Dans de nombreux quartiers d'Abidjan, une sortie pour remplir une bassine d'eau revient à risquer sa vie. La situation humanitaire se dégrade et de nombreux ménages sont à bout. « Il n’y a plus rien dans les magasins, on ne peut pas sortir, confie un habitant. Les gens vraiment sont apeurés. Ils sont malheureux. Ils ont faim ».
Les infirmiers et les docteurs dorment sur leur lieu de travail, ils ne peuvent plus rentrer chez eux pour des raisons évidentes de sécurité. Surtout, ils peinent à administrer des soins à leur patients alors que les stocks de médicaments s'épuisent et que l'eau ne coule plus des robinets. « On a du mal à faire les soins comme il faut, explique un infirmier. Il y a des malades qui ne sont pas bien. On va pouvoir tenir encore 2 ou 3 jours comme ça après c’est pas possible ».
L'organisation non gouvernementale française, Action contre la faim (ACF) achemine cette semaine deux cargaisons de douze tonnes de matériel humanitaire, elles profiteront aux populations déplacées dans les provinces de l'Ouest. Abidjan souffre de facto d'un blocus explique François Danel, le directeur général d'ACF, joint à Man à moins de 100 kilomètres de Duékoué. « Les problèmes d’accès et de couvre-feu font qu’il est très difficile que les personnes et les marchandises circulent. Un peu comme dans une logique de blocus ou d’enfermement ».
La plupart des témoins joints par RFI étaient parfois inaudibles du fait du fracas des combats, à plat ventre chez eux ou réfugiés dans leur salle de bain, par peur des balles perdues ou de possibles exactions. Au delà des défis sanitaires médicaux et de la lutte contre la faim, les Ivoiriens doivent aussi composer avec un traumatisme psychologique qui risque de laisser des traces.
L'Europe vote une aide pour la Côte d'Ivoire
Réunis à Strasbourg depuis lundi 4 avril, les parlementaires européens n'ont abordé la situation en Côte d'Ivoire que mercredi soir, peut-être dans l'attente du dénouement.
Au delà de la crise politique, c'est la crise humanitaire qui préoccupe les députés. Pour Michèle Strieffler, rapporteur pour le Parlement à l'aide humanitaire : « Les violences électorales ont fait plus d'un million de déplacés internes et de réfugiés. De plus en ce moment, la situation sécuritaire empêche les humanitaires d'agir et d'avoir accès aux populations ce qui est dramatique. La crise humanitaire ne sera pas réglée avec l'accord politique qui est en train d'être négocié. Le chaos va de toute façon durer plusieurs mois à Abidjan ».
Pour faire face au chaos, l'Union européenne a annoncé qu'elle donnera plus que les 500 millions d'euros alloués en urgence dès que la situation sur place sera stabilisée. Ceux qui reprochent à l'Union européenne un rôle strictement humanitaire semblent avoir une nouvelle fois raison.