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Côte d'ivoire-Grève dans les mairies : Le mot d’ordre largement suivi

Le débrayage de 72 heures annoncé a été largement suivi, le premier jour, dans tout le pays. Même si les responsables municipaux continuent de discuter avec le gouvernement.



La cour d'une mairie vide
La cour d'une mairie vide
Portail principal fermé. Une foule d’usagers qui se font expliquer que tous les services sont arrêtés pour motif de grève. La cour tristement vide, à part trois agents assis sous les arbres à l’entrée du bureau du secrétaire général. Tel était, hier matin le décor, à la mairie de Yopougon. Ici, le mot d’ordre de l’Union des villes et communes de Côte d’Ivoire (Uvicoci) a été observé à la lettre.

Fanta Coulibaly, étudiante, prépare un voyage à l’étranger. Pour l’établissement de son passeport biométrique, elle a déposé, jeudi après-midi, son extrait de naissance à la mairie de Yopougon afin d’obtenir une copie conforme. Rendez-vous lui a été donné lundi. Voilà que cela coïncide avec le mouvement de grève. Désemparée, elle tente de convaincre, sans succès les gardiens commis à la surveillance de l’entrée de la mairie. «J’ai tout fait. Mais on me refuse l’entrée. Or j’ai rendez-vous cet après-midi à la direction de la sûreté nationale pour mon passeport. Seule la copie de l’extrait de naissance manque à mon dossier. Je ne sais que faire», se lamente-t-elle.

Au portail, les entrées sont filtrées. Les quelques personnes qu’on laisse entrer ne viennent pas pour des raisons de service. Deux gardes municipaux dont l’un porte un pantalon treillis et un T-shirt du récent mariage collectif des agents municipaux, sont stricts. Coléreux même parfois. «Vous-là, on dit qu’il n’y a pas travail aujourd’hui. Nous sommes en grève. Repassez jeudi prochain», ne cessaient-ils de lancer aux visiteurs.

A l’intérieur, la vaste cour est désespérément vide. Tous les bureaux sont fermés. A l’exception de celui de M. Lasme Essis, le secrétaire général de cette mairie. Deux gendarmes y font leur entrée et en ressortent quelques instants après. Entouré de trois collaborateurs, M. Lasme Essis se contente de dire : «Tout est fermé aujourd’hui. Pour de plus amples renseignements, l’Uvicoci qui a lancé son mot d’ordre est la mieux indiquée». Par rapport à sa présence au bureau, il explique rapidement qu’il «est de par sa fonction, le premier agent à venir au travail et le dernier à partir». La chaleur est intenable dans le bureau de M. Lasme Essis. L’ouverture des portes et fenêtres ne change pas grand-chose à la situation. L’homme transpire à grosses gouttes. Un peu gêné, il explique que la fourniture de l’électricité est interrompue depuis ce matin (ndlr : hier). Sans plus. Or, toutes les habitations environnantes ont de l’électricité. En réalité, la Compagnie ivoirienne d’électricité (Cie) a retiré le compteur de la plus grande commune de Côte d’Ivoire « pour facture impayée ». Le montant ? Un mystère. Aucun des agents rencontrés sur place n’a voulu en dire un mot. Cependant, Ils font savoir, unanimement, que la mairie de Yopougon n’est pas à sa première suspension de fourniture d’électricité. Ces travailleurs ont tout de même dit sous le couvert de l’anonymat «qu’ils ne sont pas encore payés depuis la fin du mois». «Nous sommes d’accord avec les maires », clament-ils. Entre autres, ils évoquent le manque de fournitures de bureau tels que l’encre, les extraits de naissance vierges pour le service de l’état civil. «Aucun fournisseur n’accepte nos bons. Régulièrement nous assistons aux visites des huissiers de justice pour les saisies des biens de la mairie sur plainte des fournisseurs. Trop, c’est trop !», soutient l’un d’entre eux qui a accepté d’être un peu bavard.

En dehors des services centralisés, les agents rencontrés sur place affirment que les collecteurs sur les marchés, les agents affectés dans les cimetières pour le contrôle des permis d’inhumer sont concernés par le mouvement. Aucun acte administratif n’est donc posé depuis hier matin à Yopougon par les services municipaux. Au cimetière municipal, des agents, rencontrés aux environs de 10h30, ont indiqué «ne pas encore enregistré d’enterrement ce lundi ». Mais, leur chef tout en refusant de donner des informations sur la grève, indique : « Il nous arrive de ne pas recevoir un seul corps, certains jours ».

L’abattoir de Yopougon (route de Dabou) a par contre fonctionné. Les agents chargés d’émettre les tickets de mairie ont travaillé. Les bouchers ont clamé en chœur ne «pas savoir si la grève les concernaient». «Qui a dit qu’il y a grève ? Les agents de la mairie nous ont déjà déposé les billets ce matin », affirment-ils. Ces tickets sont-ils ceux de la mairie de Yopougon dont les bureaux sont fermés ou ceux émis par les agents eux-mêmes ? Difficile de répondre à cette étant donné qu’aucun interlocuteur n’était disponible dans cette mairie.

Les maires maintiennent leur mot d’ordre

Toutes les communes que nous avons joint par téléphone, ont respecté le mot d’ordre de grève. Notre volonté de marquer le coup a été exécutée pratiquement à 100% pour ce premier jour ». Ces propos du président de l’Union des villes et communes de Côte d’Ivoire ne laissent pas présager des perspectives heureuses pour la suite des événements, du moins pour les prochaines 48 heures. Les négociations entamées hier par le ministre de l’Intérieur, la tutelle politique des communes, avec les maires n’ont pu désarmocer le mouvement. Ce, pour la simple raison que les animateurs du développement local attendent désormais plus d’actes concrets du gouvernement que des professions de foi. « Le ministre de l’Intérieur nous a demandés de rouvrir les mairies tout en poursuivant les discussions. Cette proposition ne nous a pas agréés parce qu’on nous fait trop de promesses depuis bientôt six ans sans suite », a fait remarquer le président de l’Uvicoci, François Albert Amichia, le maire de Treichville. Toutefois, aucune des deux parties n’a fermé la porte au dialogue. Le gouvernement et les mairies continuent de rechercher des solutions concertées pour trouver une issue à la crise. Ce matin à 10 heures, le ministre de l’Intérieur et les maires seront reçus par le ministre de l’Economie et des Finances, Charles Diby. Le financier du gouvernement ivoirien qui connaît au mieux les réalités des caisses de l’Etat va-t-il faire le miracle qu’il faut ? En tous les cas, les maires veulent épuiser tous les recours, en espérant, avec la diligence du Chef de l’Etat, avoir une approche de solution à leur problème avant son voyage au Nigeria pour le sommet de le Cedeao.

Korhogo: le maire seul à son poste

Le mot d’ordre, lancé par Union des villes et communes de Côte d’Ivoire (Uvicoci) demandant aux mairies de fermer pour protester contre les problèmes de trésorerie qu’elles connaissent, n’a pas eu le même écho auprès de l’équipe municipale et les agents. Lundi matin, les usagers ont constaté que les portes des services de la mairie sont restées fermées. Coulibaly Yacouba, le secrétaire de la section du Syndicat national des personnels communaux de Côte d’Ivoire (Synapeco-Ci), rencontré sur les lieux, nous a confirmé qu’ils sont en grève à la suite du mot d’ordre de l’Uvicoci. En quoi cet appel les concernerait-il ? «C’est un mouvement général», nous a-t-il simplement répondu. Et pourtant les services financiers et les archives sont ouverts. Pour sa part, M. Lacina Koné, troisième adjoint au maire et maire résident, est à son poste signant les actes de naissance. Lui aussi a été surpris comme les usagers d’apprendre que les agents municipaux sont en grève à compter du lundi 15 décembre. «J’ai constaté ce matin que les agents sont en grève», nous a-t-il confié. Ce sont d’ailleurs eux qui l’ont informé de ce débrayage. «J’ai donc pris acte de leur décision. Mais j’avoue que je n’en comprends pas les raisons puisque l’Uvicoci, c’est l’affaire des maires et ce sont les agents qui en font leur problème», a-t-il commenté. M. Koné expliquera qu’il ne se sent pas concerné par ce mouvement. Car s’il le trouve légitime dans le fond à cause des problèmes de trésorerie que les mairies connaissent, dans la forme, il récuse parce qu’ils n’ont pas été associés à cette décision et ne sont pas informés de son exécution. «Je suis donc à mon poste», a-t-il conclu.
Source: Fratmat.info


Mardi 16 Décembre 2008 - 16:24


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