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Il faut (bien) juger Gbagbo


Rédigé le Mardi 10 Mai 2011 à 18:50 | Lu 821 commentaire(s)


Laurent Gbagbo a droit à un procès équitable. Pour lui, mais aussi et surtout pour mettre un terme à plus d’une décennie d’impunité et permettre à un pays traumatisé de se réconcilier enfin.


Les conditions des premières auditions de Laurent et Simone Gbagbo, arrêtés il y a un mois, le 11 avril 2011, laissent à désirer. Et c’est dommage. Ils ont finalement été entendus le week-end du 6 et 7 mai. Les interrogatoires ont eu lieu respectivement à Korhogo et Odienné, dans le nord de la Côte d’Ivoire, où l’ex-couple présidentiel est en résidence surveillée.

Mais les avocats français du couple ayant régné sans partage sur le pays depuis 2000 ont été refoulés dès leur arrivée à Abidjan pour un problème de visa. Ils n’ont pas pu assister à ces premières auditions et se sont empressés de crier au complot, dénonçant un «piège» des nouvelles autorités. Habituelle rhétorique d’avocats.

Mais pourquoi donc arriver à Abidjan sans visa, ou sans les visas délivrés par les autorités compétentes? Préparation insuffisante ou volonté délibérée d’aller à l’affrontement? Les nouvelles autorités ivoiriennes n’auraient-elles pas pu, de leur côté, leur délivrer un visa à l’aéroport d’Abidjan? Elles auraient eu alors le beau rôle, permettant à la défense de l’ennemi d’hier de travailler normalement.

Mais Gbagbo peut difficilement se présenter comme un parangon de démocratie et de justice… Elu pour cinq ans en 2000, il s’est octroyé, «cadeau», un deuxième mandat, avant de plonger son pays dans la plus grave crise depuis l’indépendance en refusant de reconnaître la victoire d’Alassane Ouattara à la présidentielle.

Eviter une «justice du vainqueur»

Et Ouattara, tout nouveau président, a tout à gagner en «offrant» à son adversaire d’hier un procès juste et équitable et en évitant de glisser dans les facilités d’une «justice du vainqueur». Cela serait un signal fort pour la communauté internationale, qui l’a soutenu dans sa difficile marche vers le palais présidentiel, mais aussi et surtout une condition nécessaire pour panser les plaies du passé.

Pour réconcilier la Côte d’Ivoire après une décennie ponctuée par des massacres à forte connotation ethnique et religieuse, il ne faut jamais oublier que près d’un électeur sur deux a voté pour Gbagbo au deuxième tour de la présidentielle, le 28 novembre 2010. Soit 45,9% pour être précis. Il ne faut pas mésestimer non plus qu’il était majoritaire dans la métropole d’Abidjan, forte de cinq millions d’habitants.

Une aide internationale, financière mais aussi technique, est également indispensable pour avoir une justice équitable, avec des magistrats indépendants et des avocats libres de travailler.

Pour tous les électeurs de Gbagbo, un procès juste tournerait la page du passé. Pour ceux de Ouattara, il permettrait de faire le deuil des crimes passés et de se projeter vers l’avenir.

Par contre, si le procès est bâclé, les plaies ne cicatriseront pas, ou mal, très mal.

Gbagbo devant la Cour pénale internationale?

La justice ivoirienne a déjà déclaré qu’elle laisserait la Cour pénale internationale (CPI) enquêter sur les crimes les plus graves, les crimes contre l’humanité, pour ne pas faire doublon avec la juridiction internationale.

Le camp Ouattara a transmis au parquet de la CPI des éléments à charge. La France, qui a fourni un appui militaire décisif lors de la «bataille d’Abidjan» aux troupes de Ouattara, s’est déclaré prête à coopérer. Le camp Gbagbo a voulu, pour sa part, se convaincre qu’une saisine de la CPI était juridiquement impossible. C’est faux.

La CPI, qui siège à La Haye (Pays-Bas) peut ouvrir une enquête sur saisine du Conseil de sécurité de l’ONU, comme dans le cas de la Libye. Mais cette procédure peut être longue et se heurter à l’opposition de la Chine et de la Russie. Elle peut aussi le faire à la demande d’un Etat signataire du Statut de Rome, le fondement juridique de la Cour.

Et c’est là que ça se complique: la Côte d’Ivoire n’a pas ratifié ce texte capital même si Abidjan a reconnu la compétence de la CPI, en 2003, sous la présidence Gbagbo. Cette reconnaissance avait été confirmée par Ouattara en novembre 2010. Pour les avocats de Ouattara, une saisine de la CPI par Abidjan est donc possible. Mais cette procédure est aléatoire, car juridiquement fragile. Si les avocats de Gbagbo réussissent à l’invalider un jour, c’est tout le dossier d’accusation qui tomberait.

Qui peut saisir la CPI?

Un autre Etat ayant signé le Statut peut saisir la CPI du dossier ivoirien. Mais, là aussi, les obstacles sont grands. Quels Etats de la région prendraient ce risque alors que des millions de ressortissants ouest-africains vivent et travaillent en Côte d’Ivoire? La France peut —théoriquement— le faire. Mais l’ancienne puissance coloniale veut-elle s’investir davantage dans la crise ivoirienne, au risque de raviver de violents sentiments antifrançais? Rien n’est moins sûr.

La CPI peut aussi s’autosaisir. Il semble que cela soit l’option choisie, même si elle est longue. Une enquête préliminaire est en cours, pour vérifier que les crimes commis sont bien de la compétence de la juridiction internationale. Le procureur demande ensuite l’ouverture d’une enquête et la chambre préliminaire donne son aval.

Elle doit au préalable conclure que la justice ivoirienne est incapable de d’enquêter sur ce type de crimes. Cela ne devrait pas être difficile, au vu de l’état de l’appareil juridique actuel, désorganisé par quatre mois de crise et noyauté depuis dix ans par le pouvoir Gbagbo. Mais sur quelle période enquêter? Seulement les quatre mois de la crise postélectorale? Ou depuis l’arrivée de Gbagbo au pouvoir en 2000?

Si la CPI décide d’ouvrir des enquêtes sur les crimes commis par le camp Gbagbo, elle ne pourra pas ignorer ceux commis par les troupes de Ouattara. La juridiction internationale prendra-t-elle le risque d’ouvrir la boîte de Pandore dans un pays encore instable, notamment dans le Grand Ouest? D’autant plus que la Cour peut inculper un «supérieur hiérarchique» qui, même s’il est absent des scènes de crime, peut être poursuivi car il ne les a pas empêchés. Cette redoutable disposition vaut à l’ex-chef rebelle et à l’ancien vice-président congolais Jean-Pierre Bemba d’être jugé par la CPI pour des crimes commis par ses hommes, notamment des viols, en Centrafrique.

Quel antidote au poison de l’impunité?

La Côte d’Ivoire de Ouattara saura-t-elle éviter le poison de l’impunité? Cette impunité si répandue sur le continent et qui crée les conditions des crimes à venir. Nombreux pensent qu’on peut sacrifier la justice à la nécessaire et fragile stabilité. Ils ont des arguments. Certains sont valables. Mais ils ont tort.

Pour le cas ivoirien, il suffit de remonter aux «années de sang», aux crimes commis en septembre 2002 et octobre 2004, lorsque la rébellion a pris le contrôle de plus de la moitié du pays. Une commission d’enquête internationale avait été formée sous l’égide de l’ONU. Des centaines de témoins avaient été entendus. Un rapport avait été transmis au Conseil de sécurité de l’ONU avec tous les éléments permettant à un procureur d’ouvrir une enquête.

Mais ce procureur n’a jamais été nommé, et la CPI n’a jamais été saisie. Parce que, comme le soulignait en février l’ONG Human Rights Watch (HRW), «il est bon ton, dans certains cercles diplomatiques, de sacrifier la justice au nom de la paix, le rapport a été enterré». Ce rapport avait pourtant documenté des «actes sans nom, perpétré par les deux camps», sans toutefois lier des invididus à des crimes spécifiques.

Dans une enquête confidentielle du rapport figurait une liste de 95 personnalités «présumées avoir commis des violations graves des droits de l’homme». Pour HRW, «selon des articles de l’époque, confirmées par des diplomates, figuraient sur cette liste les noms de Simone Gbabo, l’épouse de Laurent Gbagbo, de Charles Blé Goudé, son ministre de la Jeunesse, et dans le camp opposé de Guillaume Soro, ancien chef des rebelles et désormais Premier ministre» de Ouattara.




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