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Crise dans les médias : le mal vivre des journalistes

A ce jour beaucoup d’organes de la presse sénégalaise sont dans une mauvaise passe. Cela au moment où le ministère de l’Information et les patrons de presse se penchent sur le partage des 500 millions de l’aide à la presse. De part et d’autre des mouvements de contestations sont organisées par des journalistes et techniciens de la communication pour de meilleures conditions de travail. Bon nombre d’organes sont touchés par cette vague de contestations : Le Matin, la radio Océan Fm, Le Soleil, etc.



Vue d'ensemble de la presse sénégalaise
Vue d'ensemble de la presse sénégalaise
10h à la radio Océan FM. Une ambiance bon-enfant règne dans cet organe niché à l’immeuble Pakao sis à l’avenue Bourgiba X Amitié II. En ce mardi matin, les journalistes sont à la tâche. Ils s’attèlent à l’élaboration de la grande édition de 12h. Cette occupation se déroule dans une atmosphère joviale. Certains ne manquent de s’esclaffer de rire. Un climat détendu qui cache mal les difficultés de cette entreprise où il est fréquent que le personnel observe un mouvement d’humeur ou arrêt de travail. «Dés fois, il n’y a même pas d’édition parce qu’on n’a pas d’essence ou assez de voitures pour aller en reportage» confirme l’un des membres de la section syndicale de Océan Fm, Yoro Mangara.

Cela ne semble pas être le seul manquement noté dans cette radio. En effet, dans cette station Fm lancée en mai 2006, aucun travailleur ne bénéficie d’un contrat de travail. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles le syndicat a déposé ce mardi même un préavis de grève. Ces travailleurs cherchent à être rétablis dans leurs droits.

Des journalistes sans matériel de travail

Les employés de Océan Fm réclament une logistique adéquate et suffisante (plus de moyens de transport et de carburant pour aller en reportage, du matériel d’enregistrement). Ils exigent, également, des cotisations sociales pour être en sécurité et dans les conditions d’exercer leur métier de journaliste.

Pour le moment, ils attendent l’expiration de leur préavis pour décider de la suite à donner à leur plate forme revendicative. Yoro Mangara précise, toutefois, qu’ils ont plusieurs fois reçu du promoteur, Pape Diop (maire de Dakar et président du Sénat) des promesses de régularisation de leur situation. La dernière négociation avec lui date d’il y a quelques jours avant la tabaski fêtée par la grande majorité des musulmans le 9 décembre dernier.

Des salaires en retard

Même cas de figure au journal «Le Matin». Les journalistes et membres de l’administration sont confrontés à des retards récurrents dans le paiement des salaires. Un arrêt de travail a, à cet effet, été observé le 10 décembre. C’est d’ailleurs à la suite de ce mouvement que l’infographiste, Mme Seck a été mise à pied. Ce qui a ainsi suscité le courroux de l’ensemble du personnel. Ils ont organisé ce lundi après-midi un sit-in pour dénoncer cette «sanction arbitraire». Ils ne démordent pas et envisagent de déposer ce mardi une lettre de revendication auprès de leur direction avec ampliation à l’inspection du travail pour «la levée immédiate de la sanction», indique la secrétaire générale de la section Synpics du Matin, Khadidiatou Guèye Faye.

«Le paiement à date échue de tous les salaires, la signature de contrats en bonne et due forme pour tous les travailleurs, des bulletins de salaires, la cotisation à la caisse de sécurité sociale», tels sont, entre autres, les différents points de leur plateforme revendicative. Et Mme Faye de préciser : «nous voulons en tout et pour tout le respect de la convention collective des journalistes». Elle précise, par ailleurs, que s’il n’y a pas une satisfaction de leurs revendications, la section Synpics du matin compte respecter le mot d’ordre du Synpics à savoir «arrêt de travail le 8 de chaque mois si les salaires ne sont pas payés ».

Par contre à la chaîne de télévision privée Canal info news la situation semble plus compliquée. Vingt journalistes et techniciens de l’information ont été tout simplement remerciés en novembre dernier. Depuis leur licenciement, ils courent toujours derrière le paiement de leurs droits. Ils disent « être victimes de licenciement arbitraire de la part de la direction générale ». Cette dernière soutient que ces travailleurs étaient liés à son organe de presse par des contrats de travail qui ont d’ailleurs expirés. L’affaire suit son cours au Tribunal du travail.

Le Synpics suggére un arrêt de travail

Pour mettre fin à tous ces malentendus entre patrons de presse et journalistes, dans une déclaration en date du 18 décembre 2008 la secrétaire générale du Synpics, Diatou Cissé Badiane, a invité les membres de son organisation à une cessation d’activités au cas où les salaires ne sont pas payés à la date indiquée plus haut. C'est d’ailleurs, ce que dispose la législation du travail en vigueur dans notre pays. Mais le CDEPS (Conseil des Diffuseurs et Editeurs de la Presse au Sénégal) qui vient à peine de naître tire la sonnette d’alarme.

Il lance un appel à tous les acteurs des entreprises de presse pour qu’ils soient plus responsables et fassent des efforts en considérant la situation économique du pays. Dans un communiqué son président Madiambal Diagne attire l’attention sur « la crise, de dimension internationale qui affecte de grands groupes de presse internationaux et qui ne manque pas d’avoir des répercussions fâcheuses pour nos jeunes entreprises ».

Déséquilibre dans le partage des ressources

Cette précarité des entreprises de presse suscite ainsi le débat sur leurs ressources financières. Beaucoup de patrons de presse comptent sur l’aide à la presse pour pouvoir relancer leurs entreprises parce que ne disposant pas d'assez de fonds. De l’avis du professeur en droits des médias Bouna Manel Fall, cela s'explique, entre autres, par « le déséquilibre dans le financement des organes de presse au Sénégal ». Il poursuit : « les organes de presse publics profitent beaucoup plus des ressources générées par les entreprises privées. Le statut de la RTS par exemple permet à cette chaîne publique de capter une grande partie des recettes de la publicité, des annonces et autres ressources financières provenant du privé ».

En somme au Sénégal, l’entreprise publique capture plus de 50% de ce marché et le reste se partage entre la multitude d’entreprises de presse qui existe dans le pays. Ce déséquilibre aggrave la précarité dans laquelle elles vivent. Pour le professeur en droits des médias, il faut éviter cette « précarité persistante des entreprises de presse par une distribution équitable des ressources et un retour à l’orthodoxie. C’est à dire financer les médias publics grâce aux redevances ».


Awa DIEDHIOU

Mardi 23 Décembre 2008 - 19:32


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