
Au Sénégal, chaque entrée en fonction des membres de l'Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac) est précédée d'une prestation de serment. Il s'agit pour ces hauts fonctionnaires de l'administration sénégalaise de s'engager à servir dignement et loyalement la nation, et de garder surtout le secret des délibérations. Il ya toujours dans cet exercice solennel accompli devant le Chef de l'Etat, les représentants du Gouvernement, du Parlement et du Conseil économique social et environnemental, des rappels, des évocations, des remarques, des citations et observations qui montrent que cette institution est un instrument essentiel dans la création d’un ordre administratif accepté. C´est qui justement a conduit le président de la République, Macky Sall, à confier cette haute mission à des compatriotes qui portent des titres divers et sont à des positions différentes. Bénéficient-ils de la confiance justifiée du président de la République, leurs paroles et actes devraient être dictés par les exigences d'une intégrité républicaine. Avec la prestation de serment des membres de l’Ofnac, nous saisissons cette occasion pour revenir sur les origines religieuses de cette "grande promesse", souvent oubliée, et qui s'est incrustée aujourd'hui dans les mœurs, dans toutes les corporations et même jusqu'à l'Olympisme.
Du latin sacramentum, le serment est "une affirmation religieuse par laquelle Dieu est pris comme témoin de la sincérité des aveux ou promesses d'une personne". Le serment consiste en l’énoncé oral et ritualisé d’un texte, qui peut être écrit, et qui est compose d’une ou de plusieurs formules. Celles-ci énoncent les autorités invoquées (Dieu, les saints, les Evangiles), attestent la vérité d’une cause ou d’un témoignage, ou établissent, généralement pour un temps déterminé, les obligations des prestataires. Ecrit ou orale, la prestation de serment était codifiée, elle alliait aussi des gestes et s’appuyait souvent sur des objets. Il engage toute personne, en gage de foi, solennellement, de s'assurer une fidélité aux lois et règlements ou aux choses sacrées. Aujourd’hui la formule consacrée du conseil constitutionnel est : "Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution, de garder le secret des délibérations et de vote et de ne prendre aucune position publique, de ne donner aucune consultation sur des question relevant de la compétence du conseil" Par ses marques et fonctions, cette référence faite autrefois à la divinité constituait une caution hautement morale, un instrument de communication entre les hommes.
Dans l’Antiquité
Jadis, en Egypte pharaonique, les égyptiens eurent recours à cet usage pour donner plus de force à leurs écrits et engagements. D'où des traces de serments notées dans les actes juridiques de l'Ancienne Egypte, le serment d’Horus, de même que le serment de Panet et de son fils inscrit dans un papyrus ancien. Dans la Grèce antique, il est fait mention de la divinité du serment, Horicos, des serments amphictyoniques. Là aussi, il est signalé le serment de Platées prononcé en 479 av. J-C, quand les forces grecques alliées réunies à Béothie défirent les troupes de Mardonios, général de Xerxès. A Rome, la légende populaire évoque le serment de trois frères, les Horaces, prêts à recevoir leurs armes des mains du vieil Horace à qui ils promettent solennellement de vaincre ou mourir dans le combat qui les oppose aux frères albains. Charlemagne n'avait-il, pas imposé aux comtes un serment de fidélité ? Tout comme chez les Francs, de l'époque mérovingienne jusqu'en 751, chaque sujet devait jurer fidélité à leur Roi. Au Moyen Age, la prestation de serment était codifiée, elle alliait des gestes et des paroles normées, et s’appuyait souvent sur des objets et des écrits. Le parjure amenait la menace de la punition divine sur le pécheur, sans compter les châtiments temporels, notamment dans le contexte judiciaire ; il jetait aussi l’opprobre sur le coupable.
En Angleterre. Au XIIe siècle, rares sont les métiers qui bénéficiaient à Londres d’une véritable organisation. La charte accordée par Henry II aux tisserands en 1155 marque la première forme de reconnaissance officielle d’une association professionnelle corporative. Elle accorde a leurs membres un monopole sur l’exercice du tissage dans la cité en échange du paiement d’un droit annuel. Cependant, seuls deux autres métiers, les boulangers et les poissonniers, parvinrent à obtenir des privilèges similaires. En effet, les autorités royales et urbaines semblent avoir regardé dans un premier temps avec suspicion la création de groupements professionnels exigeant de leurs membres un serment de fidélité et de loyauté. Désignées péjorativement dans les sources par le terme conjurationes, les associations corporatives apparaissent comme une menace susceptible de porter directement atteinte aux prérogatives et à l’ordre établi.
En France, la pratique de la prestation de serment est vieille de plusieurs siècles. Fait remarquable, elle a survécu jusqu'à la chute de la monarchie. Sous l'Ancien Empire, les pairs de France, les Princes du Sang, les Ducs et Comtes, les grands officiers de la Couronne et les Gentilshommes prêtaient serment devant le Roi. Etait également exigé des capitaines et soldats (depuis Charles VI), des évêques et des membres de l'Université (ordonnance de 1471) de se comporter d'une saine manière. Après la Révolution, le serment politique se maintint sans éclipse jusqu'en 1848 et pratiquement jusqu'en 1870, où un décret du 5 septembre de la même année le supprima définitivement, excepté le régime de Vichy qui rétablit le serment du chef de l'Etat. Par contre en Angleterre, la pratique d’allégeance (Dath of Allegiance) s'est maintenue jusqu'à nos jours. Faut-il signaler que les hauts responsables du Gouvernement et de la Justice, ainsi que les députés prêtent un serment officiel, interdit de facto aux républicains irlandais élus en Ulster de siéger à Westminster. Avant de pouvoir prendre son siège à la Chambre des communes et de voter, le député dûment élu doit prêter serment. Aux États-Unis, la prestation de serment d’un élu est matérialisée par la main droite posée sur la Bible.
Concernant le serment professionnel qui tire sa spécificité dans le domaine technique, il ya le célèbre serment d'Hippocrate - le plus ancien médecin et chirurgien connu, vivait dans la Grèce de l’Antiquité - qui énonce les principes de déontologie médicale dont les Universités en sont encore les gardiennes traditionnelles. Ce rituel engage le futur médecin à exercer son art en respectant toutes les exigences morales ou éthique qui lui sont liées. Le "Serment des Apothicaires", serment des pharmaciens, également appelé serment de Galien, est prononcé par tout étudiant en pharmacie à la fin de la soutenance de sa thèse d'exercice. Le Serment de Bourgelat, du nom de l’homme qui a "imaginé" le métier de vétérinaire, est aux vétérinaires ce que le Serment d'Hippocrate est aux médecins. D'autres formes de serments sans spiritualité restent encore présentes dans la mémoire collective, tel l'ordre des architectes, avocats, magistrats et Jurés, de l’expert comptable, du notaire etc. Il ne faut pas oublier aussi le "serment de l’infirmière", le serment du Jeu de paume dont Mounier en fut l’instigateur. Il s'agit, rappelons-le, pour ce serment d'un engagement d’union pris le 20 juin 1789 à la salle du Jeu de paume, à Versailles, par les 578 députés du Tiers état, du clergé et de la noblesse lors des États généraux de 1789.
Ici en Afrique, la valeur symbolique de la prestation du serment reste liée à la politique. Une prééminence, lourde charge, à laquelle s'exercent exclusivement nos Chefs d'Etat qui s'engagent de se comporter d'une saine manière devant les affaires publiques. Par le caractère exceptionnel de sa formule consacrée et la solennité de son cérémonial, le serment politique s´identifie comme un droit légitime que leur offre les constitutions, de défendre les Institutions. Cette dimension est reflétée dans la place que le serment occupe dans les ouvrages de théorie politique, où il apparaît comme le moyen de lier ceux qui exercent des responsabilités d’ordre public leurs obligations au service du bien commun. C´est ainsi qu'au Sénégal, l'occasion nous a été donnée d'assister, pour la première fois, a "une prestation de serment" de ministres de la République. Quel a été, dans la conscience individuelle des ministres du gouvernement Soumaré, le particularisme de ce serment que leur avait été impose publiquement, à tour de rôle, le président Abdoulaye Wade ? Dans la confusion de notre esprit, nous avons un peu hésite entre le déclin du serment fidélité remplacé par un mode entièrement nouveau, un serment d’obéissance vassal montrant l'embarras de certains ministres devant l'attitude d'abord stupéfaite et les propos fortement teintes d'un président populiste. Autre grande première au Sénégal qui a retenu notre attention, la prestation de serment des agents ou "gardiens de la mémoire judiciaires du pays" du centre national des archives judiciaires. Pour ce qu’elles sont, les archives judicaires, c’est-ç-dire un noyau extrêmement sensible de la démocratie et de la bonne gouvernance, le lieu choisi pour cette prestation de serment eut lieu au tribunal régional de Louga.
Prêter serment c’est donc se lier. Il nous fallait bien comprendre cela et, en marge de son évolution historique et de sa pluralité, savoir aussi que la prestation de serment tire sa source dans une symbiose religieuse, culturelle, et traditionnelle même. Sous cet éclairage, il ne reste de cette coutume séculaire que des obligations, des recommandations de piété et le rappel des devoirs de loyauté liés bien entendu à la détention d’une charge publique. Ce à quoi, aujourd'hui, Mme Seynabou Ndiaye Diakhaté, nouvelle patronne de l'Ofnac, et ses collègues vont s’exercer.
Du latin sacramentum, le serment est "une affirmation religieuse par laquelle Dieu est pris comme témoin de la sincérité des aveux ou promesses d'une personne". Le serment consiste en l’énoncé oral et ritualisé d’un texte, qui peut être écrit, et qui est compose d’une ou de plusieurs formules. Celles-ci énoncent les autorités invoquées (Dieu, les saints, les Evangiles), attestent la vérité d’une cause ou d’un témoignage, ou établissent, généralement pour un temps déterminé, les obligations des prestataires. Ecrit ou orale, la prestation de serment était codifiée, elle alliait aussi des gestes et s’appuyait souvent sur des objets. Il engage toute personne, en gage de foi, solennellement, de s'assurer une fidélité aux lois et règlements ou aux choses sacrées. Aujourd’hui la formule consacrée du conseil constitutionnel est : "Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution, de garder le secret des délibérations et de vote et de ne prendre aucune position publique, de ne donner aucune consultation sur des question relevant de la compétence du conseil" Par ses marques et fonctions, cette référence faite autrefois à la divinité constituait une caution hautement morale, un instrument de communication entre les hommes.
Dans l’Antiquité
Jadis, en Egypte pharaonique, les égyptiens eurent recours à cet usage pour donner plus de force à leurs écrits et engagements. D'où des traces de serments notées dans les actes juridiques de l'Ancienne Egypte, le serment d’Horus, de même que le serment de Panet et de son fils inscrit dans un papyrus ancien. Dans la Grèce antique, il est fait mention de la divinité du serment, Horicos, des serments amphictyoniques. Là aussi, il est signalé le serment de Platées prononcé en 479 av. J-C, quand les forces grecques alliées réunies à Béothie défirent les troupes de Mardonios, général de Xerxès. A Rome, la légende populaire évoque le serment de trois frères, les Horaces, prêts à recevoir leurs armes des mains du vieil Horace à qui ils promettent solennellement de vaincre ou mourir dans le combat qui les oppose aux frères albains. Charlemagne n'avait-il, pas imposé aux comtes un serment de fidélité ? Tout comme chez les Francs, de l'époque mérovingienne jusqu'en 751, chaque sujet devait jurer fidélité à leur Roi. Au Moyen Age, la prestation de serment était codifiée, elle alliait des gestes et des paroles normées, et s’appuyait souvent sur des objets et des écrits. Le parjure amenait la menace de la punition divine sur le pécheur, sans compter les châtiments temporels, notamment dans le contexte judiciaire ; il jetait aussi l’opprobre sur le coupable.
En Angleterre. Au XIIe siècle, rares sont les métiers qui bénéficiaient à Londres d’une véritable organisation. La charte accordée par Henry II aux tisserands en 1155 marque la première forme de reconnaissance officielle d’une association professionnelle corporative. Elle accorde a leurs membres un monopole sur l’exercice du tissage dans la cité en échange du paiement d’un droit annuel. Cependant, seuls deux autres métiers, les boulangers et les poissonniers, parvinrent à obtenir des privilèges similaires. En effet, les autorités royales et urbaines semblent avoir regardé dans un premier temps avec suspicion la création de groupements professionnels exigeant de leurs membres un serment de fidélité et de loyauté. Désignées péjorativement dans les sources par le terme conjurationes, les associations corporatives apparaissent comme une menace susceptible de porter directement atteinte aux prérogatives et à l’ordre établi.
En France, la pratique de la prestation de serment est vieille de plusieurs siècles. Fait remarquable, elle a survécu jusqu'à la chute de la monarchie. Sous l'Ancien Empire, les pairs de France, les Princes du Sang, les Ducs et Comtes, les grands officiers de la Couronne et les Gentilshommes prêtaient serment devant le Roi. Etait également exigé des capitaines et soldats (depuis Charles VI), des évêques et des membres de l'Université (ordonnance de 1471) de se comporter d'une saine manière. Après la Révolution, le serment politique se maintint sans éclipse jusqu'en 1848 et pratiquement jusqu'en 1870, où un décret du 5 septembre de la même année le supprima définitivement, excepté le régime de Vichy qui rétablit le serment du chef de l'Etat. Par contre en Angleterre, la pratique d’allégeance (Dath of Allegiance) s'est maintenue jusqu'à nos jours. Faut-il signaler que les hauts responsables du Gouvernement et de la Justice, ainsi que les députés prêtent un serment officiel, interdit de facto aux républicains irlandais élus en Ulster de siéger à Westminster. Avant de pouvoir prendre son siège à la Chambre des communes et de voter, le député dûment élu doit prêter serment. Aux États-Unis, la prestation de serment d’un élu est matérialisée par la main droite posée sur la Bible.
Concernant le serment professionnel qui tire sa spécificité dans le domaine technique, il ya le célèbre serment d'Hippocrate - le plus ancien médecin et chirurgien connu, vivait dans la Grèce de l’Antiquité - qui énonce les principes de déontologie médicale dont les Universités en sont encore les gardiennes traditionnelles. Ce rituel engage le futur médecin à exercer son art en respectant toutes les exigences morales ou éthique qui lui sont liées. Le "Serment des Apothicaires", serment des pharmaciens, également appelé serment de Galien, est prononcé par tout étudiant en pharmacie à la fin de la soutenance de sa thèse d'exercice. Le Serment de Bourgelat, du nom de l’homme qui a "imaginé" le métier de vétérinaire, est aux vétérinaires ce que le Serment d'Hippocrate est aux médecins. D'autres formes de serments sans spiritualité restent encore présentes dans la mémoire collective, tel l'ordre des architectes, avocats, magistrats et Jurés, de l’expert comptable, du notaire etc. Il ne faut pas oublier aussi le "serment de l’infirmière", le serment du Jeu de paume dont Mounier en fut l’instigateur. Il s'agit, rappelons-le, pour ce serment d'un engagement d’union pris le 20 juin 1789 à la salle du Jeu de paume, à Versailles, par les 578 députés du Tiers état, du clergé et de la noblesse lors des États généraux de 1789.
Ici en Afrique, la valeur symbolique de la prestation du serment reste liée à la politique. Une prééminence, lourde charge, à laquelle s'exercent exclusivement nos Chefs d'Etat qui s'engagent de se comporter d'une saine manière devant les affaires publiques. Par le caractère exceptionnel de sa formule consacrée et la solennité de son cérémonial, le serment politique s´identifie comme un droit légitime que leur offre les constitutions, de défendre les Institutions. Cette dimension est reflétée dans la place que le serment occupe dans les ouvrages de théorie politique, où il apparaît comme le moyen de lier ceux qui exercent des responsabilités d’ordre public leurs obligations au service du bien commun. C´est ainsi qu'au Sénégal, l'occasion nous a été donnée d'assister, pour la première fois, a "une prestation de serment" de ministres de la République. Quel a été, dans la conscience individuelle des ministres du gouvernement Soumaré, le particularisme de ce serment que leur avait été impose publiquement, à tour de rôle, le président Abdoulaye Wade ? Dans la confusion de notre esprit, nous avons un peu hésite entre le déclin du serment fidélité remplacé par un mode entièrement nouveau, un serment d’obéissance vassal montrant l'embarras de certains ministres devant l'attitude d'abord stupéfaite et les propos fortement teintes d'un président populiste. Autre grande première au Sénégal qui a retenu notre attention, la prestation de serment des agents ou "gardiens de la mémoire judiciaires du pays" du centre national des archives judiciaires. Pour ce qu’elles sont, les archives judicaires, c’est-ç-dire un noyau extrêmement sensible de la démocratie et de la bonne gouvernance, le lieu choisi pour cette prestation de serment eut lieu au tribunal régional de Louga.
Prêter serment c’est donc se lier. Il nous fallait bien comprendre cela et, en marge de son évolution historique et de sa pluralité, savoir aussi que la prestation de serment tire sa source dans une symbiose religieuse, culturelle, et traditionnelle même. Sous cet éclairage, il ne reste de cette coutume séculaire que des obligations, des recommandations de piété et le rappel des devoirs de loyauté liés bien entendu à la détention d’une charge publique. Ce à quoi, aujourd'hui, Mme Seynabou Ndiaye Diakhaté, nouvelle patronne de l'Ofnac, et ses collègues vont s’exercer.
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