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Prévisions FMI: « la contraction de la croissance à 0,7 %, un échec de la politique de résilience économique du gouvernement », selon deux experts

La mission virtuelle menée par le fonds monétaire international (Fmi) a confirmé une contraction de 0,7 du PIB national pour cette année avec des incertitudes quant à la mobilisation des ressources programmées. Ce faisant, elle confirmait les prévisions données par le ministre de l’Economie et du Plan, M. Amadou Hott. Pour commenter ces prévisions, le « Témoin quotidien » est allé à la rencontre des économistes Meissa Babou et Mansour Samb qui estiment que cette contraction de la croissance à 0,7 % n’est rien d’autre qu’une illustration de l’échec de la politique de résilience économique mise en place par le Gouvernement.



Prévisions FMI: « la contraction de la croissance à 0,7 %, un échec de la politique de résilience économique du gouvernement », selon deux experts
« L’économie sénégalaise a été durement touchée par la pandémie de Covid-19 : il est maintenant prévu que le Pib réel se contractera de 0,7 % cette année, du fait de la pandémie et des mesures strictes d’endiguement qui ont entraîné des perturbations de l’activité économique plus importantes que prévu », a déclaré Mme Deléchat, qui dirigeait une mission virtuelle menée du 9 au 18 septembre 2020 du Fonds monétaire international (Fmi) sur la situation économique du Sénégal.

Une révélation qui a sonné comme un coup de grâce d’une économie longtemps à l’agonie. Mais si, pour les uns, la contraction annoncée relève d’un secret de polichinelle, l’économiste Meissa Babou, lui, dit s’être attendu à un tableau moins sombre. Car certes, selon lui, à l’image de tous les pays, la covid19 a fait des dégâts, au Sénégal, il n’y a jamais eu de confinement strict. Même si on a noté l’arrêt total des activités des secteurs de l’hôtellerie, du tourisme et de la culture, on pouvait quand même espérer mieux soutient-il. Ce « dans la mesure où l’essentiel des centres de production étaient en activité comme les banques, plus généralement le système financier, les télécoms, les mines et, pour une grande partie, le commerce. Donc si on ajoute à ces activités un bon hivernage, on était en droit de s’attendre à mieux », estime d’emblée l’économiste.

D’après Meissa Babou, cette chute vertigineuse de notre croissance révèle une fragilité de notre économie parce que nous n’avons pas une économie à caractère industriel capable de rebondir dans de brefs délais en cas de récession. Quant aux incertitudes émises par le Fmi sur la mobilisation des ressources programmées par l’Etat et concernant le budget 2020, l’économiste s’est inscrit en droite ligne de la projection de l’institution financière. « On peut se fonder sur le marasme économique et une récession dont la reprise est incertaine. Pas mal d’entreprises sont aujourd’hui en agonie. Et 40 % des PME ont fermé leurs portes tandis que 27 % des entreprises formelles sont quasiment à terre. Ce qui fait que les recettes fiscales et douanières espérées seront fortement affaiblies. Si on sait que le Sénégal n’est plus en faveur d’un endettement, on peut s’imaginer que le budget 2020-2021 risque d’être très corsé », a analysé l’enseignant à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.

Une situation qui, aux yeux de l’économiste, trouve son explication dans les failles de la politique de résilience mise en place par le gouvernement. en effet, souligne Meissa Babou, les subventions dégagées par l’Etat ont été extrêmement faibles. « Si on prend d’ailleurs l’exemple du soutien apporté à la Culture, on a vu des acteurs, dont les activités ont été fortement impactées par la pandémie, recevoir des montants dérisoires de l’ordre de 100.000 FCFA. Concernant certaines entreprises, comme les écoles privées touchées de plein fouet, après un appui global de 3 milliards, aucun de ces établissements n’a reçu l’équivalent d’un million de francs de subvention. Ce alors que pendant 6 mois ces entreprises étaient aux arrêts. L’Etat a fait ce qu’il pouvait mais ça n’a pas été suffisant au regard de l’ampleur des dégâts économiques occasionnés par la pandémie », soutient Meissa Babou qui alerter donc sur les risques de lendemains économiques incertains.

Même si le Fonds monétaire international a prédit un rebondissement de la production en 2021 avec une croissance supérieure à 5 %, l’économiste se montre dubitatif. « Ce n’est même pas possible de sauter d’une croissance économique qui s’est contractée de 0,7% à une croissance supérieure à 5% en l’espace de 6 mois », rétorque-t-il. M. Babou. a l’en croire, en effet, le premier semestre de 2021 est presque perdu. « Car, en quelque sorte, c’est la moitié de cette année qui sera chargée du redémarrage des activités. Cependant, si on fait des efforts énormes durant le premier semestre de l’année 2021, on pourra caracoler pour se retrouver avec une croissance d’environ 3 %. Sinon, c’est seulement à partir de 2022 que nous pourrons nous remettre de cette récession si toutefois le pays ne fait pas face à d’autres chocs », relativise l’enseignant à la Faculté des sciences économiques et de gestion de l’Ucad.

Mansour Samb, économiste et chercheur : « Cette crise doit pousser l’Etat à revoir sa politique économique »
Pour l’économiste et chercheur Mansour Samb, la crise économique que traverse notre pays a été accentuée par une politique publique qui ne valorise pas les entreprises nationales. « Elle a trouvé les entreprises sénégalaises dans de gros problèmes. Pendant 7 ans, on n’a fait que favoriser et travailler avec les entreprises étrangères. Ce n’est que lorsque la pandémie a commencé ses effets négatifs sur l’économie nationale que le gouvernement a jugé nécessaire de débloquer 200 milliards, lesquels, au finish, n’ont même pas servi aux entreprises du pays comme il le faut. Parce que les banques ne leur ont pas permis d’accéder à ces fonds faute de garanties », estime Mansour Samb.

Selon lui, la relance des entreprises locales est la meilleure option pour sortir du gouffre économique. a l’en croire, les 60 milliards débloqués par l’Etat du Sénégal dans le cadre de l’agriculture peut avoir un impact considérable dans la production de l’arachide et de certains produits comme les céréales. mais, d’après lui, étant donné que la Sonacos ne fonctionne pratiquement plus, cette subvention risque de profiter plus aux entreprises chinoises qui vont tous amasser et valoriser les produits chez eux. « Le chef de l’Etat vient de finir une tournée économique à l’intérieur du pays avec des visites dans les champs agricoles. L’hivernage s’annonce bon et on peut avoir des records de production cette année. Mais tout ceci n’aura d’impact que si l’Etat arrive à comprendre que l’industrialisation est la base de tout développement. Il faut qu’il y ait une création de valeur ajoutée », suggère le chercheur Mansour Samb. mais attention, tempère l’économiste Meissa Babou, miser sur l’agriculture est important mais insuffisant.

Car, selon lui, l’économie, c’est une chaine, une vision globale. « Aujourd’hui, il n’y a pas d’agro-industrie ni d’agro-business. Il y a de l’agriculture mais, au bout de la chaine, les unités de transformation font défaut dans notre économie. Et ce sont des mécanismes qui ne se décrètent pas », soutient M. Babou.

Le Témoin


Jeudi 24 Septembre 2020 - 12:34


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