr d’y échapper, dans ces conditions ? Ce pari est inacceptable, pense-t-il.
Enfin, la guérison est notée chez 257 cas (sur les 479), soit un taux de guérison de 53%. Plus de la moitié des malades ! C’est rassurant ! Mais il s’agit de malades hospitalisés dans les centres de traitement tenus par les agents du Ministère de la Santé et de l’Action sociale. La situation des malades non encore diagnostiqués, qui sont dans les maisons ou sur leurs lieux de travail, sans accompagnement thérapeutique éclairé, propageant le virus, est préoccupante. Ce qui nous permet de revenir sur la « signification » des 479 cas positifs du Communiqué N°53.
clarté et pertinence
Boubacar Dankoko, estime que le communiqué N°53 du Ministère de la Santé et de l’Action sociale aurait gagné en clarté et pertinence, en rappelant le nombre total de personnes suspectes et testées. Car c’est à ce nombre qu’il faut rapporter les cas positifs (malades de COVID-19) pour mesurer l’ampleur de la maladie dans notre pays : 479 positifs sur 1.200 suspects, c’est bien différent de 479 positifs sur 3.000 suspects !
« Chaque Communiqué donne, en effet, les résultats sur un échantillon (du jour) avec les nouveaux cas (nouvellement testés positifs) et le cumul de tous les cas depuis l’entrée de la maladie dans notre pays. Ce cumul des effectifs a un intérêt comptable, puis qu’il permet de chiffrer les besoins des services d’accueil (nombre de salles, de lits, de boîtes de médicaments, de seringues, de machines, de personnels, etc.). Il a également un intérêt psychologique, car il peut permettre d’émouvoir les citoyens et les autorités politiques, sans verser dans la panique (en parlant de centaines ou de milliers de malades ou de morts, plutôt que de pourcentages !). Ces deux aspects sont importants dans la gestion d’une épidémie, davantage lors d’un dépistage de masse qui permet de traquer le germe jusqu’au dernier malade ou porteur et de proclamer l’extinction de l’épidémie », explique l’Enseignant chercheur à l’Ucad.
Dans le contexte actuel où le recueil est fait sur des échantillons de tailles souvent très différentes, non rapporté au nombre de testés ou de suspects, le cumul des effectifs ne renseigne pas sur l’ampleur et sur l’évolution réelle de la maladie dans la population générale. Au Sénégal, tous les cas suspects ne sont pas testés. Ils ne se rendent pas dans les structures de Santé pour y subir le test. Ils appellent plutôt la Cellule d’Alerte qui fait apprécier (par les autorités sanitaires de la zone) la nécessité du test. Le choix fait, une équipe médicale se rend au domicile du suspect pour effectuer le test.
La crainte d’une sous-estimation de la présence du virus dans la population
L’incertitude sur les types d’échantillonnage utilisés par les équipes (aléatoires ou non aléatoires) et sur le contrôle des biais de sélection, nous fait craindre une sous-estimation de la présence du virus dans la population. Nous passons sous silence les porteurs sains, d’office exclus des tests. Sûrement tous les suspects n’appellent pas les services de santé; ceux qui le font ne sont pas tous testés ! Combien seraient déclarés positifs, si on multipliait par 3, par 4 ou par 10 le nombre de sujets testés, ou si on généralisait le test ? Impossible d’y répondre avec pertinence. C’est, peut-être, cette incertitude qui retarde l’élargissement du dépistage, par la peur de se retrouver avec un nombre de malades fragiles dépassant de loin les capacités d’accueil des services de soins ? Qui sait ?
En conclusion, le résumé du Communiqué quotidien du Ministère de la Santé et de l’Action sociale est loin d’être rassurant. Il peut même cacher une réalité plus grave, dit-il. Il ignore la situation des porteurs sains et des suspects exclus des tests. Or ces deux catégories constituent la grande inconnue de l’équation « cas communautaires ». La formule pour résoudre cette équation passera par un dépistage à grande échelle qui permettra de réajuster les mesures barrières, notamment avec un confinement ciblé et une utilisation plus rationnelle du Service d’Hygiène.
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