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Côte d'Ivoire: L'armée, casse-tête d'Alassane Ouattara


Rédigé le Lundi 23 Mai 2011 à 17:39 | Lu 1953 fois | 2 commentaire(s)


Le nouveau président ivoirien a été intronisé solennellement, samedi 21 mai 2011 à Yamoussoukro. L'un des chantiers les plus difficiles qui attendent Alassane Ouattara est celui de la réunification de l'armée. L’opération de recensement des combattants ivoiriens a démarré mais la tâche s’annonce titanesque. Etat des lieux.


Un soldat des FRCI, les forces pro-Ouattara, le 29 avril , dans le quartier de Yopougon, dernier bastion pro-Ggabo, tombé début mai 2011 Reuters/Luc Gnago
Un soldat des FRCI, les forces pro-Ouattara, le 29 avril , dans le quartier de Yopougon, dernier bastion pro-Ggabo, tombé début mai 2011 Reuters/Luc Gnago
« Alassane Ouattara avait signé un décret d’unification de l’armée début mars . Mais il n’a pas d’armée ! ». Ce constat d’un expert en sécurité français connaissant parfaitement les arcanes militaires de la Côte d’Ivoire en dit long sur le défi que doit relever le nouveau président ivoirien.

Officiellement, 60 000 hommes sont, grosso modo, considérés comme des « ayants droit », c'est-à-dire ayant un statut militaire ou une légitimité à être récupérés dans la nouvelle armée voulue par Alassane Ouattara. Environ 50 000 appartiennent aux FDS, les ex-Forces de défense et de sécurité (armée proprement dite, gendarmerie, police, anciennement fidèles au président Laurent Gbagbo), et 10 000 font partie des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), autrement dit les ex-rebelles des Forces nouvelles, fidèles au nouveau chef de l'Etat.

Sur le papier, ces 60 000 hommes sont la matrice de la future armée unifiée qu'Alassane Ouattara appelle de ses vœux. Dans la réalité, le paysage militaire ivoirien est un patchwork inquiétant. Revue de détail.

Les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI)

Côte d'Ivoire: L'armée, casse-tête d'Alassane Ouattara
Elles sont un amalgame très disparate. « Parmi les FRCI, près de 500 combattants sont issus de l’armée nationale qu’ils avaient désertée avant 2002, les 9500 autres ont été recrutés et formés en brousse », indique un expert militaire.

Le petit noyau ayant bénéficié d’une formation militaire classique est constitué en grande partie de soldats ayant participé au coup d’Etat du 24 décembre 1999, qui avait porté le général Robert Gueï au pouvoir. Courant 2000, ils avaient constitué des groupes qui faisaient la loi à Abidjan sous le nom de « Camorra », « Brigades Rouges » ou « Cosa Nostra ». Une partie d’entre eux a fui la Côte d’Ivoire vers le Burkina Faso ou a été arrêtée, après des accusations de tentative de coup d’Etat contre le général Gueï, en septembre 2000.

La plupart étaient des sous-officiers, par la suite montés en grade à la faveur de la rébellion entamée en 2002. Certains sont devenus les fameux « com’zone » (commandants de zone), véritables chefs de guerre, qui avaient tout pouvoir sur les territoires sous leur compétence, dans la partie nord du pays, sous contrôle des insurgés après le début de la guerre en septembre 2002. « On a assisté à une féodalisation de ce qui allait devenir l’armée de Ouattara, avec des fiefs régionaux organisés sous la direction de chefs qui sont à la fois militaires, entrepreneurs économiques et qui maîtrisent tout ce qui passe dans leur région, en étant parfaitement branchés sur les réseaux économiques modernes à travers le trafic de cacao, de coton, de poudre d'or ou de diamants », explique le sociologue Michel Galy, spécialiste des groupes armés et guérillas en Afrique de l’ouest.

Parmi ces commandants, Cherif Ousmane, qui a mené la bataille d’Abidjan, Issakia Ouattara dit Wattao, Zacharia Koné ou Morou Ouattara, contrôlent actuellement chacun un secteur de la ville d’Abidjan. « Quelques-uns ont de vraies qualités militaires et, pour certains, ont déjà bénéficié d'une formation militaire par les Français », confie un ancien des services de renseignements français.
Le problème, souligne l’expert en sécurité que nous avons interrogé, c’est qu’« on a aussi assisté à une prolifération de petits chefs de guerre enrichis. Pas mal de capitaines des FRCI ont plusieurs gros véhicules et leurs gardes du corps ». Beaucoup de combattants des ex-Forces nouvelles n'ont par ailleurs aucune expérience d'une véritable hiérarchie militaire et sont pour partie illettrés. Difficile dans ce contexte de les faire rentrer dans le rang et cohabiter avec les soldats des Forces de défense et de sécurité.

Autre écueil de taille : de nombreux civils, souvent des militants du RDR (parti d’Alassane Ouattara), dont le nombre est difficile à déterminer avec précision, ont été armés pour mener l’offensive vers Abidjan. Autant d’hommes, parfois très jeunes, qu’il va falloir désarmer.

Les Forces de défense et de sécurité (FDS)

Issakia Ouattara dit Wattao, l'un des commandants des FRCI, les forces pro-Ouattara. Un homme clé dans la recomposition de l'armée ivoirienne. REUTERS/Luc Gnago
Issakia Ouattara dit Wattao, l'un des commandants des FRCI, les forces pro-Ouattara. Un homme clé dans la recomposition de l'armée ivoirienne. REUTERS/Luc Gnago
L’armée ivoirienne, telle qu’elle se présentait sous la présidence de Laurent Gbagbo, est composée d’environ 50 000 hommes. Autour de 15 000 appartiennent à l’armée de Terre, l’armée de l’Air et la Marine. A peu près 18 000 font partie de la gendarmerie et 18 000 à 19 000 de la police, dont le statut a été aligné sur celui des militaires en 2001.

Parmi ces 50 000 hommes, deux unités sortent du lot :

Le Cecos (Centre de commandement des opérations de sécurité), unité d’élite d’environ 1000 hommes regroupant des gendarmes et des policiers, dirigée par le général Guiai Bi Poin. Le Cecos a joué un rôle clé après le second tour de la présidentielle du 28 novembre 2010, menant notamment les opérations contre les insurgés pro-Ouattara à Abidjan, en particulier dans le quartier d’Abobo. Le Cecos est accusé par le gouvernement du nouveau président ivoiren et l'ONU d'avoir commis exactions et meurtres (ce qui est aussi le cas des insurgés pro-Ouattara, selon Amnesty international).

La Garde républicaine, garde présidentielle obéissant au seul président de la République du temps de Laurent Gbagbo, dirigée par le général Dogbo Blé, aujourd’hui détenu dans le nord de la Côte d’Ivoire. La « GR », composée d’environ 1200 hommes bien équipés, a mené jusqu’au bout la résistance autour de la résidence du président déchu.

Immédiatement après la chute de Laurent Gbagbo, la plupart des généraux (dont le chefd’état-major des armées, le général Mangou, le colonel-major Kassaraté, patron de la gendarmerie, et le patron du CECOS) ont fait allégeance à Alassane Ouattara, hormis le général Dogbo Blé qui s’est rendu et a donc été arrêté.
Mais de nombreux membres des FDS, manquent aujourd’hui à l’appel. « Parmi les gendarmes, beaucoup ne veulent pas rejoindre Alassane Ouattara car ils ont peur, certains ont déchiré leurs papiers, affirme Michel Galy. Il y aussi des policiers qui se cachent, idem pour les FDS, dont beaucoup ne sont pas prêts à rejoindre les FRCI. » Une situation que confirment des témoignages recueillis par la rédaction Internet de RFI. Leur nombre reste cependant indéterminé.

Le 8 mai 2011, l’opération d’identification des militaires des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI) a démarré, à l'initiative du président Ouattara. Elle doit se prolonger jusqu'à la fin du mois de mai à Abidjan, puis concernera l'intérieur du pays. A ce propos, dès la fin du mois d’avril dernier, le porte-parole du gouvernement, Patrick Achi, avait prévenu que les éléments de l’armée, de la police et de la gendarmerie qui ne rejoindraient pas leurs bases seraient radiés des effectifs. C'est sans doute, en partie au moins, pour l'aider à mener cette tâche à bien qu'Alassane Ouattara a décidé de reconduire, Guillaume Soro, ex-chef politique des Forces nouvelles, au poste de Premier ministre et ministre de la Défense.

Restent enfin les nombreux miliciens armés par l'ancien pouvoir, après 2002 puis au début de l'avancée des FRCI en 2011, qui devront être désarmés.

L’opération de réunification peut-elle réussir ?

Le président élu Alassane Ouattara salue le général Philippe Mangou à l'hôtel du Golf à Abidjan où une cérémonie «d'allégeance» des responsables militaires s'est tenue, 12 avril 2011. AFP/Aristide Bodegla
Le président élu Alassane Ouattara salue le général Philippe Mangou à l'hôtel du Golf à Abidjan où une cérémonie «d'allégeance» des responsables militaires s'est tenue, 12 avril 2011. AFP/Aristide Bodegla
Les avis sont partagés. Optimiste, un officier français de haut rang ayant été en poste en Côte d’Ivoire rappelle « qu’une partie au moins des soldats des deux camps ont collaboré au sein du Centre de commandement intégré, structure créée par l’Accord politique de Ouagadougou de 2007, composée paritairement d’officiers des deux camps, puis au sein d’unité mixte ». Une analyse que ne partage pas le sociologue Michel Galy. « Tout cela a volé en éclat, dès que la situation s’est tendue après le second tour de la présidentielle », fait-il remarquer.

Que faire par ailleurs, des combattants des ex-Forces nouvelles formés « en brousse » et des miliciens de l’un et l’autre camp ? « A la libération de Paris, à la fin de la seconde guerre mondiale, il y avait des colonels à 6 galons et des miliciens qu’on a réussi à reconvertir », lance l’officier français que nous avons interrogé. Il prédit toutefois une inévitable période d’instabilité. « On n'échappera pas à une période de flottement, ajoute-t-il. Il y a également le problème des armes distribuées aux jeunes pro-Gbagbo et pro-Ouattara. Mais l’Onu a les moyens de récupérer ces armes ». D’où l’importance, selon lui, de maintenir les forces internationales en Côte d’Ivoire (10 000 soldats de l'Onuci et 1000 soldats de la force française Licorne).

Quant au coût de la restructuration, « s’il est prématuré d’envisager un chiffrage du coût total de cet effort, l’on peut estimer qu’il dépassera les seules capacités de l’Etat ivoirien. Un financement par des bailleurs de fonds internationaux sera très probablement nécessaire », estime un ancien de la force Licorne. La France a d’ores et déjà promis son aide et a dépêché un officier auprès du nouveau président ivoirien. Lors de son investiture, le 21 mai, Alassane Ouattara a demandé à la France de maintenir une base en Côte d'Ivoire, ce que le président français Nicolas Sarkozy a accepté, revenant sur la décision prise du temps de Laurent Gbagbo de fermer la base du 43ème BIMA. Une autre question, soulignent plusieurs experts militaires, est de savoir quelle armée souhaite mettre en place Alassane Ouattara: une armée « d'opérette », comme du temps d'Houphouët-Boigny, qui avait laissé à la France la charge de la défense du territoire ou une véritable armée.

Qui pour diriger la nouvelle armée ?

C'est l'une des grandes questions qui se pose à Alassane Ouattara. Même si la haute hiérarchie a rejoint le nouveau chef de l'Etat, les généraux de l'ère Gbagbo, à commencer par Philippe Mangou, ne dirigent plus une armée qui, de facto, est totalement éclatée. Le bureau de chef d'état-major de ce dernier était, aux dernières nouvelles, occupé par commandant Chérif Ousmane. Tout un symbole. Du côté des FRCI, la hiérarchie est floue. Officiellement, le général Soumaïla Bakayoko était, jusqu'à maintenant, le chef d'état-major des Forces armées des Forces nouvelles, mais depuis l'offensive des forces pro-Ouattara, il a été étonnement silencieux, contrairement à son adjoint, le commandant Wattao. Ce dernier est alors apparu comme le véritable chef des opérations qui ont abouti à une victoire du camp Ouattara grâce à l'appui décisif des forces des Nations unies et de la force française Licorne. Son nom circule pour la direction de la future armée, de même que ceux des généraux Michel Gueu, chef de cabinet militaire du Premier ministre Guillaume Soro, ou celui de Mathias Doué, l'ancien chef d'état-major des armées de Laurent Gbagbo, tombé en disgrâce fin 2004, et récemment rentré d'exil.

Les orphelins d’IB et les combattants pro-Gbagbo en déroute

Ibrahim Coulibaly, dit «IB», le 19 avril 2011 lors d'une conférence de presse. AFP/Issouf Sanogo
Ibrahim Coulibaly, dit «IB», le 19 avril 2011 lors d'une conférence de presse. AFP/Issouf Sanogo
Autre question en suspens, celle des partisans du sergent-chef Ibrahim Coulibaly. Pilier de la rébellion à ses débuts, en 2002, il s’est présenté, ces derniers mois, comme le chef du « commando invisible », ce groupe d’insurgés qui a pris le contrôle du grand quartier abidjanais d’Abobo, majoritairement favorable à Alassane Ouattara, après le second tour de la présidentielle. Brouillé avec le Premier ministre Guillaume Soro depuis 2003, il a été tué par ses anciens frères d’armes, le 27 avril. D’où la crainte d’autres règlements de compte au sein des combattants pro-Ouattara.

Reste enfin, le sort des militaires pro-Gbagbo en déroute. Si les généraux de l’ancien régime ont fait allégeance à Alassane Ouattara, des militaires loyaux à l’ancien chef de l’Etat se sont évanouis dans la nature. La presse et les réseaux sociaux ivoiriens bruissent de rumeurs sur leur présence au Ghana voisin et l'éventualité d'attaques à partir de ce pays, sans que cela soit confirmé. Mais beaucoup sont tout simplement cachés par peur des représailles. L'opération de recensement devrait au moins donner une idée plus précise de ceux qui manquent à l'appel.

L’écueil des droits de l’homme

Depuis son arrivée au pouvoir, le 11 avril dernier, Alassane Ouattara martèle qu’il souhaite au plus vite une enquête de la Cour pénale internationale (CPI) sur les violations des droits de l’homme en Côte d’Ivoire au cours de ces derniers mois. Le gouvernement ivoirien pointe essentiellement du doigt l’ancien régime et les militaires, miliciens ou mercenaires accusés d’avoir commis des exactions et des massacres, en particulier à Abidjan et dans l'ouest du pays. Plusieurs officiers fidèles à Laurent Gbagbo sont d’ailleurs détenus à ce titre. Mais une enquête minutieuse de la CPI pourrait aisément remonter aussi vers des membres des FRCI. Des organisations de défense des droits de l’homme les accusent d'avoir commis des tueries de grande ampleur dans l’ouest du pays. Sur RFI, le porte-parole du gouvernement, Patrick Achi, a estimé qu’il faudra attendre le résultat des enquêtes judiciaires avant de pointer les responsabilités. Pour autant, certains membres des ex-Forces nouvelles ont déjà été mis à l'index depuis longtemps par les Nations unies, dans plusieurs rapports. Le commandant de zone de Korhogo, Kouakou Fofié, sous l’autorité duquel Laurent Gbagbo est détenu, a été ainsi sanctionné en 2006 pour de très graves violations des droits de l’homme aux côtés Charles Blé Goudé, le chef des jeunes patriotes, pro-Gbagbo. Par ailleurs, la prise par les FRCI du quartier de Yopougon, dernier bastion pro-Gbagbo, s'est faite au prix de violents combats. Des charniers ont été découverts, immédiatement attribués par l'ONU à des miliciens pro-Gbagbo, mais il ne fait pas de doute que les FRCI, dont des témoins directs ont évoqué les rafles de jeunes hommes effectuées dans les maisons, ont, elle aussi, fait des victimes.




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1.Posté par Yusuf le 23/05/2011 23:10
Bien

2.Posté par ngavouka le 24/05/2011 13:23
je voudrais dire aux africains que le combat n'est pas terminé
hier c'etait le congo brazzaville ,le gabon,le zaire et aujord'hui c'est le tour de la cote d'ivoire.
gbagbo à commis des crimes,et ouattara allassane est un chef de guerre qui viens d'etre porté au pouvoir, mais qui malheureusement à des mains ..... comme l'autre.

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