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Forte tension au Mozambique: frictions entre le pouvoir et la Renamo

Au Mozambique, les anciens rebelles de la Renamo ont dénoncé lundi 21 octobre l'accord de paix de 1992. L'ex-groupe rebelle, dont la base militaire a été conquise lundi par les troupes gouvernementales, s'est engagé à ne pas riposter, mais demande à l'armée de se retirer. Les craintes d'un retour à la guerre civile sont désormais ravivées.



Forte tension au Mozambique: frictions entre le pouvoir et la Renamo

L'accord de paix de 1992 avait mis un terme à 16 années de guerre civile entre la Renamo et le Frélimo, le parti actuellement au pouvoir. Cette décision du parti d'opposition est intervenue après un assaut de l'armée mozambicaine contre la base de la Renamo, dans la province de Gorongosa, au centre du pays. Pour les anciens rebelles, cette attaque sonne le glas de la démocratie pluripartite au Mozambique.

Haute tension

« La Renamo réaffirme qu'elle ne veut pas un retour à la guerre », a déclaré Lourenço do Rosário, négociateur indépendant qui assure la liaison entre le pouvoir et les ex-rebelles. Pourtant, mardi matin, des hommes de la Renamo ont attaqué un poste de police dans la ville de Maringue, au centre du pays, en représaille à l'assaut de la veille.
 

 Mozambique: fin de l’accord de paix entre le parti au pouvoir et les ex-rebelles de la Renamo

L'ex-guérilla ne compterait aujourd'hui que quelque 400 vétérans. Mal équipés, tous ont largement dépassé la quarantaine et n'ont réellement plus les capacités physiques de se lancer dans une guerre. Et ce n’est pas tout. La Renamo a également perdu tous ses soutiens extérieurs, qu'ils soient financiers ou politiques.

Consciente qu'elle ne pourra pas prétendre à une victoire militaire, la guérilla joue aussi la carte politique, comme l’explique Fernando Mazanga, porte-parole de l'ex-rébellion : « Pour mettre un terme aux hostilités, le Frélimo doit rappeler ses hommes, abandonner son attitude belliqueuse et admettre que les questions politiques se règlent par la politique », explique-t-il. Et d'ajouter : « La Renamo n’est pas seule. Le peuple nous soutient. Tous les jours, nous recevons des messages de Mozambicains qui veulent nous rejoindre. Aujourd’hui, la seule arme que nous utilisons, c’est la politique. Les armes physiques ne servent qu’à nous défendre et non pas à faire la guerre. Maintenant, s’il fallait en arriver là, seul le peuple aurait le droit de décider de prendre les armes. Mais pour le moment, ce n’est pas ce que nous voulons, nous voulons la démocratie, la stabilité et la paix. »

La plus forte tension depuis 1992

Le Mozambique connaît indéniablement l'une des plus fortes périodes de tension depuis la fin de la guerre civile en 1992, même si cette situation dure depuis un certain temps. D'abord, Afonso Dhlakama a pris le maquis il y a plus d'un an. Le dirigeant de la Renamo a quitté son domicile dans la ville de Nampula, pour rejoindre les bases retranchées de la Renamo. Ensuite, cela fait des mois que les hommes de la Renamo multiplient les attaques dans le centre du pays : contre des postes de police à Muxungue en avril, ou contre diverses bases militaires à Savane. La Renamo a même menacé cet été de s'en prendre à la voie ferrée qui relie les villes de Tete et Beira.

Sur le papier, la Renamo réclame plus de participation à la vie politique et une meilleure représentativité au sein de la Commission électorale et des forces armées. Elle accuse le Frélimo d'accaparer le pouvoir et les richesses du pays.

Les richesses du sous-sol attisent les convoitises

Dans les faits, c'est sans doute la question des ressources naturelles, et de leur répartition, qui a mis le feu aux poudres. Ces cinq dernières années, les perspectives économiques du Mozambique ont bien changé.

Le sous-sol mozambicain est riche et son exploitation ne fait que commencer. Le Mozambique disposerait des plus importantes réserves de charbon d'Afrique, évaluées à 23 milliards de tonnes. Des pierres précieuses et semi-précieuses ont été découvertes au nord du pays. Cette même région disposerait de plus de 3 600 milliards de mètres cubes de gaz naturel.

La question cruciale du partage des richesses naturelles se pose donc aujourd'hui. Il a été jusque là parfaitement inégalitaire. Le sud, où se trouve la capitale, Maputo, développé sur le corridor en direction de l'Afrique du Sud, est riche. Et le nord est extrêmement pauvre. Cette situation, héritée de la colonisation, n'a jamais été remise en cause par le Frélimo depuis qu'il est au pouvoir. Mais aujourd'hui, la découverte de nouvelles ressources naturelles change la donne.

La Renamo isolée

S'imposer dans une guerre civile semble peu probable. La Renamo est isolée politiquement et diplomatiquement. Depuis 1992, le parti n'a jamais su se réformer. Il a gardé des structures héritées de l'époque de la guérilla. Ne serait-ce que son dirigeant, Dhlakama, en poste depuis 1979.

La Renamo n'a jamais créé de structures civiles actives, n'a jamais réussi à rallier un minimum d'intellectuels, n'a jamais réuni un congrès national de tous les représentants. Et sa base populaire s'érode. Elle fait partie de l'Internationale démocrate centriste, mais elle n'en a jamais tiré un soutien extérieur solide. On voit mal aujourd'hui qui pourrait lui apporter une aide financière ou armée si elle se lançait de nouveau dans le conflit.
 

Si la Renamo n'a pas les moyens d'une guerre civile, mais il ne faut pas non plus sous-estimer sa capacité de nuisance. La seule ligne de chemin de fer du pays se trouve dans son fief. Elle relie la ville de Tete où est exploité le charbon, au port de Beira d'où il est exporté. Il s'agit donc d'une infrastructure stratégique pour le développement économique du pays. En juin, la Renamo a menacé d'attaquer cette ligne de train. Il n'en a pas fallu plus pour que la compagnie minière Rio Tinto suspende ses convois.

L’appel au calme de Sant’Egidio

Cette escalade de la violence au Mozambique est le résultat de plusieurs années de tensions entre Afonso Dhlakama et le gouvernement du Frélimo, ancien adversaire de la Renamo pendant la guerre civile qui a fait près d'un million de morts entre 1977 et 1995. Les deux parties négocient depuis 2012, mais cela n'a fait qu'aviver les rancœurs. La Renamo réclame une part des revenus des matières premières, mais le gouvernement ne veut pas en entendre parler. La communauté romaine de Sant’Egidio, qui a négocié l'accord de paix de 1992, lance un appel aux deux parties afin qu'elles retrouvent rapidement l'esprit d'alors. Ci-contre en audio, le témoignage d'Angelo Romano.
 


Rfi.fr

Mercredi 23 Octobre 2013 - 11:02


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