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Congo Hold-up: les bonnes affaires des conseillers du président Tshisekedi

Les documents Congo Hold-up ne couvrent que peu l’ère Tshisekedi. Mais dans ces millions de données provenant de la BGFI, on retrouve les noms de certains de ses conseillers. Malgré un discours politique très clair sur la nécessité de lutter contre la corruption, deux collaborateurs, Jean-Claude Kabongo et Luc-Gérard Nyafé, ont continué de faire des affaires, après leur prise de fonction à la présidence. Enquête de Justine Brabant (Mediapart) et Sonia Rolley (RFI).



Congo Hold-up: les bonnes affaires des conseillers du président Tshisekedi
Le détournement d’au moins 138 millions de dollars d’argent public par l’ancien président de la République démocratique du Congo (RDC) Joseph Kabila et ses proches, révélé par RFI, Mediapart et leurs partenaires de « Congo Hold-up », provoque depuis une semaine une onde de choc en RDC et au-delà.

Plusieurs ONG ont appelé la justice congolaise à se saisir de ces informations pour ouvrir des enquêtes sur ces « faits graves ». Parmi elles, le mouvement dit « citoyen » Lucha, qui milite pour plus de justice sociale et de démocratie, a appelé à la révision de la loi accordant l’immunité aux anciens présidents congolais, et au gel et à la saisie des biens issus de l’enrichissement illicite.

« Il est temps que la justice congolaise ouvre une enquête contre les auteurs des crimes économiques qui ont dépouillés les Congolais de leurs ressources », a également réagi la campagne « Le Congo n'est pas à vendre », qui regroupe une dizaine d'associations congolaises et internationales qui luttent et militent contre la corruption.

Le Premier ministre belge Alexander De Croo a déclaré, vendredi 19 novembre, qu’il était « dans l’intérêt même de la RDC que cette affaire soit révélée au grand jour » et que cela « devrait aider le Président actuel et son gouvernement à progresser dans la lutte contre la corruption, une lutte que soutient [la Belgique]. »

L’actuel chef de l’État congolais, Félix Tshisekedi, aime, lui, à s’afficher comme l’homme du changement, promoteur d’une meilleure gestion des affaires publiques. Son homologue américain Joe Biden saluait en octobre dernier ses « efforts pour promouvoir la transparence et lutter contre la corruption ».

L’Inspecteur général des finances de la RDC, Jules Alingete, multiplie depuis le début de nos révélations les sorties musclées, assurant qu’il s’emploie plus que jamais à lutter contre la corruption, le blanchiment de capitaux et le détournement de fonds publics, avec la bénédiction de Félix Tshisekedi. En bon héraut de l’anticorruption, l’actuel chef de l’État a d’ailleurs, depuis le 16 novembre, un amphithéâtre à son nom au siège de l’Inspection générale des finances.

Dans l'entourage du successeur de Joseph Kabila, tout le monde n'est pourtant pas irréprochable. Les millions de documents bancaires obtenus par PLAAF et Mediapart, combinés à des enquêtes auprès d’entrepreneurs et d’acteurs économiques publics et privés démontrent qu’au moins deux proches collaborateurs du président ont continué de faire des affaires après avoir pris leurs fonctions. Des activités contraires pour certaines d’entre elles au code de conduite des agents publics congolais.

L'alternance politique à la tête de l'Etat congolais s'est-elle doublée d'un changement réel dans les pratiques de ses hauts représentants? Ces deux exemples sèment le doute.

Le conseiller spécial Jean-Claude Kabongo et ses quatre sociétés
Est-ce à force de fréquenter les lobbies de grands hôtels dans le cadre de ses fonctions ? Jean-Claude Kabongo, conseiller spécial du président Tshisekedi, a manifestement un certain goût pour le luxe. Propriétaire d’une villa à Miami (revendue en 2019), locataire d’un appartement sur l’avenue Montaigne à Paris, smartphone siglé Porsche… Sa photo de profil Whatsapp est un cigare Partagas.

Depuis 2019, il occupe donc des fonctions stratégiques au sein de l’état-major de Félix Tshiskedi. En tant que conseiller spécial chargé des investissements, il a la main sur plusieurs dossiers hautement sensibles, dont celui du barrage d’Inga III (un projet de gigantesque barrage hydroélectrique sur le fleuve Congo) ou celui d’extension de la capitale congolaise (le projet « Kitoko », qui devrait être réalisé par un consortium égyptien). Il a œuvré au rapprochement économique avec le patronat marocain ou encore à la visite de la délégation présidentielle congolaise à Doha au Qatar.

Entrepreneur dans le trading pétrolier avant d’être nommé conseiller, il a officiellement cessé ses activités en entrant au service de l’État. En mars 2021, il « assur[ait] avec force » à la publication spécialisée Africa Intelligence « s'être retiré des affaires de sa société [de trading pétrolier, ATOL] pour se consacrer entièrement à ses fonctions de conseiller spécial ». Interrogé par Mediapart et ses partenaires en septembre 2021, il réaffirmait s’être « désengagé » de ses « anciennes affaires commerciales ».

En réalité, pour le conseiller Kabongo, le business continue.

S’il a bien démissionné de ses fonctions au sein de sa société African Trading Oil (basée au Royaume-Uni) avant qu’elle ne soit dissoute en octobre 2020, le nom de Jean-Claude Kabongo apparaît toujours comme directeur de quatre sociétés enregistrées au registre du commerce congolais : JCK Holding, JCK Trading, JCK Consulting et la Société générale de transit (SOGET).

Détail embarrassant : selon ses statuts, l’actionnaire majoritaire de la SOGET de Jean-Claude Kabongo est l’entreprise Orion Oil, dont le patron Lucien Ebata, un proche du président de l’autre Congo, Denis Sassou Nguesso, a été mis en examen en France en octobre 2021 pour « manquement à l’obligation de déclaration de capitaux, blanchiment et corruption active ».

Fana CiSSE

Jeudi 2 Décembre 2021 - 08:29


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