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France: parenthèse rare de fraternité autour de Valls à l'Assemblée

Mardi 13 janvier 2015, l’Assemblée nationale française a rendu un hommage ému aux victimes des massacres de la semaine. Une Marseillaise a même été chantée debout, une scène inédite depuis 1918. Le Premier ministre a réussi à enflammer l’Hémicycle en dénonçant la barbarie. Il a défendu les valeurs républicaines et a su trouver les mots. Mais le débat politique reprendra ses droits, a-t-il dit, lucide.



Palais Bourbon, Paris, le 13 janvier 2015. Hommage aux victimes des attaques de la semaine. REUTERS/Charles Platiau
Palais Bourbon, Paris, le 13 janvier 2015. Hommage aux victimes des attaques de la semaine. REUTERS/Charles Platiau

Il a parlé avec son cœur et cela s'est senti. Déjà très ému le matin lors de l'hommage rendu à la préfecture de police de Paris  aux agents tués, le Premier ministre français l'était encore l'après-midi devant les députés, en rendant hommage cette fois-ci à l'ensemble des victimes des attentats. Et quand il a dénoncé l’antisémitisme, Manuel Valls a vibré jusqu'à faire se lever toute l'Assemblée pour l'applaudir. Dans ce moment où chacun s'accorde à dire que ce sont les valeurs républicaines qui ont été attaquées, le Premier ministre a eu l'occasion de défendre ses convictions profondes, au premier rang desquelles la laïcité. Il a déclaré la guerre au terrorisme, mais il a aussi pris soin de dissocier les jihadistes des musulmans qui font partie de la communauté nationale. A droite et à gauche, son discours a été salué.

« Le temps de l'émotion et du recueillement, il n'est pas fini. Vient le temps de la lucidité et de l'action. Sommes-nous en guerre ? La question a en réalité peu d'importance car les terroristes jihadistes, en nous frappant trois jours consécutifs, y ont apporté, une nouvelle fois, la plus cruelle des réponses. Il faut toujours dire les choses clairement. Oui, la France est en guerre contre le terrorisme, le jihadisme et l'islamisme radical. La France n'est pas en guerre contre une religion, la France n'est pas en guerre contre l'islam et les musulmans. La France protègera, et le président de la République l'a également rappelé ce matin, la France protègera comme elle l'a toujours fait tous ses concitoyens. »Manuel Valls a été de l'avis de tous à la hauteur d'une situation dramatique exceptionnelle. Il a su convaincre. Il Iui reste maintenant à trouver le moyen de maintenir cette unité nationale que personne, pour l'instant, n'a osé rompre. Les pratiques politiques vont-elles évoluer suite aux évènements de la semaine ? Le député socialiste Yann Galut semble y croire : « Peut-être que chacun d'entre nous sera plus attentif à l'autre, plus dans le dialogue, plus dans la concertation, plus dans le consensus, projette-t-il. On a besoin aujourd'hui, malgré nos différences, d'une France apaisée. » Mais l'élu du Cher n'est-il pas l'un des seuls à croire possible une telle évolution ?

L'hypothèse de Yann Galut est ainsi balayée d'un revers de main par le député UMP Jacques Myard. « Il ne faut pas se tromper,prévient-il. Il y a une unité nationale, les Français aiment la France, les Français veulent que la France soit indépendante et non soumise, mais bien évidemment, si vous leur parlez d'allocations familiales, vous n'aurez ni l'unanimité, ni l'union sacrée. Heureusement, nous ne sommes pas tous des clones. » Un point de vue partagé par le communiste André Chassaigne, qui n'entend nullement réfréner ses critiques à l'encontre du gouvernement.

Le débat politique et les traditionnelles confrontations d'idées, Manuel Valls les juge de toute façon nécessaires. Il l'a dit à la tribune de l'Assemblée : « La démocratie que l'on a voulu abattre, ce sont les débats, les confrontations. Ils sont nécessaires, indispensables à sa vitalité et ils reprendront, c'est normal. » Ils devraient même reprendre très rapidement à l'occasion notamment de l’examen à l'Assemblée nationale du projet de loi pour la croissance et l'activité. Mais en attendant, l'heure était à l'écriture de l'histoire. Ce mardi 13 janvier 2015 fera date dans les annales du palais Bourbon.

→ Toutes les annonces et le discours intégral du Premier ministre disponibles ici


■ Manuel Valls plébiscité pour un discours propulsé dans l'histoire

Patrick Ollier, UMP, Hauts-de-Seine. « Le Premier ministre a fait un discours que nous attendions. Il était dans l’émotion, nous y sommes tous encore, mais il a annoncé des mesures qui correspondent exactement à ce que l’UMP attendait. Le président Sarkozy a déjà, il y a 48 heures, fait des propositions qui y ressemblent. Donc, nous sommes dans le consensus et ces mesures que nous attendions ont suscité le fait que le groupe UMP s’est levé pour applaudir le Premier ministre, ce qui est quand même rare. Cette union doit perdurer pour que ces mesures soient transformées rapidement en texte et puissent être mises en œuvre rapidement aussi, c’est une question de temps. »

François Loncle, PS, Eure. « Manuel Valls a été extraordinaire. Peut-être aussi que ses origines espagnoles expliquent cela. C’est un grand patriote, un grand républicain et je suis vraiment heureux d’être à côté de lui. La gravité, le ton... et puis aussi la force de son évocation à la fois du drame, à la fois des propositions mais aussi les priorités absolues de la lutte contre l’antisémitisme et le racisme, avec toutes les allusions et la force qu’il a exprimées par rapport aux juifs de France, et par rapport aux musulmans de France. Et cela, franchement, depuis 34 ans que je suis dans l’Hémicycle, j’ai le souvenir de Robert Badinter, j’ai le souvenir d'Aimé Césaire, mais à part eux deux, je n’avais pas entendu un discours aussi beau et aussi profond. »Hervé Morin, UDI, Eure. « Il a été vraiment bon, on ne peut pas dire le contraire. Comme quoi, la politique s’écrit dans les moments tragiques et on reconnait les hommes au moment d’événements tragiques. C’est là où on voit s'ils sont à la hauteur du débat, du sujet. Il l’a été, on ne peut pas dire autrement. Il va falloir désormais qu’il soit à la hauteur sur la réponse. Alors, le discours de Manuel Valls donne espoir sur la force de la réponse. Parce que n’oubliez pas que derrière l’union, il y a chez beaucoup de Français une vraie demande, non pas de sécurité au sens classique du terme - elle existe mais ce n’est pas ça -, une demande pour que nous ayons des réponses fermes à l’égard de ceux qui contestent notre modèle de société qui le haïssent ou qui veulent le remettre en cause. »Olivier Faure, PS, Seine-et-Marne. « Ça fait longtemps que je suis les débats parlementaires, même avant d'être député, et je pense que nous venons d'assister à l'un des grands moments de l'histoire républicaine. Il y a peu de discours qui sont applaudis par la majorité et par l'opposition debout. Mais ça l'a été parce que Manuel Valls a su trouver les mots justes, de bout en bout, pour rappeler ce qui étaient nos valeurs, nos principes, le fondement de la République. Et il a, au-delà de l'Assemblée, rappelé à chaque Français ce qui fondait le vivre-ensemble, quels étaient les principes auxquels personne ne pouvait échapper, et qu'il ne pouvait y avoir aucune exception, aucune négociation sur ce qui touche au cœur de ce que nous sommes. »


Rfi.fr

Mercredi 14 Janvier 2015 - 10:32