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Après Octobre Rose et Novembre Bleu, écouter enfin le cri silencieux du cancer au Sénégal (Par Boubacar Kambel DIENG)



La Chronique de BDK 

Dakar, 8 déc. 2025 (24e numéro)

Nous sortons à peine d’Octobre Rose, où le pays s’est paré de rose pour rappeler l’urgence du dépistage du cancer du sein, puis de Novembre Bleu, consacré au cancer de la prostate. Deux mois de mobilisation, de messages de prévention, de témoignages courageux.

Deux mois où l’on se sent collectivement concerné, où l’on partage des rubans, des marches, des campagnes, comme pour dire à nos mères, à nos sœurs, à nos pères et à nos frères : « Nous sommes avec vous. »

Mais une fois les lumières tamisées et les slogans rangés, un silence retombe. Un silence lourd. Derrière les couleurs et les symboles, une vérité brutale demeure. Au Sénégal, le cancer tue entre 22 et 23 personnes chaque jour.
Chaque. Jour.

Et cette fois, ce ne sont pas des estimations lointaines ou des extrapolations. Ce sont des chiffres officiels, livrés cette semaine par le ministre de la Santé, Ibrahima Sy, lors de son passage à l’Assemblée nationale, à l’occasion du vote du budget de son ministère. Une annonce qui aurait dû secouer le pays entier.

Car ce rythme effroyable représente plus de 8 000 vies emportées chaque année. Huit mille absences. Huit mille chaises vides. Huit mille familles qui apprennent la nouvelle que personne ne veut entendre. Des mères qui ne voient plus leurs enfants grandir. Des pères qui s’en vont trop tôt. Des jeunes qui n’ont même pas eu le temps de rêver assez fort.

Des familles qui se battent dans les couloirs d’hôpitaux, parfois sans moyens, souvent sans réponses.

J’écris cette chronique parce que ces morts quotidiennes ne font pas la une. Elles ne défilent pas sur nos écrans avec la même intensité que les grandes campagnes de sensibilisation.

Pourtant, ce sont elles qui devraient nous réveiller. Ce chiffre, 22 à 23 décès par jour, dit tout. Il dit le retard des diagnostics, l’insuffisance des équipements, le coût insupportable des traitements, le manque d’accompagnement psychologique. Il dit aussi nos tabous, nos peurs, nos silences.

Certains cancers se développent dans l’ombre, sans bruit, jusqu’à ce qu’il soit trop tard. D’autres sont connus mais redoutés, au point que beaucoup préfèrent ne pas aller se faire dépister. D’autres encore frappent des enfants, rappelant que la maladie n’a ni âge ni préférence.

Et dans tous les cas, ce sont les familles qui portent le fardeau moral, financier…, émotionnel.

Le Plan national de lutte contre le cancer 2025-2029 existe, et il est porteur d’espoir. Il promet de renforcer la prévention, d’améliorer l’accès aux soins, de moderniser les centres, de former davantage de spécialistes. Mais un plan ne sauvera personne s’il n’est pas accompagné d’une mobilisation constante, sincère, tenace.

Le cancer ne disparaît pas une fois Octobre Rose terminé. Il ne se met pas en pause après Novembre Bleu.

Si j’écris aujourd’hui, c’est pour que nous ne laissions pas s’éteindre l’élan de ces deux mois. Pour rappeler que derrière chaque chiffre, il y a un visage, un rire, une histoire. Que derrière chaque décès quotidien, il y a une vie qui aurait peut-être pu être sauvée si nous avions parlé un peu plus tôt, consulté un peu plus vite, soutenu un peu plus fort.

Le cancer n’est pas une fatalité si nous choisissons d’en faire un combat permanent.
Pas un événement annuel.
Pas un rendez-vous symbolique.
Mais une responsabilité collective, urgente, humaine.

Tant que 22 à 23 Sénégalais mourront chaque jour de cette maladie, nous devrons continuer d’alerter, d’écrire, de sensibiliser… et surtout, d’agir.

BKD…


Dimanche 7 Décembre 2025 - 12:17


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