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«Après le G5, le Mali dénoncera-t-il la présence du contingent tchadien de la Minusma?»

La décision du Mali de se retirer du G5 Sahel a été annoncée le 15 mai au soir dans un communiqué par les autorités maliennes de transition. En cause, le fait que le Mali n’ait toujours pas été autorisé à prendre la présidence tournante de l’organisation, alors que cela aurait dû être le cas depuis février dernier. La France est-elle à la manœuvre comme le dénonce Bamako ? Le Mali ne prend-il pas un risque en rompant cette alliance militaire avec ses voisins directs ? Niagalé Bagayoko, présidente du Réseau africain pour le secteur de sécurité (African security sector network-ASSN), répond aux questions de David Baché.



RFI : Le conflit s’est cristallisé autour de la présidence tournante du G5, mais la cause profonde et le communiqué de Bamako ne le cache pas, c’est la situation politique interne du Mali. Le fait que les autorités maliennes de transition soient toujours en négociation avec la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) sur les futures élections, ça gêne à ce point les pays du G5 ?

Niagalé Bagayoko : Le communiqué du gouvernement malien indique qu’un État membre du G5 invoque la situation politique interne du pays et cela fait, bien entendu, référence aux sanctions qui ont été adoptées par la Cédéao réclamant le retour à l’ordre constitutionnel. La difficulté est que deux autres États du G5 Sahel ont aussi été le théâtre d’accession au pouvoir non constitutionnelle par des militaires. L’un d’entre eux, le Tchad, n’a pas fait l’objet de sanctions de la part de la CEEAC [Communauté économique des États de l'Afrique centrale], ni de l’Union africaine. Mais le Burkina Faso, s’il n’est pas encore sous sanctions, est aussi en discussion avec la Cédéao pour que la transition soit la plus brève possible. Donc, ce qui est appliqué au Mali pourrait également s’appliquer à terme au Burkina Faso, ce qui fragilise particulièrement l’existence du G5.

Le Mali se retire du G5 pour faire respecter sa souveraineté, mais est-ce qu’il n’est pas risqué de s’isoler ainsi de ses voisins directs ?

Il est évident qu’un pas nouveau a été franchi vers un isolement du Mali qui semble engagé dans une stratégie de rupture avec ses partenaires traditionnels. La question est de savoir si cette stratégie de rupture va se poursuivre avec la Minusma dans la mesure où ce retrait du G5, qui met notamment en cause le rôle de la présidence tchadienne, n’aura pas pour conséquence la dénonciation de la présence du contingent tchadien précisément au sein de la mission onusienne.

Il y a aussi la question de la coopération militaire avec les nouveaux alliés russes du Mali : groupe Wagner ou simples instructeurs. Certains pays du G5 imaginent peut-être difficilement travailler eux ?

Certains États comme le Niger sont très ouvertement opposés à ces logiques de sous-traitance à des acteurs privés russes. Mais il me semble que c’est surtout la question de l’opérationnalité de la force qui est en jeu, plus que des partenariats qui peuvent être noués, parce qu’il n’était pas concevable, à mon avis, que les contingents maliens de la force conjointe du G5 interviennent en partenariat avec leurs alliés russes.  

Quelles conséquences le retrait du Mali peut-il avoir sur le G5 Sahel lui-même ?

Le G5 Sahel était déjà très affaibli et en réalité, l’a été dès sa naissance. C’est une organisation qui est née de plusieurs situations perçues comme négatives par d’autres cadres multilatéraux. D’abord, le cadre de la Cédéao qui a été considéré comme non pertinent à la suite de l’incapacité que l’organisation a eue de mettre sur pied une force d’intervention pour le Mali au cours de l’année 2012. Il en va de même du cadre de l’Union africaine qui n’a pas réussi à déployer sa force de réaction rapide, la Caric, en 2013. Donc, le G5 Sahel a été créé, si je puis dire, par défaut. Et ses conditions de création ont largement influé ensuite sur sa difficulté à mobiliser des financements. C’est une organisation qui, par ailleurs, à la suite du retrait malien va souffrir d’une discontinuité territoriale et d’un vide institutionnel en raison du départ de l’un de ses membres.

RFI

Mardi 17 Mai 2022 - 10:07


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