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La Restitution des biens culturels africains : Macron face à l’histoire.



Le mandat d’Emmanuel Macron à la tête de la République française est sans doute l’un des meilleurs périodes de repentance de la France envers ses anciennes colonies particulièrement ceux de l’Afrique Noire. 

Après avoir déclaré à Alger en 2017 que « La colonisation fait partie de l’histoire française. C’est un crime, c’est un crime contre l’humanité, c’est une vraie barbarie. Et ça fait partie de ce passé que nous devons regarder en face, en présentant nos excuses à l’égard de celles et ceux envers lesquels nous avons commis ces gestes », il s’adonne corps et âme pour restituer le patrimoine culturel africain en Afrique dans le but de mieux pérenniser et améliorer les relations diplomatiques entre la France et les pays d’Afrique subsahariennes. Mais qu’a-t-on fait pour arriver à ce stade ? Macron a-t-il vraiment le choix de ne pas s’orienter vers cette politique de restitution des biens culturels africains ? Le combat pour la reconstruction du patrimoine culturel africain dispersé durant la période coloniale est-il récent ? Je crois que la réponse est non. En a croire Bénédicte Savoy « les premières revendications avaient été formulées sur le continent africain dès le lendemain des indépendances, lorsque, autour de 1960, dix-sept colonies françaises, belges, italiennes et britannique avaient acquis — parfois dans une violence extrême — leur indépendance politique ». Kwameh Nkrumah déclarait en 1962 devant l’assemblée générale des nations unies que « la marée montante du nationalisme africain […] constitue juste un défi aux pouvoirs coloniaux, qui doivent faire une restitution juste pour les années d’injustice et de crime commis à l’encontre de notre continent ». 

Donc on voit clairement que même au niveau international le combat pour la restitution des biens culturels africains a été initié par les africains eux-mêmes. D’ailleurs la toute première résolution des Nations unies sur la question de la restitution a été adoptée par 12 pays africains en 1973. C’est à travers cet acte que l’UNESCO prendra en main ce combat en mettant en place en 1978 un comité chargé de travailler sur la question. Il faut également retenir que la convention de l’UNESCO de 1970 a été mise en place à Paris particulièrement dans le 15ème à la maison de l’UNESCO mais la France va rester pendant presque deux décennies sans pour autant pouvoir ratifier la convention pour éviter uniquement de tomber sur la question de la restitution. Donc pourquoi Macron décide à un beau jour de restituer ce patrimoine français « inaliénable » dans leurs pays d’origines. C’est sans doute parce qu’il est conscient que les intérêts français sont en train d’être menacés en Afrique. Car il ne faut surtout pas oublier la vision capitaliste de l’Etat français que De Gaulle prononçait lors d’une conversation avec Clémentine Churchill au début du second guerre mondiale en disant que « les États n’ont pas d’amis, seulement des intérêts ». C’est cette vision que suit toujours le gouvernement français.
Apparemment ils n’ont toujours pas saisi cette assertion d’un de leurs aïeux Polybe qui disait de ne plus faire « l’ornement de votre patrie le malheur des autres ». 

Macron en 2017 en parlant sur la question de la restitution à Ouagadougou disait ceci « Nous somme orphelins en quelques sortent d’un imaginaire commun, nous souffrons d’un imaginaire qui nous enferme dans nos conflits, parfois dans nos traumatismes, d’un imaginaire qui n’est plus le vôtre, n’est plus le nôtre, et je veux reconstruire cet imaginaire commun et d’avenir […]. Le premier remède, c’est la culture, dans ce domaine, je ne peux pas accepter qu'une large part du patrimoine culturel de plusieurs pays africains soit en France ». Son idée de restitution se repose uniquement sur une reconstruction des relations diplomatiques entre la France et ses anciennes colonies qui n’est rien d’autre qu’une relation de dépendance. La marée montante de cette nouvelle génération africaine consciente des enjeux de l’heure a surtout été à l’origine de la déstabilisation de ces dites relations. Ce que Macron considère aujourd’hui comme étant un sentiment anti-français ce qui est archi faux. 

L’amplification du combat pour la restitution des biens culturels africains en Afrique depuis le début du siècle a surtout été l’un des facteurs essentiels qui a poussé Macron à s’orienter vers ce débat. Des mouvements citoyennes de la Diaspora à travers le Cran ( Conseil représentatifs des associations noires de France), le militantisme des conservateurs de musée, le vandalisme de certains jeunes africains dans les musées européens pour récupérer ce qui leurs reviennent de droit, l’action de la cinématographie ( Black Panther avec Hollywood), les demandes de restitution- des pays africains, la coopération internationale à travers l’Unesco sont tant d’activités qui endiguent le gouvernement français de rester bouche bée face à cette situation. 

Ce qui nous pousse à affirmer que Macron n’est que l’élu qui a eu la chance de coïncider avec cette période c’est comme Victor Schoelcher avec la question de l’abolition de l’esclavage ainsi que De Gaule avec la décolonisation. C’est pourquoi croire que Macron est à l’origine de vaste mouvement de restitution des biens culturels en Afrique c’est non seulement croire que Victor Schoelcher est celui qui a abolis l’esclavage en oubliant la fameuse victoire de Toussaint Louverture à Saint Domingue mais également que le Général De Gaule à libérer les pays de l’Afrique de l’Ouest. La France fera tout pour ne pas rompre ses liens avec l’Afrique parce qu’elle est persuadée que sans l’Afrique elle perdra complètement sa puissance au niveau mondial.

 
Par AAmadu Wuri Barri, Etudiant en Master Histoire Contemporaine à l’Université François Rabelais de Tours.


Vendredi 10 Mars 2023 - 18:35


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