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Génocide au Rwanda : «Il faut avancer et regarder ce qui nous unit»

La 19e commémoration du génocide rwandais de 1994, qui a fait un million de morts selon le gouvernement de Kigali -pour la plupart des Tutsi-, s'ouvre ce dimanche 7 avril 2013. RFI a demandé à des jeunes de Kigali ayant perdu de la famille, ou dont des amis en ont perdu, leur regard sur ce travail de mémoire et sur la réconciliation au Rwanda.



Génocide au Rwanda : «Il faut avancer et regarder ce qui nous unit»

Assis au bord du stade du quartier de Gikondo à Kigali, Spear Mukatanyi, teeshirt de foot sur les épaules, attend son tour pour entrer sur le terrain. A 16 ans, le jeune garçon n’a pas vécu le génocide de 1994 et pour lui, la semaine de commémoration est un moment essentiel. « C’est une période de deuil national qui concerne tout le monde. C’est un moment qui me permet de discuter avec les autorités locales pour comprendre ce qui s’est passé ». Pour sûr, il participera aux différentes conférences qui vont être organisées dans son quartier, comme dans tous les quartiers et villages du Rwanda pendant une semaine à partir de dimanche. « Pendant cette période, tout est calme. Les gens sortent moins, on n’écoute pas de musique, sauf les chants mémoriaux et on ne peut plus jouer au football. Mais ça ne me dérange pas. C’est important de commémorer ces gens qui sont morts pour rien, afin que plus jamais cela ne se reproduise », explique-t-il, en évoquant sa mère, seule survivante d’une famille de douze personnes. 

Un peu plus loin, Faradja Or-Miel, 24 ans, qui vient de finir ses études de traductrice, partage cet avis sur l’importance de la commémoration. « J’ai des amis qui se battent chaque jour avec leurs souvenirs. Ces commémorations les aident, car dans ces moments-là, ils voient que tout le monde est à leurs côtés », témoigne la jeune fille.
Pour Bob Muhwenzi, 24 ans, qui suit une formation d’ingénieur en électronique à l’Institut de sciences et de technologies de Kigali (KIST), ces commémorations sont un moment « de tristesse et de souvenir ». Mais il constate que la douleur est plus supportable qu’auparavant, même si ces commémorations ne perdent en aucun cas leur importance. « Il y a encore cinq ans, beaucoup de gens pleuraient, criaient ou s’évanouissaient pendant les cérémonies, c’est moins fréquent maintenant. Il y a moins d’amertume aussi. Même dans les médias, les images violentes de corps découpés à la machette, ont laissé la place à des documentaires qui parlent de pardon et de réconciliation », explique-t-il.
 
La réconciliation en marche
 
Lorsque l’on interroge ces jeunes de Kigali sur les progrès du Rwanda en la matière, tous évoquent les «Gacaca », ces juridictions populaires créées en 2001 et qui, pendant dix ans, ont jugé la grande majorité des auteurs présumés du génocide. « Des responsables de la mort de plusieurs membres de la famille de ma mère sont venus, à ce moment-là, demander pardon», se souvient Spear Mukataonnyi, assurant que cette démarche montre qu’un grand pas a été franchi.
 
«Actuellement, beaucoup de personnes ayant purgé leur peine ont demandé pardon et son retournées dans leur village. Pardonner est le seul moyen de se sentir libre », affirme Abdul Uwimana, 26 ans, habitant de la colline de Munena dans le quartier de Nyamirambo. Une colline qui, à l’époque, a été particulièrement touchée par les massacres, du fait de sa grande concentration de Tutsi.
 
«Il est impossible d’oublier ce qui s’est passé », assure de son côté Bob Muhwenzi. Mais maintenant, « il faut avancer et  regarder ce qui nous unit : la recherche d’un développement économique et social, une croissance économique forte ». En tant que jeune, il se sent investi d’une mission pour « transmettre ce message » de pardon. « Sans unité, le pays ne peut pas progresser, constate également Faradja Or-Miel. C’est pour cela que le gouvernement met en avant le patriotisme et pousse la population à se surpasser ».
 
«Très vite après le génocide, pour le gouvernement, le développement économique est devenu une clé de cette réconciliation, la pauvreté étant un facteur de conflit », confirme Naphtal Ahishakiye, un responsable d’Ibuka, la principale organisation de survivants du génocide. Pour lui, la mobilisation des jeunes dans ce processus de mémoire est essentielle : « les jeunes ont été majoritairement impliqués dans le génocide de 1994. Il faut leur accorder une attention particulière, car ce sont eux qui vont construire notre avenir ».
 


Dépêche

Dimanche 7 Avril 2013 - 13:55


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