L’étincelle qui a mis le feu aux poudres est l’augmentation substantielle des frais universitaires déjà particulièrement élevés, couplée au nombre insuffisant de bourses d’études. Hier, il y a quelques mois, c’était le racisme, réel ou supposé, dans ces mêmes universités qui était dénoncé : trop d’étudiants et de professeurs blancs au regard de leur réel poids démographique. Soweto 1976, Johannesburg, Pretoria ou Le Cap 2015 : les enfants des écoliers qui se soulevèrent contre l’apartheid se réveillent. Une pancarte brandie par les manifestants résume à elle seule l’amertume de cette jeunesse sans guide ni boussole : « Vous avez vendu du rêve à nos parents en 1994. Nous sommes là pour être remboursés ! »
Ce n’est là qu’un des nombreux symptômes du malaise profond qui étreint l’Afrique du Sud. Pauvreté et chômage endémiques (un jeune sur deux !), inégalités sociales, corruption rampante, impunité de la classe d’« en haut », clientélisme, incessantes coupures de courant, drame de Marikana (plus d’une trentaine de mineurs grévistes abattus par les forces de sécurité), hausse de la criminalité…
Les raisons de la colère sont nombreuses, et cette dernière s’exprime de plus en plus ouvertement, avec de fâcheux dégâts collatéraux, comme les violences xénophobes récurrentes contre des ressortissants africains devenus les boucs émissaires des problèmes du pays. Pour la seule année 2014, on a dénombré plus de deux cents manifestations d’envergure contre les autorités, souvent accompagnées de violences. Après les étudiants, 30 000 partisans des Combattants pour la liberté économique de Julius Malema (extrême gauche) ont défilé dans les rues de Johannesburg pour réclamer, entre autres, la nationalisation des grandes entreprises. L’impatience se mue chaque jour un peu plus en une incontrôlable effervescence. Les digues sautent les unes après les autres.
S’il semble qu’il ne faille rien attendre d’autre d’un Jacob Zuma passé maître dans l’art de l’inertie que son départ (en 2019), l’ANC, lui, ne peut fermer plus longtemps les yeux. Le parti de Mandela qui doit se retourner dans sa tombe n’est plus que le fantôme bedonnant et embourgeoisé de ce qu’il fut. Maître incontesté de la scène politique depuis 1994, remportant sans coup férir chacun des scrutins organisés depuis, il pourrait et même devrait – mettre à profit l’incroyable défiance qui s’exprime aujourd’hui dans les rues du pays pour se renouveler.
Comme c’est le cas en Algérie avec le Front de libération nationale (FLN), les jeunes Sud-Africains, qui n’ont pas connu l’apartheid, n’ont cure des états de service de l’ANC et du combat pour la liberté mené par des figures tutélaires qu’ils ne connaissent qu’à travers les livres d’histoire. Ils veulent des dirigeants politiques qui répondent à leurs attentes, tiennent leurs promesses et se préoccupent de leur avenir, point.
Tant que l’ANC ne craignait rien et écrasait de tout son poids la vie politique du pays, les changements attendus n’étaient que vœux pieux. Aujourd’hui, la colère des jeunes, la pression de la rue, mais aussi l’activisme des dissidences politiques (Malema) et syndicales, comme l’émergence d’une opposition plus vigoureuse (l’Alliance démocratique), représentent une bonne nouvelle pour l’Afrique du Sud, car tout cela ne peut que concourir il en est grand temps ! à réveiller l’ANC.
source:jeune Afrique
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