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Conséquences des grèves du SYTJUST : des centaines de dossiers et de financements en souffrance – l’Apix et les notaires les plus impactés

L’onde de choc de la série de grèves des agents militants du Syndicat des travailleurs de la Justice (SYTJUST) semble insondable. Les mots d’ordre s’enchainent, les dossiers de financements dans les banques sont bloqués, et les procédures de création d’entreprises en panne. Les notaires n’arrivent plus à avancer sérieusement dans leurs actes. PressAfrik s’est intéressé aux dégâts collatéraux de ces grèves illimitées et donnant la parole aux véritables impactés.



Les remous dans le secteur de la Justice n’impactent pas seulement les citoyens à la recherche de casiers judiciaires et de certificats de nationalité. Depuis presque deux mois, tous les actes sont bloqués. Le bras de fer entre le ministre de la Justice, Garde des sceaux, Malick Sall et le Syndicat des travailleurs de la Justice s’est envenimé. Les syndicalistes reprochent au ministre de vouloir saboter les réformes entamées depuis plusieurs années pour améliorer leurs conditions de travail.

L’impasse dans les négociations a occasionné une série de grèves illimitées. Ce mouvement d’humeur qui s’éternise commence à peser lourd dans le fonctionnement de la Justice mais aussi dans d’autres secteurs d’activités. Actuellement, il y a des blocages un peu partout. Le travail des Notaires, surtout à la Chambre de commerce et du Tribunal est au ralenti. Ils ne peuvent plus immatriculer ou délivrer des registres de commerce. Des documents essentiels pouvant permettre aux ayants-droit de créer une entreprise, de débloquer des fonds au niveau des banques ou d’accéder à d’autres types de financements.

PressAfrik a essayé d’en savoir plus sur ces blocages et le manque à gagner causés par cette grève des travailleurs de la justice. Une visite incognito à l’Agence nationale pour la promotion des investissements et des grands travaux (APIX) a permis de constater le blocage. Alors qu’un Notaire et un chef d’exploitation au niveau du quai de pêche de Yoff (Dakar) ont expliqué les conséquences  de cette grève qui ne fait que durer, dans leurs secteurs.
 
Entrée incognito à l’Agence nationale pour la promotion des investissements et des grands travaux (APIX), l’espace réservé à la création d’entreprise est vide. Les gens arrivent au compte-goutte, alors que d’habitude, cette place grouillait de monde. En plus de l’effet Coronavirus, il y a la grève des travailleurs de la justice qui est passée par là. L’affluence est trop faible. Elle est même quasi-inexistante. Un agent interpellé au pif dans ce grand espace peuplé de bureaux où les différents services qui interviennent dans la création d’entreprise sont représentés, de regretter : «depuis le mois de juin dernier, aucune entreprise n’a été créée au Sénégal».
 
Cela n’empêche en bons patriotes, ils sont toujours droits dans leurs bottes au service. «Contrairement à la Chambre de commerce et au Tribunal, on ne ferme pas les portes. Les dossiers sont reçus et le délai de traitement est normalement de 48 heures». Notre interlocuteur tente ainsi de nous orienter auprès du responsable du bureau en pointant du doigt des offices au fond de la salle encastrés dans du verre. 
 
Pour éviter d’éveiller des soupçons et que la gendarme nous mette à la porte, nous nous sommes tournés vers un autre agent d’âge mûr et bien bâti. 
 
«Les dossiers s’accumulent par centaines et nous sommes incapables de donner une date pour la délivrance du registre de commerce et du NINEA. On ignore la fin de cette grève et ça devient de plus en plus compliqué», a-t-il souligné.

Le fait que les dossiers s'accumulent au niveau de l'APIX, a eu des conséquences chez les promoteurs qui s’impatientent et aussi au niveau de la Diaspora. Ces derniers se trouvent bloqués au Sénégal, car ne pouvant pas rentrer sans leurs documents.  Un expatrié interpellé à sa sortie vers la Maison militaire, de confesser : «Je ne cesse de faire des aller-retour ici. Mon dossier est bloqué et je n’arrive pas à rentrer. Beaucoup d’autres compatriotes qui voulaient profiter de leur séjour ici pour créer, changer les statuts de leur entreprise ont d’énormes difficultés. Ils s’impatientent, ils appellent à longueur de journée pour savoir si leur entreprise a été immatriculée au registre de commerce. Et rien jusqu’ici. La même rengaine : «La grève n’est pas encore terminée», nous dit une dame. 
Plus de délivrance de registres de commerce depuis plus d'un mois
Le constat est le même chez les Notaires. Me Penda Niang Ndiaye, juriste Clerc à l’étude de Me Anta Kane Diallo de confier que depuis cette grève, ils n’arrivent plus à délivrer un registre de commerce ni à soumettre les sociétés dans la plateforme Gaïndé Orbus, conçue pour faciliter les procédures du commerce extérieur par des échanges électroniques. 

« La constitution des sociétés commerciales se passe directement chez le Notaire et donc c’est à ces derniers de faire les sociétés, d’enregistrer les statuts, par la suite de les scanner et de les soumettre dans la plateforme Gaïndé Orbus pour envoyer à l’Apix leur demande de bénéficier d'un registre de commerce, de Ninea et la déclaration d’existence et d’établissement », a expliqué Me Ndiaye. 

À l’en croire, toutes leurs activités en lien avec la création de sociétés sont bloquées. Et, c’est le même constat pour les modifications statutaires qui interviennent au cours de la vie de la société, notamment le changement de gérant, l'augmentation de capital et autres. « Tout est bloqué au niveau du greffe et du tribunal de commerce depuis plus d’un mois », s'est-elle désolée.  

Soulignant que tout était bien parti depuis la proposition du Green business à savoir la diminution des honoraires pour la création d’entreprise, elle a rappelé que : « Le Green business avait fait un rapport qui a amené les Etats à réfléchir sur le fait d’alléger les formalités pour les constitutions de sociétés. Ceci a poussé les notaires à diminuer les honoraires et les autorités législatives à enlever certaines charges, notamment les timbres qu’on mettait sur les sociétés, juste pour attirer, amener ceux qui sont dans l’informel à se formaliser, à rejoindre le secteur formel».

Donc, «cela avait bien commencé avec des résultats parce que les gens parviennent maintenant à créer une société avec 100 000 F Cfa de capital, avec moins de frais. C’était bien parti, mais à cause de cette grève, on est bloqué. Depuis un mois, on ne délivre plus de registre de commerce », a-t-elle déploré. 

Face à cette situation, Me Penda Niang Ndiaye informe qu’ils proposent des attestations, mais cela ne suffit pas selon leurs clients. « Ce document indique que telle société a été créée par acte en telle  date, à telle étude, et que les formalités d’immatriculation de registre du commerce sont en cours », a-t-elle conclu. 

 

Les groupements de femmes ne peuvent pas bénéficier de l’aide de l’Etat en cette période de Covid-19 
Au quai de pêche de Yoff, la conséquence de la grève est tout autre. Ibrahima François Lèye, chef d’exploitation et comptable de profession qui aide les femmes dans le processus de la création de leur GIE, a déploré la situation. « Ça fait plus d’un mois qu’un groupement de femmes a déposé des dossiers pour créer un GIE, mais ces femmes ne parviennent pas à avoir leurs papiers jusqu’à présent », à cause de la grève des travailleurs de la justice. 

Avec la Covid-19, a avancé M. Lèye, « elles ne peuvent pas bénéficier de l'aide dégagée par l’Etat du Sénégal parce qu’elles n’ont pas de papiers, elles ne sont pas reconnues ». « Tout est bloqué, a-t-il pesté, avant de souligner : « Nous avons déposé 5 dossiers au niveau de l’Apix qui attendent la signature du greffier, on ne peut pas faire autre chose qu’attendre ». 

Les intervenants de PressAfrik ont tous demandé à l'Etat et aux grévistes de s'asseoir autour d'une table, de voir les dessous et les dessus des revendications des grévistes,  afin de soulager la population. En mouvement d'humeur depuis le 15 juin, les travailleurs de la justice ne veulent pas lâcher du lest. Une rencontre entre les syndicalistes et le ministre de la Justice Me Malick Sall, est prévue ce lundi à partir de 17 heures.



Lundi 20 Juillet 2020 - 18:05


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