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Zoom sur les "Dallu Ngaay", les chaussures 100% Made in Sénégal

​Ngaay Méckhé, paisible localité au cœur du Cayor des profondeurs, a une histoire qui se confond avec son savoir-faire en matière d’artisanat. Cette capitale du Royaume «Ceedo» doit sa renommée nationale et même internationale à ses chaussures en cuir, plus connues sous le label «Dallu Ngaay» (les chaussures de Ngaay, en wolof).



Zoom sur les "Dallu Ngaay", les chaussures 100% Made in Sénégal
Jadis petite bourgade nichée en plein cœur du Cayor, Ngaay Méckhé est devenue célèbre grâce et par l’artisanat. Son nom est intimement lié à la fabrication de chaussures si bien que sa renommée a dépassé les frontières nationales. Une commune du département de Tivaouane traversée par la route nationale N°2 qui mène vers Saint-Louis. Où, à n’importe quelle heure, de jour comme de nuit, le visiteur peut trouver des cantines d’artisans ouvertes à l’affût de clients potentiels.

De génération en génération, le savoir-faire de Ngaay en matière d’artisanat, vieux de plus d’un siècle, a traversé les âges et les frontières du Sénégal. Entre autres spécialistes de la filière cuir, les familles Guèye et Guissé qui, fièrement, portent respectivement les signatures « Cawaan » et «Maabo» et lauréats du Grand prix du chef de l’Etat. Elles perpétuent le bel héritage des ancêtres. Chez elles, l’art de façonner les peaux de vaches, de moutons ou de chèvres pour obtenir un cuir de qualité n’a pas de secret. L’ingéniosité de ces cordonniers se traduit par la beauté et la qualité des chaussures en cuir « Made in Ngaay ». L’originalité du design, le charme des motifs et de la texture, l’adresse dans la finition sont les maitres mots qui s’ajoutent à la garantie certifiée du travail de ces fils du Cayor de Lat Dior Diop, le héros national du Sénégal.

À défaut d’un village artisanal, l’une des préoccupations des artisans, les produits finis sont exposés de part et d’autre de la Nationale 2, dans tous les coins et recoins de la cité. Laquelle abrite un marché hebdomadaire les lundis, lieu de rencontre, depuis la période coloniale, des paysans et commerçants venant de tous les horizons. « Aujourd’hui victime de la contrefaçon, la concurrence, l’insuffisance de la matière et l’activisme controversé de la Chambre de métiers de tutelle, le label ‘’Dallu Ngaay’’ continue tant bien que mal d’entretenir son image d’antan », remarquent certains acteurs du secteur. En plus des chaussures en cuir, Ngaay produit également d’autres articles de maroquinerie (sacs à main, porte-monnaie), vannerie, tissage, sculpture… .

Dans la capitale sénégalaise de la chaussure, le savoir-faire dans le domaine de la fabrication des chaussures en cuir est séculaire et source de création d’emplois pour tous. « Toutefois, de plus en plus de cordonniers ont du mal à transmettre leur savoir-faire aux plus jeunes qui ne perçoivent plus l’artisanat comme une activité d’avenir », regrette le vieux sage cordonnier, Malick Mbow.

Au royaume de la cordonnerie
Les perspectives et les opportunités qu’offrent la cordonnerie et la maroquinerie, au-delà de la ville de Ngaay Méckhé, sont nombreuses. Malgré tout, l’artisanat peine toujours à passer un autre cap pour aller vers une micro industrie. L’artisanat constitue l’activité phare de ladite zone sortie de l’anonymat par la reconnaissance du travail de ses artisans. En réalité, des centaines d’ateliers ont remplacé les traditionnels « Mbaars » qui faisaient office d’ateliers pour les orfèvres du cuir. Aujourd’hui, des cantines de cordonnerie et de métiers connexes, comme la vente de peaux et de matériel de cordonnerie, bordent l’axe routier qui coupe cette ville en deux. Ainsi, au lieu du calme qui doit régner dans des bourgades du même type, le bourdonnement régulier des machines de confection de chaussures trouble la quiétude de ce hameau.

Un savoir-faire reconnu
Qui connaît la ville de Ngaay reconnaît ainsi le savoir-faire de ses artisans en matière de cordonnerie et son lien séculaire avec la confection du cuir. Ibrahima Pène, qui a nommé sa fabrique « Ngalla Pène » à l’entrée de Méckhé, se veut clair : « nous travaillons dans la filière cuir qui est un métier traditionnel. C’est depuis l’époque de nos grands-parents avant que nous ne prenions la relève. Et Dieu merci, c’est un métier noble. Il est très intéressant, vu que quiconque parle de Ngaay parle également de ses chaussures. Nous ne fabriquons que des chaussures de bonne qualité avec du vrai cuir comme l’ont toujours fait nos grands-pères. D’ailleurs, c’est ça la marque de Ngaay ». Il en est ainsi de génération en génération. Le savoir-faire de Ngaay, en matière d’artisanat a traversé les âges. Désormais, il est devenu un label plus perfectionné au fil du temps. Deux grandes marques émergent du lot dans le domaine de la cordonnerie à Ngaay. « Caawan » (Thiawane) de la famille du défunt Moussa Kari Guèye dont la Maison de l’outil (ANAMO) porte le nom. Mais également « Maabo » d’El Hadj Ndiaga Guissé. Ces deux marques arborent haut le flambeau de la qualité du label « Made in Ngaay ».

Ces deux marques sont chacune lauréats du Grand Prix du Chef de l’Etat pour l’Artisanat. « C’était en 1995, le travail qui m’a permis de gagner un Grand Prix du Chef de l’Etat est que je n’ai rien utilisé d’importé dans les modèles présentés à ce concours. Tout a été produit et réalisé ici», se remémore El Hadj Ndiaga Guissé. Mieux encore, ces deux marques ont aussi eu à collaborer avec de grandes enseignes de cordonnerie européennes et françaises comme Agnès B. Ce qui est un signe de leur maîtrise de l’art de la cordonnerie et de la maroquinerie. Mactar Guèye, un des artisans de la marque de cordonnerie «Caawan », explique que leur enseigne fabrique des sacs, des ceintures, des selles, diverses variétés de chaussures ainsi que toutes sortes d’autres gadgets en cuir.

La marque travaille sur tout ce qui est lié au cuir. « Caawan a son histoire qui date des années trente. C’est une entreprise créée par notre grand-père Mame Moussa Kari Guèye, succédé après par notre père qui nous a tous formés au métier de la cordonnerie et de la maroquinerie. Nous baignons dans cette atmosphère, malgré des études poussées pour certains. Le savoir-faire de la cordonnerie est la chose la mieux partagée chez nous. Mais c’est en 1985 que nous, les frères, avions décidé de mettre en place la marque ‘’Caawan’’ qui fait référence au village d’origine de notre aïeul qui se trouve près de Kébémer. Au fur et à mesure de notre travail, nous avons investi dans la production et l’achat de machines plus perfectionnées », relate Mactar Guèye.

«Aar Dallu Ngaay» (Protéger le Label Ngaay)
Ces artisans sont membres fondateurs du Groupement d’intérêt économique (GIE) « Aar Dalu Ngaay » (préserver le label Chaussures de Ngaay). Une structure créée en 2011 et qui fait la fierté de cette ville. Une organisation qui lutte pour la protection des produits « Made in Ngaay » et s’attache ainsi à régler les problèmes des cordonniers et des produits artisanaux « Made in Ngaay ». Elle supervise également la qualité, la productivité et la formation des membres. Elle est à l’origine de l’amélioration notée dans le métier.

A cet effet, ils ont longtemps réfléchi à la « pédagogie » à adopter pour avoir une « labellisation Ngaay » comme les Marocains et les Tunisiens. Deux pays qui ont réussi à ériger le protectionnisme pour le développement de leur artisanat. Au point qu’il est difficile aujourd’hui d’exporter des produits artisanaux dans ces pays cités. Sur ce plan, les artisans de Ngaay soutiennent être en collaboration avec les autorités locales comme le maire Maguette wade. Ceci, pour mettre en place un hologramme qui sera estampillé sur les objets artisanaux pour authentifier tous les produits « Made in Ngaye » avant de les mettre sur le marché. « Cela sera possible avec la mise en place d’une structure chargée de veiller au contrôle strict de cette mesure », expriment-ils.

L’Union des artisans de Méckhé et environs (UAME), présidé par Assane Kassé, artisan-cordonnier, fait état de l’essor de la cordonnerie dans la commune. « A Ngaay, on dénombrait des centaines d’ateliers pour la cordonnerie. L’artisan ne connaît et n’a que son travail. C’est avec ça qu’il prend soin de sa famille et forme des jeunes. Si tu vois ce que l’artisanat apporte dans la zone, beaucoup de jeunes qui ont raté leurs études sont récupérés par l’artisanat à Ngaay. Rien que pour ça, l’Etat devrait aider ce secteur qui lutte contre le chômage et aide à l’insertion des jeunes par la création d’emplois. Une bonne partie de la jeunesse de Ngaay évolue dans ce secteur et des milliers de paires de chaussures sortent des ateliers chaque jour ».

Naguère considérée comme un métier dévolu à une certaine caste, la cordonnerie est devenue une profession respectable. Ce n’est plus seulement l’affaire d’une couche sociale, mais plutôt un business comme un autre. Le nom « Oudé » affublé aux cordonniers a cédé la place à celui d’artisan et le « Mbar » est devenu un atelier. Une activité qui s’est modernisée, tend à être une véritable industrie. L’exemple par « Ngaay Melkhé et ses chaussures qui font référence.

Le Témoin


Mercredi 30 Septembre 2020 - 12:17


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