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Tensions Finances publiques: les fortes recommandations de la Société civile à l’Etat

Economistes et acteurs de la société civile se sont livrés hier à un véritable diagnostique de la gestion des finances publiques sous le prisme du plan de relance économique de près 15000 milliards concocté par l’Etat du Sénégal en ce temps de crise sanitaire. Au cours de cette rencontre, il est ressorti d’une étude consacrée à « l’impact de la covid-19 sur le budget » que techniquement, ce plan est en phase de se heurter à son cout élevé ainsi que les tares du système budgétaire national. L’étude a révélé deux enseignements majeurs. D’abord des finances publiques tendues et ensuite les efforts de relance de l’économie déployée par l’Etat. La Société civile est arrivée à de fortes recommandations pour relancer l’économie.



 Comme l’autopsie d’un corps quasiment inerte ! L’économie du Sénégal à travers la gestion des finances publiques a été soumise hier à l’analyse des spécialistes en la matière. Lors d’une rencontre tenue à cet effet, par l’ONG 3D en partenariat avec Oxfam, il était question de livrer les résultats issus de l’étude portant sur «l’impact de la covid-19 sur le budget » dans ce contexte de relance économique planifiée par le gouvernement pour amortir le choc engendré par la crise sanitaire. Agrégé de droit public et directeur du centre d’étude et de recherches en ingénierie juridique et financière, Abdou Aziz Kébé, qui a dirigé l’étude a d’emblée pointé les limites du plan de relance proposé par l’Etat du Sénégal.

Dans ce sillage, l’expert a évoqué, comme entre autres motifs, une dégradation des indicateurs budgétaires dans laquelle il révèle un déficit de plus de 743 milliards en 2021. Un paramètre qui le fait noter d’ailleurs que la dette va gonfler. « Le Sénégal va atteindre bientôt le plafond communautaire de 70%. Ce qui n’est pas lié au régime spécifique de la dette. C’est une question qu’il faut analyser avec beaucoup de prudence. En 2000, le Sénégal avait un taux de 77% d’endettement et aujourd’hui, on frôle les 70%. Cela montre aussi que nous avons des difficultés », a-t-il expliqué en décortiquant les données issues de l’étude sur l’impact de la covid19 sur le budget.

Se fondant aussi sur les deux facettes du budget dans les prévisions pour 2021, (3090 milliards de F CFA en termes de dépenses et 3833,9 de recettes), M Kébé fait savoir que le ratio de l’encours de la dette intérieure et extérieure rapporté au PIB nominal, ne devrait pas excéder 70%. Par rapport au montant annoncé dans le cadre du fond Force Covid19, l’économiste est resté aussi dubitatif. Ainsi, techniquement, s’est –il interrogé, est ce que le Sénégal a les capacités de mener sa politique de relance dont le montant annoncé égale les 7% de son PIB. « Par ailleurs on voit que la contribution attendu du secteur privé, y compris les partenaires publics de développement reste faible avec de l’ordre de 39%. Or la contribution du secteur privé est de 70% dans le plan de relance du Ghana et 85% dans celui de la relance du Maroc », a remis en cause le directeur du centre d’étude et de recherches en ingénierie juridique et financière.

Les trous dans le grenier du pays
L’autre aspect qui ressort dans la restitution de l’étude menée sur l’impact de la pandémie sur les finances publiques, fait aussi état de l’évaporation de centaine de milliards au détriment de l’Etat du Sénégal. Selon Abdou Aziz Kébé, il s’agit d’une perte énorme de ressources due à des exonérations fiscales estimées à plus de 900 milliards de F CFA.

Une autre limite de la relance proposée par le gouvernement et qui permet d’avoir des réserves sur la situation des populations, dit –il. L’expert de poursuivre son diagnostic : « L’autre limite c’est que pour financer un tel plan, il faut avoir des ressources. Et la direction générale des Impôts et Domaines considère que si on prend 6 millions contribuables potentiels, il n’y a que les 500 milles qui paient leurs impôts. Cela veut dire que nous avons des difficultés en termes de mobilisation de ressources fiscales. Ce qui veut qu’on n’a pas assez d’argent. Tout au moins, le potentiel fiscal n’est pas suffisamment pris. Du coup, quand on n’a pas du potentiel fiscal, ou que vous ne l’exploitez pas, votre pression fiscale est faible ; 16% alors que le minimum international est de 30% ».

En ce qui concerne le budget programme, M Kébé argue que son impact sur les finances publiques est loin de se faire ressentir sur la marche du pays. Ce justifie l’expert, « en 2020, c’est 129 programmes qui étaient prévus et 142 en 2021. Mais cette année, l’Etat dit officiellement qu’il a des difficultés dans ses programmes à cause de la pandémie. Or, depuis 2016, l’entrée en vigueur initiale de ce programme a été plusieurs fois reportée. Aujourd’hui, il y’a une zone d’incertitude autour de l’application du budget programme qui est pourtant une grande réforme des finances publiques pouvant mener vers l’émergence ».

Précarité sociale
Toujours d’après l’économiste qui exposait son étude critique sur les finances publiques face à la pandémie, le plan de relance contient beaucoup d’insuffisances. Un faux pas qui, selon lui, est loin de faire sortir le pays du gouffre. « D’abord nous avons noté que les dépenses sociales sont toujours faibles. Si on prend l’exemple du budget consacré au ministère de la Santé (192 milliards) et celui de la Justice dont le ratio avec le budget général tourne autour de 1%. Malgré les bons importants du gouvernement en termes de couvertures et de programmes d’accès à l’eau, cette situation montre clairement une idée de la précarité sociale qui est réelle dans ce pays », a exposé M Kébé qui ajoute le fait que les collectivités territoriales ne sont pas véritablement prises en compte.

Car, a t- il démontré, « si on prend toutes les ressources de ces collectivités, ça tourne autour de 200 milliards. Leur poids sur l’économie est très faible ».

Les recommandations de la Société civile
En termes de relance, il a été retenu par la Société civile 10 recommandations à l’endroit de l’Etat. On peut retenir entre autres que l’Etat doit arriver à avoir une politique de restriction du déficit budgétaire qui est de 743 milliards, de pouvoir surveiller l’endettement public qui atteint presque 70 pour cent, de renforcer la protection sociale pour les groupes vulnérables, de prendre en compte sérieusement les collectivités territoriales dans le plan de relance puisqu’elles ont participé à l’effort budgétaire pour lutter contre la pandémie, de mobiliser les ressources pour financer le plan de relance, de renforcer la communication gouvernementale, de définir les modalités et l’état de mise en œuvre du budget programme au Sénégal.

Le Témoin


Mercredi 30 Décembre 2020 - 10:01


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