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Gabon: un an après le coup d'État, «les finances publiques restent sous tension»

Il y a un an, le général Brice Oligui Nguema renversait le régime d'Ali Bongo le 30 août 2023. En toile de fond, un contexte socio-économique délicat. L'inflation élevée des dernières années a rongé le pouvoir d'achat des gabonais touché par un fort taux de chômage. Des défis socio-économiques de courts termes qui s'ajoutent à des besoins structurels de plus longs termes. Entretien avec Thomas Melonio, le chef économiste de l’Agence Française de Développement (AFD).



RFI : Dans quelle situation se trouve l'économie gabonaise, un après le coup d'État ?
 
Thomas Melonio : On observe une certaine résilience de l'économie gabonaise. Donc il n’y a pas eu de choc négatif ou d'effondrement si certains avaient pu craindre ce scénario. Il y a une bonne résistance des principaux critères macroéconomiques. La croissance notamment est maintenue à un niveau compris entre 2 % et 3 %.
 
Je dirais aussi que la dette qui était déjà élevée s'est malheureusement maintenu à un niveau relativement important. Les finances publiques du Gabon restent sous tension. Il y a des attentes sociales très importantes dans le pays. Donc, on a observé à la fois une hausse des dépenses publiques et puis des recettes qui sont relativement mal orientées. Donc cela est un des défis majeurs du Gabon dans la période de transition dans laquelle nous sommes.
 
Il y a eu un rebond de production pétrolière dans le pays, est-ce une bonne nouvelle ?
 
Cela a été un soulagement sans doute pour les finances de l'État. Mais les défis structurels de la « gabonisation » de l'économie restent entiers. Quand on regarde les chiffres à la fois de la pauvreté - à peu près un tiers de la population - ou du chômage - quasiment un quart de la population -, on se rend compte que le la diversification, elle, n'a pas été à un rythme suffisant. Donc il y a un enjeu majeur là qui est vraiment un enjeu de long terme de développement, mais de réussir à ce qu'au-delà du pétrole, le nombre d'emplois puisse croître, notamment pour les jeunes gabonais.
 
Et comment faire plus de place à ces jeunes alors ?
 
Si on regarde notamment le point de vue des institutions internationales, il y a des messages quand même assez nets pour que, en particulier, les recettes qui sont qui viennent du pétrole, qui viennent du manganèse, voire qui viennent du bois, permettent plus de transformation interne, plus d'emplois pour les jeunes. Beaucoup de messages qui nous mobilisent à l’AFD, nous, on est très engagé dans les secteurs sociaux pour l'amélioration de la qualité de l'éducation, pour que cette éducation amène plus à des emplois. Il y a souvent encore au Gabon beaucoup de diplômés qui n'ont pas d'emploi. Alors en partie parce que les secteurs économiques ne sont pas assez diversifiés. En partie sans doute aussi puisque la qualité d'éducation ou son adaptation aux besoins de l'économie sont insuffisants. Vous voyez, il y a un travail qui doit être fait à la fois au plan sectoriel, mais aussi dans les grandes politiques publiques pour qu'elles soient plus efficaces.
 
Et sur l'année qui vient de s'écouler, est-ce que vous avez vu des signaux positifs dans ce sens ?
 
Je dirais pour l'instant, c'est un peu tôt pour le dire. On ne voit pas de modification majeure à ce stade-là. Je parle vraiment de défi à horizon 20 ou 30 ans.
 
Le FMI projette une dette qui pourrait atteindre près de 79 % du PIB d'ici à 2025. Quels sont pour vous les leviers selon vous pour lutter contre ce phénomène ?
 
On a beaucoup parlé de financements extérieurs, du FMI, de la Banque mondiale. Un pays se développe quand même d'abord par lui-même. C'est d'abord l'épargne des Gabonais qui doit être mieux utilisée par les banques pour financer l'investissement. Ce qu'on voit au Gabon aujourd'hui par exemple, c'est que le tissu des PME est assez peu développé. Et quand on regarde le crédit bancaire, des banques gabonaises prêtent aux PME, mais à des taux assez élevés, avec un niveau de risque assez important.
 
Il y a vraiment un enjeu de développement du système financier national pour que le pays se développe davantage, d'abord par ses propres ressources. Et que le tissu des PME qui est insuffisant, là, il y a un vrai potentiel, donc cela pourrait être une des pistes pour concrétiser la diversification qui est appelée dans les discours politiques, mais qui doit encore accélérer.

RFI

Samedi 31 Août 2024 - 01:36


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