RFI : Montassar, vous êtes né en France, à Paris, mais vous avez aussi grandi en Tunisie. Comment s’est construit votre rapport au pays dont vous portez aujourd’hui le maillot ?
Montassar Talbi : Dès le plus jeune âge, tous les étés, j'avais la chance de pouvoir partir en Tunisie, aller chez ma grand-mère, chez mes tantes, avec mes cousins. Parfois, on allait voir des matchs de l'Espérance de Tunis ou même de l'équipe nationale. Donc, j'avais vraiment cette chance de pouvoir être toujours connecté à mon pays dès le plus jeune âge. Et à partir de 12 ans, je suis parti vivre là-bas. J’ai fait le collège, le lycée, et mes premiers pas en pro là-bas ! Mais dès le plus jeune âge, mes proches m’ont inculqué cet amour de la Tunisie et de ses traditions.
C’est aussi là-bas que vous avez découvert l’amour du football ?
La Tunisie est un pays très populaire, qui adore le foot. On y joue partout. Donc j’ai commencé par jouer ce football de rue et très vite, j’ai dit à mes parents de m’inscrire en club. Mais ça a commencé dans la rue, dans mon quartier, avec mes cousins.
Qu’avez-vous appris de ce football de rue en tant que défenseur ? En général, on le retrouve plutôt dans le jeu des attaquants !
Dans le football de rue, il n’y a pas d’arbitre. Donc il faut beaucoup de vice, encore plus lorsque tu le joues en Tunisie. C’est du vice, de l'agressivité, de l'intelligence et il faut rentrer aussi dans la tête de l'adversaire. Donc franchement, c'est un tout et on peut l'utiliser aujourd'hui dans le monde professionnel !
Aujourd’hui, la rue est loin. Avez-vous conscience d’être devenu un pilier des Aigles de Carthage ? Depuis vos débuts en 2021, vous cumulez le plus gros temps de jeu avec la Tunisie. Vous avez même déjà porté le brassard une fois (en 2023, contre la Guinée Equatoriale). On peut parler de taulier !
J’en suis conscient ! Je sais que je suis un cadre de la sélection, et j’assume mes responsabilités. Il y a bientôt cinq ans, je faisais mes premiers pas et des cadres m'ont tiré vers le haut. Petit à petit, j'ai engrangé de l'expérience et de la crédibilité au vu de mes prestations en Coupe du monde et en Coupe d'Afrique. Ça a pris du temps et maintenant j’essaie d’assumer ce rôle au maximum. C'est beaucoup de responsabilités, mais pouvoir être une personne sur laquelle l'équipe nationale peut compter, c’est exceptionnel, une fierté. Individuellement, je dois être à la hauteur et faire profiter de mon expérience, mon savoir-faire et ma bonne énergie aux joueurs autour de moi et surtout aux jeunes qui rejoignent la sélection.
Vous qui connaissez bien le groupe justement, est-ce qu'on n'oublie pas un petit peu la Tunisie parmi les favoris de cette CAN ? On parle beaucoup du Maroc, bien sûr, du Sénégal, de la Côte d’Ivoire. Est-ce que la Tunisie fait partie de ce club ?
Non, et ce n'est pas plus mal ! Laissez-nous comme ça… (rires) Franchement, on va laisser le statut de favori à ces équipes qui le méritent. Nous, on sait que malheureusement, à la dernière Coupe d'Afrique, on est passé au travers, on est sorti en poules, ce qui était vraiment une catastrophe.
Depuis, on a essayé de se reconstruire, de bâtir un collectif, de s'appuyer sur des bons résultats lors de la dernière campagne de qualification à la Coupe du monde. Même le dernier match contre le Brésil, je pense que ça a été très cohérent avec un gros match et un bon résultat. On essaie de monter en puissance et de se concentrer sur nous-mêmes. On ne va pas crier haut et fort qu'on veut gagner cette CAN, au contraire, mais on veut aller le plus loin possible. On a le statut d'outsider, je pense que c'est plutôt logique. On va essayer de figurer au mieux dans cette compétition, mais on reste confiants malgré tout.
Dans votre club de Lorient (Ligue 1, France), il y a quatre autres joueurs qui vont disputer la CAN : Arsène Kouassi (Burkina Faso), Ayegun Tosin (Bénin) Darlin Yongwa et Arthur Avom Ebong (Cameroun). La compétition avait déjà commencé entre vous dans le vestiaire ?
Oui, un peu. De toute façon, on se charrie toujours. Arthur, il aime bien ça. Les Camerounais, ils ont une grande confiance en eux et je peux les comprendre parce que je pense qu’au niveau africain, c'est très fort. Et ils auront à cœur de prendre une revanche par rapport à la Coupe du monde. Donc on se charrie mais on ne veut pas non plus parler trop vite, parce qu'il peut toujours y avoir des désillusions. On verra au retour qui sera allé le plus loin. J'espère vraiment que les joueurs lorientais pourront réaliser la meilleure compétition possible. Mais voilà, encore plus pour la Tunisie bien sûr... (sourire)
Quel est votre plus beau souvenir de la CAN ? Vous vous apprêtez à en disputer une troisième avec les Aigles… À moins que ce ne soit un souvenir en tant que supporter ?
En tant que joueur, c’était pendant ma première CAN au Cameroun, en 2022. On bat le Nigéria en huitième de finale. Il y avait le Covid, la moitié de l'équipe était absente ! Tout le monde nous voyait perdre contre le Nigeria, qui était le favori de la compétition. Nous, on jouait peut-être avec une équipe un peu remaniée mais on fait un match exceptionnel de solidarité et d'envie et on a arraché cette victoire (1-0).
Et sinon, c'est vraiment la victoire en 2004 à domicile, lorsqu'on gagne notre première CAN, et notre seule pour l'instant contre le Maroc. C'était il y a 21 ans. J'avais 6 ans mais j’ai le souvenir de cette victoire et ce grand match contre le Maroc. Je l’ai vécu en famille, à la maison. Mon père ne montre pas beaucoup ses émotions, mais je peux vous dire qu'il était vraiment très content, très excité. De le voir comme ça, se lever du canapé, c'était incroyable ! Je pense que ça m'a plus marqué que les buts en eux-mêmes. C'est le souvenir que je retiens.
Désormais, votre père et tous vos proches vous voit devenir un joueur important de cette sélection nationale… Quels sentiments les animent ?
De la fierté je pense. On ne va pas se le dire directement, mais je peux le voir dans leurs yeux, quand on débriefe les matchs ensemble. De la fierté et beaucoup d’attente. C'est aussi ce qui nous pousse à réaliser de grandes choses, à faire des sacrifices, à se donner au maximum parce qu'on voit la joie que ça peut procurer à nos proches, et aussi à tout le peuple tunisien.
Lorsque je quitte un rassemblement, je passe par l'aéroport, ou bien j'ai peut-être une petite soirée où je peux sortir dîner avec ma famille. À ce moment-là, je vois vraiment beaucoup de joie et de fierté dans les yeux des Tunisiens. C'est un tout. Ça donne vraiment envie de performer encore plus et de faire les meilleurs résultats.
Montassar Talbi : Dès le plus jeune âge, tous les étés, j'avais la chance de pouvoir partir en Tunisie, aller chez ma grand-mère, chez mes tantes, avec mes cousins. Parfois, on allait voir des matchs de l'Espérance de Tunis ou même de l'équipe nationale. Donc, j'avais vraiment cette chance de pouvoir être toujours connecté à mon pays dès le plus jeune âge. Et à partir de 12 ans, je suis parti vivre là-bas. J’ai fait le collège, le lycée, et mes premiers pas en pro là-bas ! Mais dès le plus jeune âge, mes proches m’ont inculqué cet amour de la Tunisie et de ses traditions.
C’est aussi là-bas que vous avez découvert l’amour du football ?
La Tunisie est un pays très populaire, qui adore le foot. On y joue partout. Donc j’ai commencé par jouer ce football de rue et très vite, j’ai dit à mes parents de m’inscrire en club. Mais ça a commencé dans la rue, dans mon quartier, avec mes cousins.
Qu’avez-vous appris de ce football de rue en tant que défenseur ? En général, on le retrouve plutôt dans le jeu des attaquants !
Dans le football de rue, il n’y a pas d’arbitre. Donc il faut beaucoup de vice, encore plus lorsque tu le joues en Tunisie. C’est du vice, de l'agressivité, de l'intelligence et il faut rentrer aussi dans la tête de l'adversaire. Donc franchement, c'est un tout et on peut l'utiliser aujourd'hui dans le monde professionnel !
Aujourd’hui, la rue est loin. Avez-vous conscience d’être devenu un pilier des Aigles de Carthage ? Depuis vos débuts en 2021, vous cumulez le plus gros temps de jeu avec la Tunisie. Vous avez même déjà porté le brassard une fois (en 2023, contre la Guinée Equatoriale). On peut parler de taulier !
J’en suis conscient ! Je sais que je suis un cadre de la sélection, et j’assume mes responsabilités. Il y a bientôt cinq ans, je faisais mes premiers pas et des cadres m'ont tiré vers le haut. Petit à petit, j'ai engrangé de l'expérience et de la crédibilité au vu de mes prestations en Coupe du monde et en Coupe d'Afrique. Ça a pris du temps et maintenant j’essaie d’assumer ce rôle au maximum. C'est beaucoup de responsabilités, mais pouvoir être une personne sur laquelle l'équipe nationale peut compter, c’est exceptionnel, une fierté. Individuellement, je dois être à la hauteur et faire profiter de mon expérience, mon savoir-faire et ma bonne énergie aux joueurs autour de moi et surtout aux jeunes qui rejoignent la sélection.
Vous qui connaissez bien le groupe justement, est-ce qu'on n'oublie pas un petit peu la Tunisie parmi les favoris de cette CAN ? On parle beaucoup du Maroc, bien sûr, du Sénégal, de la Côte d’Ivoire. Est-ce que la Tunisie fait partie de ce club ?
Non, et ce n'est pas plus mal ! Laissez-nous comme ça… (rires) Franchement, on va laisser le statut de favori à ces équipes qui le méritent. Nous, on sait que malheureusement, à la dernière Coupe d'Afrique, on est passé au travers, on est sorti en poules, ce qui était vraiment une catastrophe.
Depuis, on a essayé de se reconstruire, de bâtir un collectif, de s'appuyer sur des bons résultats lors de la dernière campagne de qualification à la Coupe du monde. Même le dernier match contre le Brésil, je pense que ça a été très cohérent avec un gros match et un bon résultat. On essaie de monter en puissance et de se concentrer sur nous-mêmes. On ne va pas crier haut et fort qu'on veut gagner cette CAN, au contraire, mais on veut aller le plus loin possible. On a le statut d'outsider, je pense que c'est plutôt logique. On va essayer de figurer au mieux dans cette compétition, mais on reste confiants malgré tout.
Dans votre club de Lorient (Ligue 1, France), il y a quatre autres joueurs qui vont disputer la CAN : Arsène Kouassi (Burkina Faso), Ayegun Tosin (Bénin) Darlin Yongwa et Arthur Avom Ebong (Cameroun). La compétition avait déjà commencé entre vous dans le vestiaire ?
Oui, un peu. De toute façon, on se charrie toujours. Arthur, il aime bien ça. Les Camerounais, ils ont une grande confiance en eux et je peux les comprendre parce que je pense qu’au niveau africain, c'est très fort. Et ils auront à cœur de prendre une revanche par rapport à la Coupe du monde. Donc on se charrie mais on ne veut pas non plus parler trop vite, parce qu'il peut toujours y avoir des désillusions. On verra au retour qui sera allé le plus loin. J'espère vraiment que les joueurs lorientais pourront réaliser la meilleure compétition possible. Mais voilà, encore plus pour la Tunisie bien sûr... (sourire)
Quel est votre plus beau souvenir de la CAN ? Vous vous apprêtez à en disputer une troisième avec les Aigles… À moins que ce ne soit un souvenir en tant que supporter ?
En tant que joueur, c’était pendant ma première CAN au Cameroun, en 2022. On bat le Nigéria en huitième de finale. Il y avait le Covid, la moitié de l'équipe était absente ! Tout le monde nous voyait perdre contre le Nigeria, qui était le favori de la compétition. Nous, on jouait peut-être avec une équipe un peu remaniée mais on fait un match exceptionnel de solidarité et d'envie et on a arraché cette victoire (1-0).
Et sinon, c'est vraiment la victoire en 2004 à domicile, lorsqu'on gagne notre première CAN, et notre seule pour l'instant contre le Maroc. C'était il y a 21 ans. J'avais 6 ans mais j’ai le souvenir de cette victoire et ce grand match contre le Maroc. Je l’ai vécu en famille, à la maison. Mon père ne montre pas beaucoup ses émotions, mais je peux vous dire qu'il était vraiment très content, très excité. De le voir comme ça, se lever du canapé, c'était incroyable ! Je pense que ça m'a plus marqué que les buts en eux-mêmes. C'est le souvenir que je retiens.
Désormais, votre père et tous vos proches vous voit devenir un joueur important de cette sélection nationale… Quels sentiments les animent ?
De la fierté je pense. On ne va pas se le dire directement, mais je peux le voir dans leurs yeux, quand on débriefe les matchs ensemble. De la fierté et beaucoup d’attente. C'est aussi ce qui nous pousse à réaliser de grandes choses, à faire des sacrifices, à se donner au maximum parce qu'on voit la joie que ça peut procurer à nos proches, et aussi à tout le peuple tunisien.
Lorsque je quitte un rassemblement, je passe par l'aéroport, ou bien j'ai peut-être une petite soirée où je peux sortir dîner avec ma famille. À ce moment-là, je vois vraiment beaucoup de joie et de fierté dans les yeux des Tunisiens. C'est un tout. Ça donne vraiment envie de performer encore plus et de faire les meilleurs résultats.
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