Plus de vingt ans après les massacres commis dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), l’ancien chef de guerre Roger Lumbala, ex-dirigeant du RCD-National (Rassemblement congolais pour la démocratie–National) et ministre du Commerce de 2003 à 2005, comparaît devant la Cour d’assises de Paris dans le cadre de la compétence universelle, un dispositif qui permet à la justice française de juger des crimes commis à l’étranger lorsque l’auteur allégué est en France. Il est poursuivi entre autres pour complicité de crimes contre l’humanité et participation à une association de malfaiteurs avec Jean-Pierre Bemba, actuel vice-Premier ministre de la RDC et ancien chef rebelle. Dans les territoires du Haut-Uele et en Ituri, personne n’a oublié le nom de l’opération baptisée « Effacer le tableau ». D’octobre à décembre 2002, les miliciens du RCD-N de Roger Lumbala et les troupes du MLC de Jean-Pierre Bemba multiplient les attaques contre les civils.
Opération « Effacer le tableau », l'alliance des chefs de guerre
Des enquêteurs de l’ONU, dépêchés sur place après les alertes de la Monuc (première opération de maintien de la paix en RDC en 1999 devenue Monusco en 2010), décrivent dans un rapport publié en juillet 2003 des crimes d’une ampleur inouïe : exécutions sommaires, viols systématiques de jeunes filles, esclavage, torture visant particulièrement les populations Batwa et Nande.
Sept ans plus tard, un autre rapport d’envergure, le « Projet Mapping », vient compiler et compléter l'ensemble des rapports déjà existants. Publié en 2010, ce document cartographie les crimes commis en RDC entre mars 1993 et juin 2003. Réalisée de 2008 à 2009 par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), cette enquête de plus de mille pages rassemble un millier de témoignages des horreurs vécues.
Mais ses conclusions, vivement contestées par le Rwanda et l’Ouganda, accusés d’avoir participé à certains massacres, ont longtemps dormi dans les tiroirs des Nations unies. C’est à la suite d’une fuite dans le quotidien Le Monde que le rapport a enfin attiré l’attention internationale sur l’ampleur des crimes commis en RDC durant cette décennie.
Dans le documentaire L’Empire du silence de Thierry Michel, Luc Henkinbrant, ancien officier des droits de l’homme pour les Nations unies en RDC, révèle l’existence d’annexes secrètes contenant les noms des auteurs allégués. Luc Côté, directeur exécutif du projet Mapping, se défend et précise que ces annexes pourraient servir dans le cadre d’enquêtes judiciaires. C’est justement l’ensemble de ces rapports onusiens et les témoignages directs qui ont permis d’inculper Roger Lumbala.
De la rébellion à la justice française
Installé en France en 1998, Roger Lumbala avait obtenu le statut de réfugié politique avant de rejoindre la rébellion congolaise, perdant de facto cette protection. En 2012, revenu à Paris, il redemande l’asile. L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) rejette sa requête, considérant qu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’il a participé à des crimes graves. Sur la base de ces éléments, le Parquet national antiterroriste (PNAT) ouvre en 2016 une enquête préliminaire, confiée à l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité (OCLCH). En décembre 2020, il est interpellé à Paris, puis mis en examen le 4 janvier 2021.
Après deux ans d’instruction, les juges du pôle « crimes contre l’humanité » rendent, en novembre 2023, une ordonnance de mise en accusation : pour la première fois, un ressortissant congolais est renvoyé devant les assises françaises sur le fondement de la compétence universelle.
Opération « Effacer le tableau », l'alliance des chefs de guerre
Des enquêteurs de l’ONU, dépêchés sur place après les alertes de la Monuc (première opération de maintien de la paix en RDC en 1999 devenue Monusco en 2010), décrivent dans un rapport publié en juillet 2003 des crimes d’une ampleur inouïe : exécutions sommaires, viols systématiques de jeunes filles, esclavage, torture visant particulièrement les populations Batwa et Nande.
Sept ans plus tard, un autre rapport d’envergure, le « Projet Mapping », vient compiler et compléter l'ensemble des rapports déjà existants. Publié en 2010, ce document cartographie les crimes commis en RDC entre mars 1993 et juin 2003. Réalisée de 2008 à 2009 par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), cette enquête de plus de mille pages rassemble un millier de témoignages des horreurs vécues.
Mais ses conclusions, vivement contestées par le Rwanda et l’Ouganda, accusés d’avoir participé à certains massacres, ont longtemps dormi dans les tiroirs des Nations unies. C’est à la suite d’une fuite dans le quotidien Le Monde que le rapport a enfin attiré l’attention internationale sur l’ampleur des crimes commis en RDC durant cette décennie.
Dans le documentaire L’Empire du silence de Thierry Michel, Luc Henkinbrant, ancien officier des droits de l’homme pour les Nations unies en RDC, révèle l’existence d’annexes secrètes contenant les noms des auteurs allégués. Luc Côté, directeur exécutif du projet Mapping, se défend et précise que ces annexes pourraient servir dans le cadre d’enquêtes judiciaires. C’est justement l’ensemble de ces rapports onusiens et les témoignages directs qui ont permis d’inculper Roger Lumbala.
De la rébellion à la justice française
Installé en France en 1998, Roger Lumbala avait obtenu le statut de réfugié politique avant de rejoindre la rébellion congolaise, perdant de facto cette protection. En 2012, revenu à Paris, il redemande l’asile. L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) rejette sa requête, considérant qu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’il a participé à des crimes graves. Sur la base de ces éléments, le Parquet national antiterroriste (PNAT) ouvre en 2016 une enquête préliminaire, confiée à l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité (OCLCH). En décembre 2020, il est interpellé à Paris, puis mis en examen le 4 janvier 2021.
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