Il est plus de minuit, entre mardi et mercredi, quand la juge Virginia Illanes Bordon répond au téléphone. Sa journée a commencé à 7 h du matin, dès le lever du soleil. Elle est loin d’être terminée. Il reste encore à la magistrate de longues heures de travail admnistratif. Ce mardi a été consacré à la récupération des corps des victimes, dont la navigatrice Florence Arthaud, la nageuse Camille Muffat et le boxeur Alexis Vastine. Les identifications ont commencé loin des lieux du drame.
Concernant l'origine du crash, la juge Llanes Bordon est très prudente. Par respect pour les familles, elle refuse de privilégier une hypothèse plutôt qu’une autre dans cette affaire. C’est aux experts en aéronautique de déterminer les causes de l’accident, répète-t-elle, avant de rassurer : « Depuis le début, j’essaie de travailler dans des temps records car ce sont deux pays qui sont en deuil, la France et l’Argentine, le monde du sport aussi, et bien sûr 10 familles qui ont été détruites. »
« Je veux pouvoir donner des réponses le plus vite possible », ajoute la juge, alors que la province de La Rioja, où a eu lieu le crash, a décrété deux jours de deuil.« Nous sommes tristes. Cette tragédie nous touche au plus profond de nous-mêmes », confie-t-elle, avant de glisser : « En tant que juge, j’ai eu affaire à des meurtres, des délits. Mais une affaire de cette envergure, c’est la première fois. »
Les survivants de l'équipe de « Dropped » attendent la juge
L'enquête prend le temps nécessaires, et les questions restent donc, en attendant ses conclusions, nombreuses. La principale étant bien sûr : l'accident est-il dû à une défaillance humaine - et si oui laquelle -, ou à une défaillance technique ? Mercredi soir, deux experts français du BEA sont attendus sur les lieux. Ils ont été dépêchés dans le cadre de l’entente judiciaire entre les deux pays, et suite à l’ouverture d’une enquête pour homicide involontaire à Paris. Ils retrouveront les experts argentins qui ont commencé les investigations sur les épaves des deux hélicoptères.
Ensemble, ils vont étudier les débris, mais aussi les images de l’accident, ainsi que les téléphones portables des victimes, tandis que les membres de l’équipe de tournage française qui n’étaient pas dans les hélicoptères accidentées, soit une quarantaine de personnes, ont été regroupés à Villa Union, la principale agglomération de la région, à 37 kilomètres de Villa Castelli où a eu lieu le crash. La juge Virginia Llanes Bordon devait s’y rendre ce mercredi matin pour entendre certaines de ces personnes.
Les protagonistes sont évidemment sous le choc. Une cellule psychologique a été mise en place pour les aider à surmonter cette épreuve. Malgré cela, l’urgence est de répondre à la justice. Combien de temps leur faudra encore rester sur place ? En principe, l’équipe a décidé de ne pas se séparer. Tous devraient demeurer à Villa Union en attendant que la juge ait entendu ceux dont elle demandera le témoignage. Le consul de France à Buenos Aires et l’attaché de sécurité intérieure de l’ambassade sont arrivés sur place. Les autorités locales leur ont assuré qu’elles mettraient tout en œuvre pour que l’enquête aboutisse.
Ce que semblent dire les images
Les hélicoptères accidentés étaient des appareils récents, et à la pointe. Si un témoin sur place parle de ratés de l'un des deux engins avant la collision, en France, des images amateurs de l'accident tournent en boucle sur les télévision d'information, où l'on voit les deux se rapprocher rapidement, finissant par voler à quelques mètres l'un de l'autre, l'un se trouvant quelque peu en dessous de l'autre - une position critique - avant le terrible choc. Aux yeux de Luis Angoulo, secrétaire de la sécurité de la province de La Rioja, « on dirait que le pilote n'a pas vu l'autre appareil. »
L'ancien commandant de bord Jean Serrat relate que pour ce genre d’accidents, il y a généralement deux explications possibles. L’une d’ordre technique, « qui conduirait l’un des deux hélicoptères à faire une embardée et à venir percuter l’autre », et l'autre d'ordre humain, donc : « Soit parce que (l'un des pilotes) a eu l’attention attirée par autre chose, soit parce qu’ils sont (tous deux) arrivés avec un angle où ils ne se sont pas vus, les deux hélicoptères se sont rapprochés, et à un moment donné, avec le souffle d’un côté, et l’aspiration du rotor de l’autre, ils se sont attirés l’un vers l’autre. »
Encore beaucoup de questions
À la vue des vidéos fournies, Jean Serrat penche pour la seconde hypothèse, d’autant que l’un des deux a l’air pratiquement de décrocher parce qu’il est attiré par le rotor de celui qui est en dessous. « On le voit bien, analyse-t-il, celui qui est dessus bascule sur la droite, comme s’il n’avait plus de portance. » Et l'ancien pilote de rappeler que des procédures de sécurité existent lorsque deux hélicoptères se suivent en vol : « Il faut toujours non seulement garder à vue l’autre avion, mais aussi garder bien sûr un périmètre d’à peu près une trentaine de mètres de part et d’autre. »
Point de questionnement « extrêmement important selon lui » : « L’être humain ne peut pas faire deux choses en même temps. Par exemple, si vous conduisez votre voiture et que vous téléphonez en même temps, à un moment, votre attention ne sera pas focalisée sur la route.Dans l’hélicoptère, est-ce que quelqu’un a parlé (au pilote) ? Un caméraman ? Il a perdu ainsi quelques instants d’attention ? » D'où d'autres questions induites : y avait-il des séquence de tournage prévues en l'air, et si oui les pilotes étaient-ils au fait des procédures que cela induit ?
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