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Processus de paix plombé: Ziguinchor renoue avec le crépitement des armes

Résultat d’un processus de paix « plombé » : la capitale régionale du même nom, Ziguinchor renoue-t-elle avec la violence armée après l’accalmie observée ces derniers temps dans un conflit qui ensanglante toute la Casamance depuis 27 ans maintenant ? Des échanges de tirs entre des éléments supposés appartenir au Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (Mfdc) et des militaires dans le secteur de Kassana dans l’arrondissement de Nyassia ont duré 10 heures, de 11 heures à 22 heures le vendredi dernier, confient plusieurs Ziguinchorois joints au téléphone qui vivent ainsi sous la hantise des mauvais jours du conflit.



Processus de paix plombé: Ziguinchor renoue avec le crépitement des armes
Simple incident de parcours ou l’expression achevée d’une trêve rompue à cause d’un processus de paix enlisé et d’une stratégie de pourrissement qui semble être adoptée par les autorités sénégalaises dans cette affaire ? Ziguinchor renoue-t-elle avec le crépitement des armes ? Les échanges de tirs, entre des militaires et des éléments inconnus supposés appartenir au Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc) le vendredi dernier à Kassana dans l’arrondissement de Nyassia, ont replongé en tout cas les Ziguinchorois dans la hantise des lendemains incertains qui rythment leur quotidien depuis 1982. Ils ont ranimé de tristes souvenirs enfouis chez bon nombre d’entre eux qui, depuis plusieurs années maintenant, n’avaient pas vécu pareille situation où les obus tombaient sur Goumel ou dans les frondaisons de Kandialan. On faisait en effet la « guerre » vendredi dernier dans les alentours immédiats de leur cité, ont-ils constaté.

Démarrés sur les coups de 11 heures dans le secteur de Kassana dans l’arrondissement de Nyassia à quelque six km de Ziguinchor ont rapporté des témoins depuis la capitale méridionale du pays, les affrontements se sont poursuivis jusqu’au-delà de 22 heures et ce jusque dans les alentours immédiats de la ville. Dans les quartiers périphériques, Lindiane, Grand-Yoff, Djibélor, ces tirs ont provoqué la panique chez les habitants, obligé de se terrer chez eux. Selon plusieurs témoins, de nombreux fidèles n’ont pas pu terminer leurs prières du soir dans les mosquées.

Si pour l’heure aucun bilan n’est disponible des deux côtés, des proches du Mfdc qui jubilent en avançant que « nos éléments ont pourchassé les militaires jusqu’à Ziguinchor », assurent que les affrontements ont forcément causé mort d’homme sans en apporter la preuve. Du côté militaire, on rigole de cette fanfaronnade et l’on affirme « que le Mfdc n’a aucun moyen pour gêner nos gars ».

Selon des experts militaires, qui s’étonnent même de la durée des affrontements tels que rapportés par diverses sources, « le Mfdc n’est pas en mesure de supporter un siège de l’armée encore moins de l’attaquer. Ce qui se passe et généralement c’est cela qui se passe, une patrouille peut rencontrer par hasard un groupe d’individus armés qui tirent dans le tas avant de chercher à se replier ». Pourquoi les habitants de Ziguinchor entendaient-ils tirer aux alentours de leurs quartiers ? « A cette période de l’année, avec l’hivernage, les cours d’eaux qui se remplissent, la forêt touffue, les échos portent loin. On a l’impression d’entendre plusieurs coups de feu tout prêt quand un seul est tiré à cause des relais d’échos ». Démonstration technique qui n’agréait nullement les Ziguinchorois pour qui, des échanges de tirs aussi nourris entre les deux camps n’ont pas été entendus dans leur ville depuis plus de deux ans. Jusque-là seuls de petits accrochages entre militaires et des éléments armés étaient signalés dans le département de Bignona. Accrochages à quoi l’on pouvait ajouter des braquages attribués au Mfdc et circonscrits encore dans la même zone qui avaient quand même fait quelques victimes civiles.

Parti en patrouille vendredi matin, un détachement militaire aurait riposté à une attaque d’éléments inconnus supposés appartenir au Mfdc, selon une source militaire, renseigne une dépêche de l’Agence de presse sénégalaise (Aps) du jour. Selon la même dépêche, les affrontements auraient duré de 13 heures jusqu’au-delà de 20 heures. L’avion militaire, le rallye guerrier, a même survolé la zone de combats. Selon des Ziguinchorois joints au téléphone depuis Dakar « on s’est plutôt battu de 11 heures à 22 heures et même au-delà ».

La trêve rompue ?

Globalement depuis les signatures médiatisées de l’accord dit de paix en décembre 2004, il régnait une relative accalmie en Casamance renforcée par la disparition de l’Abbé Diamacoune Senghor, le prélat irrédentiste de Ziguinchor chef historique et emblématique du Mfdc, ainsi que l’affaiblissement notoire de Salif Sadio le chef de guerre de Baraka Mandiouka à la lisière de la Guinée-Bissau voisine. Même si celle-ci était souvent perturbée par des accrochages entre éléments armés inconnus et les forces de sécurités et/ou des braquages sur certains axes des Nationales qui desservent la région et exactions contre des villageois isolés. Une situation qui certainement a amené l’Etat central à adopter une stratégie de pourrissement face à un Mfdc en manque d’unité, même si ces représentants réfutent cette thèse.

Pour certaines « colombes » du Mfdc excédées par la politique d’expectative et de pourrissement adoptée depuis un certain temps du côté de Dakar, « les autorités sont les seuls responsables de cette recrudescence de la violence. Elles se trompent lourdement en pensant qu’Atika (la branche armée du Mfdc) s’est désagrégée. La preuve. Il est grand temps de réactiver honnêtement le processus de paix sinon cela risque de repartir et nous qui militions pour une solution heureuse de la crise serons vite largués », confie un Daniel Diatta amer. Il soutient par ailleurs, que Jean Marie François Biagui dont on dit qu’il a été évincé par César Atoute Badiate est toujours le Secrétaire général du Mfdc jusqu’au prochain congrès et « s’il n’est pas reconduit en ce moment là, il cédera la place à quelqu’un d’autre parmi les frères. Mais aujourd’hui, c’est lui le Secrétaire général du Mfdc jusqu’à nouvel ordre. César n’y peut rien du tout. Il est qui même César pour oser prendre de telles décisions, lui qui se cache encore à Kacheu en Guinée-Bissau ».

Pour Daniel, fervent militant pour la paix dans sa région, il est grand temps que les « négociations reprennent sérieusement ». Son frère de « camp », Kamougué Diatta ; l’ancien commandant en chef du front nord du Mfdc de renchérir, « le gouvernement bloque le processus de paix pour on sait quelle raison ? » Ce que les deux hommes ne disent pas, mais ne le pensent pas moins, c’est le fait que l’on semble également opter pour la politique de l’argent dans cette affaire. Ceux qui ont compris et ont découvert le filon s’en mettent plein les poches sans que cela n’apporte aucun avancement dans le processus de paix ou dans la résolution de la crise casamançaise.

On apprenait ainsi que César Atoute Badiate de Kassolole qui s’est autoproclamé général en chef du Mfdc depuis qu’il a aidé le général Bissau guinéen, le regretté Tagmena We à déloger Salif Sadio de l’Etat major de Baraka Mandiouka, était récemment incognito à Dakar à la suite des fameux sages pour être reçu par une grande autorité. Agissement qui n’aide pas à débloquer une situation qui perdure et plombe le devenir d’une région.

Le chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade avait pourtant salué le retour de la paix en Casamance et invité lors d’une visite en février dernier dans la capitale du Sud, les « fils qui sont encore dans le maquis ou à l’étranger à venir participer à cette vaste et exaltante entreprise de reconstruction en cours dans la région ». A-t-il été entendu ? Rien de moins sur.


Madior Fall (Sud)

Lundi 24 Août 2009 - 10:48


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